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Les dauphins potentiels

Le 30 août, au Gabon, Ali Ben Bongo a remporté la présidentielle et ainsi pris le poste occupé par son père pendant 41 ans. En Afrique, il n'est pas le seul : plusieurs rejetons gardent, eux aussi, un œil attentif sur le fauteuil de papa...

SÉNÉGAL

Karim Wade, l'analyste financier devenu ministre d'État


Karim Meïssa Wade, 40 ans, analyste financier de profession, évite de se présenter ouvertement comme le dauphin de son président de père, Abdoulaye Wade, 82 ans, au pouvoir depuis 2000. Conseiller personnel du chef de l’État depuis 2001, celui-ci a pourtant du mal à cacher ses ambitions présidentielles pour le scrutin de 2012. "Je connais de grandes démocraties où le fils a succédé au père", a-t-il lâché, en mars dernier, dans une allusion directe à la famille Bush, aux États-Unis.


Sous la présidence de son père, Karim Wade n’a cessé de prendre de l’importance sur la scène politique sénégalaise.

En 2004 d’abord, il se voit confier les rênes de l’Anoci, l’agence chargée d’organiser le 11e sommet de l'Organisation de la conférence islamique qui a eu lieu à Dakar en mars 2008. Un cadre dans lequel Karim coordonne des chantiers urbains pharaoniques, et noue des relations avec les bailleurs de fonds du Golfe, à défaut de faire irréfutablement ses preuves. Entre retards et dépassement de budget des travaux engagés, son bilan à la tête de l’Anoci est mitigé... À la fin de 2008, l’expérience ne l’a pourtant pas plombé : le magazine Jeune Afrique le présente comme l’une des "100 personnalités qui feront l’Afrique en 2009".

Le 22 mars dernier effectivement, Karim Wade se présente pour la première fois devant les électeurs, en tant que candidat à la mairie de Dakar. Non sans désillusion : il subit un échec cuisant, ne devient que simple conseiller municipal d'opposition, et endosse la responsabilité de la première défaite du clan Wade en neuf ans de règne.

Abdoulaye Wade ne semble pourtant pas lui en tenir rigueur : deux mois plus tard seulement, il lui fait intégrer le gouvernement avec le titre de ministre d'État, en charge de la Coopération internationale, de l'Aménagement du territoire, des Transports aériens et des Infrastructures. Un poste stratégique, puisqu’il s’agit du "plus grand ministère jamais constitué depuis l'indépendance", précise le quotidien sénégalais privé Sud Quotidien, qui revendique son indépendance. Au Sénégal, Karim Wade devient alors le premier fils d'un président de la République à faire partie d'un gouvernement.
 

ÉGYPTE

Gamal Moubarak, de la Bank of America au PND

"L’Égypte n’est pas une monarchie", se plaît à répéter le président égyptien Hosni Moubarak, 81 ans. La promesse du raïs est pourtant loin d’écarter son fils cadet, Gamal, de la course à sa succession. Elle signifie simplement que ce fils prodigue doit légitimer son ascension politique et polir son image d’homme providentiel avant de se présenter à la prochaine présidentielle égyptienne, prévue en 2011.

Né en 1963, Gamal Moubarak s’est construit une solide carrière de businessman avant d’embrasser la gestion des affaires publiques : études à l’Université américaine du Caire, premier emploi à la Bank of America, en Égypte d’abord puis au Royaume-Uni, création, enfin, de Medinvest, un fonds d’investissements privé.

Ce n’est qu’en 2000 que Gamal rejoint l’organigramme du Parti national démocratique (PND, au pouvoir), dont il est aujourd’hui chef du bureau politique et, de facto, numéro 2. Son grand œuvre : avoir orchestré la campagne – et la victoire – de son père lors de la première élection présidentielle multipartite de l’histoire égyptienne, en septembre 2005.

Au sein du PND, Gamal se pose en homme du changement. À la tête d’une nouvelle garde, il a nettoyé le parti de ses éléments les plus corrompus pour les remplacer par des fidèles, allant jusqu’à assurer leur promotion au gouvernement. En témoigne, par exemple, le cas d’Ahmed Ezz, un magnat de l’économie égyptienne devenu le responsable de l’organisation du PND, ou de Rachid Mohammed Rachid, un autre businessman devenu ministre de l’Industrie.

Toutefois, s’il se présente comme un libéral convaincu, apprécié des jeunes et des milieux d’affaires égyptiens et occidentaux, Gamal Moubarak doit encore se doter d’une stature internationale d’envergure pour prétendre à la fonction présidentielle. Son président de père y travaille, en l’emmenant régulièrement dans ses déplacements à l’étranger et en lui présentant divers chefs d’État.

Pour autant, l’arrivée de Gamal Moubarak à la présidence égyptienne à la faveur de l’élection de 2011 est loin d’être acquise. Celui-ci a au moins deux gros handicaps : d’abord, ne pas être issu des rangs de l’armée, qui a fourni au pays tous ses présidents depuis le coup d’État de 1952 ; porter le nom de son père ensuite, alors que l’allié américain ne goûte guère les régimes héréditaires… et qu’il risque fort de le rappeler à l’approche du scrutin.