Le président vénézuélien Nicolás Maduro, de plus en plus contesté, a proposé samedi de convoquer des élections législatives anticipées dans le courant de l'année. Au même moment, des milliers d'opposants manifestaient pour exiger son départ.
Dans un discours prononcé devant des milliers de partisans célébrant les 20 ans de la révolution bolivarienne (lancée par Hugo Chavez), Nicolás Maduro a annoncé samedi 2 février que l'Assemblée constituante, fidèle à son administration, allait débattre du renouvellement de l'Assemblée nationale, qu'il a qualifiée de "bourgeoise". Les prochaines élections législatives sont prévues pour 2020.
De leur côté, des milliers d'opposants emmenés par le président autoproclamé Juan Guaido, ont défilé durant plusieurs heures dans l'est de la capitale Caracas agitant des drapeaux aux couleurs rouge, bleu et jaune du Venezuela.
Depuis une estrade devant la représentation de l'Union européenne à Caracas, dans le quartier de Las Mercedes, le chef de l'opposition a fait une déclaration : "Nous allons continuer dans la rue jusqu'à ce que nous soyons libres, jusqu'à la fin de l'usurpation", a déclaré, la voix enrouée, Juan Guaido, 35 ans, en costume sombre et chemise blanche. "Oui, c'est possible!", lui répondait la foule.
Anticipant un mois de février "qui doit être déterminant", il a appelé ses partisans à ne pas relâcher la pression, lors d'une nouvelle manifestation le 12 février.
Des défections dans l'armée
Le pays est donc divisé entre partisans du chef de file de l'opposition soutenu par les Etats-Unis, la plupart des Etats latinoaméricains et certains pays européens et ceux du président contesté soutenu lui par la Russie, la Chine et la Turquie. Mais un troisième acteur pourrait peser dans le rapport de force : l'armée. Cette dernière est pour l'instant fidèle à Nicolas Maduro mais commence par enregistrer des défections.
Dans une vidéo diffusée dans la journée sur les réseaux sociaux, un général de division de l'armée de l'Air vénézuélienne a annoncé qu'il ne reconnaissait plus "l'autorité dictatoriale" de Nicolas Maduro et faisait allégeance au président autoproclamé Juan Guaido. "Je vous informe que je ne reconnais pas l'autorité dictatoriale de Nicolas Maduro et que je reconnais le député Juan Guaido comme président du Venezuela", affirme l'officier, qui apparaît en uniforme sur la vidéo et s'exprime depuis un lieu non divulgué.
#ATENCIÓN: General de la Fuerza Aérea de Venezuela, Francisco Yánez Rodríguez, reconoce a Juan Guaidó como presidente interino https://t.co/BXPS3y0hKi pic.twitter.com/QQoINo3cw9
Noticias RCN (@NoticiasRCN) 2 février 2019Selon ce dernier qui s'est présenté comme directeur de la planification stratégique du haut commandement de l'Armée de l'Air, "90 pour cent des forces armées (..) ne soutiennent pas le dictateur mais le peuple du Venezuela". Sur son compte Twitter, l'armée de l'Air a immédiatement posté une photo de ce général, Francisco Yanez, barrée en rouge du mot "Traître".
Indigno el hombre de armas que traiciona el juramento de fidelidad y lealtad a la Patria de Bolívar y al legado del Cmdte. Hugo Chávez, y se arrodilla ante pretensiones imperialistas. G/D Francisco Yanez TRAIDOR pic.twitter.com/1O1KNH63TI
AVIACIÓN MILITAR (@AviacionFANB) 2 février 2019Il y a une semaine, l'attaché militaire du Venezuela aux États-Unis, le colonel Jose Luis Silva, avait aussi appelé ses frères d'armes à soutenir Juan Guaido, dans une vidéo filmée au sein même de l'ambassade vénézuélienne à Washington.
Juan Guaido a annoncé samedi l'arrivée dans les prochains jours d'une aide humanitaire destinée au pays pétrolier à la frontière colombienne, au Brésil et sur une "île des Caraïbes", en demandant à l'armée de la laisser entrer. "Nous avons déjà trois centres de collecte pour l'aide humanitaire : Cucuta (Colombie), et il y en aura deux autres, l'une au Brésil et l'autre sur une île des Caraïbes", a déclaré le chef de l'opposition.
Washington a indiqué tenir prêts des aliments et des médicaments destinés au Venezuela pour un montant de 20 millions de dollars, mais Nicolas Maduro, qui attribue les pénuries aux sanctions américaines, estime qu'accepter l'aide humanitaire reviendrait à ouvrir la porte à une intervention militaire.
Une quarantaine de personnes tuées
La tension grimpe à chaque appel à manifester au Venezuela. Une quarantaine de personnes ont été tuées et plus de 850 arrêtées selon l'ONU depuis le début des mobilisations le 21 janvier.
Le Venezuela, pays aux énormes ressources pétrolières, a sombré économiquement et ses habitants souffrent de graves pénuries de nourriture et de médicaments, ainsi que d'une inflation galopante (10 000 000 % en 2019 selon le FMI). Depuis 2015, quelque 2,3 millions de Vénézuéliens ont quitté le pays.
Avec AFP et Reuters