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Guerre commerciale : Washington croit en sa victoire face à Pékin

Donald Trump s'est réjoui des difficultés économiques chinoises, alors que les négociations commerciales pour sortir de la crise sino-américaine reprennent. Il pense qu'elles lui garantissent d'être en position de force. Une vision à court terme.

Donald Trump arborait un optimisme commercial des grands jours, dimanche 6 janvier. Alors que les mésaventures chinoises d’Apple avaient fait plonger les Bourses du monde entier deux jours plus tôt, pour le président américain, il s’agissait plutôt d’un bon signe.

Elles étaient la preuve de la faiblesse de l’économie de son adversaire commercial numéro un. "La Chine ne va pas très bien. Cela nous met dans une position avantageuse [pour négocier un accord commercial, NDLR]", a-t-il affirmé.

C'est donc avec un esprit conquérant que la délégation américaine s’est rendue à Pékin pour entamer, lundi 7 janvier, les premières négociations pour sortir du conflit commercial sino-américain depuis que Donald Trump et le président chinois Xi Jinping ont signé un trêve de 90 jours début décembre. Après plus de six mois de surenchère tarifaire entre les deux pays, les États-Unis estiment avoir les meilleures cartes en main pour remporter la partie et obtenir des concessions chinoises.

Une question de temps

Le ton beaucoup plus conciliant adopté par Pékin avant le début des négociations avait de quoi conforter Washington. Un éditorial du très pro-Pékin Global Times appelait notamment, samedi, à trouver une issue à ce conflit sur "la base du respect mutuel".

"Il est vrai que les États-Unis ont l’avantage sur la Chine… du moins à court terme", reconnaît Jean-François Dufour, directeur du cabinet de conseil DCA Chine Analyse, contacté par France   24. D’un côté, plusieurs indicateurs importants de l’économie chinoise ont montré des faiblesses en fin d’année, telles que la production industrielle et les exportations. Pékin a même décidé de relancer des programmes de grands travaux, avec notamment la construction de chemins de fer à grande vitesse "alors qu’il y a une surcapacité ferroviaire, mais c’est l’un des recours traditionnels de l’État pour soutenir l’activité", souligne Jean-François Dufour. De l’autre côté , les États-Unis ont connu un mois de décembre meilleur que prévu sur le front de l’emploi.

Mais ce rapport de force n’est pas suffisant pour garantir à Washington une victoire dans cette guerre commerciale aux yeux de Jean-François Dufour. "Pékin va essayer de faire traîner les négociations, car sur le moyen terme, la situation est plus équilibrée", estime cet expert.

Pour lui, Apple est un exemple des problèmes à venir pour l’économie américaine. Contrairement à Donald Trump, il ne pense pas que la baisse des ventes chinoises d’iPhone soit due à des fins de mois difficiles de Chinois qui ne voudraient plus s’offrir des smartphones haut de gamme. "Les riches qui pouvaient s’acheter un iPhone avant peuvent toujours le faire, mais en l’occurrence, il y a eu un réflexe nationaliste qui explique, en partie, pourquoi le Chinois Huawei est passé devant Apple en décembre pour devenir le deuxième constructeur mondiale de smartphone derrière Samsung", affirme Jean-François Dufour.

Pour quelques tonnes de soja de plus

Boeing ou Tesla, qui misent tous les deux beaucoup sur le marché chinois, n’auraient aucune envie de subir le même sort commercial. L’avionneur vient tout juste d’assembler pour la première fois un avion en Chine, et le constructeur automobile a posé, ce lundi, la première pierre d’une usine en banlieue de Shanghai.

En réalité, d’après Jean-François Dufour, l’issue la plus probable des négociations qui viennent de débuter est que la Chine accepte de faire quelques concessions pour désamorcer la crise et permettre à Donald Trump de publier un tweet triomphant. Mais sans céder sur l’essentiel. "Il est possible que Pékin accepte de signer quelques promesses d’achat qui se traduiraient, par exemple, par des hausses des importations de soja et de gaz américain", anticipe l’économiste.

En revanche, Xi Jinping ne semble pas prêt à remettre en cause son plan "made in China 2025", qui vise à faire de son pays la première puissance technologique mondiale. Donald Trump a pourtant fustigé à plusieurs reprises ces derniers mois le "vol de technologie" réalisé par la Chine . Washington a même pris des mesures pour contrecarrer les ambitions mondiales de certains fleurons de la tech chinoise comme Huawei ou le constructeur de smartphone ZTE.

Reste à savoir si, pour quelques tonnes de soja et litres de gaz en plus, Donald Trump sera prêt à enterrer la hache de guerre. S’il cherche à obtenir encore plus de concessions, le risque est grand qu’en mars, à l’expiration de la trêve de 90 jours, les négociations échouent. Dans cette hypothèse, Washington a déjà prévenu que les États-Unis ajouteront de l’huile sur le feu en augmentant encore davantage les droits de douanes sur les produits chinois.