logo

Fin de la Fondation Trump : charité bien ordonnée commence par Donald Trump

La dissolution de la Fondation Trump, mardi, marque la fin d’une structure qui, derrière des apparences de philanthropie, n’aurait servi qu’aux intérêts de Donald Trump, d’après la procureure générale de New York.

C’est une première fissure dans l’édifice de l’empire financier du président des États-Unis. La Fondation Trump a accepté de se dissoudre, mardi 18 décembre, en passant un accord avec la procureure de l’État de New York, Barbara Underwood. Elle accusait cette organisation caritative de n’être rien d’autre qu’une coquille vide qui, dans les faits, servait de réserve de fonds pour les affaires du milliardaire américain.

L’affaire n’a pas les mêmes implications politiques que l’enquête sur les liens entre l’équipe de campagne de Donald Trump et la Russie, et ne présente pas le même attrait médiatique que les frasques extra-conjugales du locataire de la Maison Blanche. Mais elle n’en touche pas moins au cœur du système Trump et apporte de nouvelles cartouches aux détracteurs du président.

7 dollars pour les boy-scouts

La Fondation Trump a été créée en 1987 par le magnat immobilier qui avait, alors, utilisé les recettes de la vente de son best-seller “The Art of the deal” (L'art de la négociation) pour l’établir. Elle a représenté pendant près de 30 ans le bras caritatif de l’empire financier de l’homme d’affaires. Elle était censée arbitrer entre différentes associations pour choisir les bénéficiaires de la générosité du milliardaire.

Mais le principal bénéficiare, si ce n’est le seul, a été Donald Trump lui-même, d’après les différentes enquêtes, que ce soit par le Washington Post ou par le bureau du procureur général de New York.

Dès le départ, le magnat de l’immobilier a démontré qu’il avait une vision très personnelle de la charité : l’un des premiers dons effectués était adressé aux boy-scouts. D’un montant de 7 dollars, il correspondait au prix de l’inscription à ce groupe et a été versé la même année où Barron Trump, le plus jeune enfant du milliardaire, est devenu scout, souligne le Washington Post.

L’une des plus importantes donations effectuées, d’un montant de 264 631 dollars en 1989, a permis de restaurer une fontaine en déshérence… juste devant l’entrée du Plaza Hotel, l’un des fleurons de l’empire hôtelier de Donald Trump, dans le quartier de Central Park, à New York.

Entre 1987 et 2008, l’homme d’affaires a versé un peu plus de cinq millions de dollars sur les comptes de sa fondation. Il a ensuite arrêté de l’alimenter personnellement. À partir de 2009, l’argent versé à cette structure provenait exclusivement d’autres personnes, ont constaté les enquêteurs du bureau du procureur général de New York. Donald Trump récoltait des fonds auprès de connaissances puis reversait l’argent, en son nom, à des œuvres caritatives. De l’avis de plusieurs experts interrogés par le Washington Post, c’est un modèle unique et moralement discutable dans le milieu de la philanthropie américaine.

20 000 dollars pour s’acheter une peinture de lui-même

Mais Donald Trump ne s’est pas contenté de soigner son image de généreux donateur avec l’argent des autres. La Fondation Trump a aussi servi les intérêts commerciaux et politiques du milliardaire. Il a ainsi utilisé l’argent de cet organisme pour payer plus de 250 000 dollars afin de mettre un terme à deux contentieux commerciaux en 2007 et en 2012, a constaté le procureur général de New York. C’est aussi en piochant dans l’argent de cette fondation qu’il a acheté une peinture de lui-même pour la modique somme de 20 000 dollars. Des transactions qui pourraient s’avérer illégales au regard de la loi américaine, qui interdit d’utiliser l’argent d’une fondation dans son propre intérêt.

Donald Trump s’est aussi fait taper sur les doigts par les services fiscaux pour avoir versé 25 000 dollars à travers sa fondation à un candidat en Floride en 2013. La loi interdit à une fondation privée de faire des donations politiques.

Durant la campagne de 2016, le candidat républicain a lancé une grande collecte de fonds pour des associations de vétérans. À cette occasion, plus de 2 millions de dollars ont été versés sur les comptes de la Fondation Trump. Mais ce sont, ensuite, les membres de l’équipe de campagne du futur président qui ont décidé du devenir de ces fonds. Là encore, le procureur général de New York doute de la légalité de cette manière de procéder.

L’histoire de la Fondation Trump semble être celle d’un mélange des genres où la frontière entre philanthropie et intérêts commerciaux est très floue, souligne un éditorial du New York Times. Pour Tony Schwartz, co-auteur du livre “Art of the deal” et critique virulent de Donald Trump, la manière dont cet organisme a été géré résume aussi parfaitement la personnalité du président : “C’est quelqu’un qui évolue dans un monde confiné à ses seuls intérêts, et si rien d’autre ne compte, il n’y a, alors, personne d’autre à qui donner de l’argent”.