La justice malaisienne a condamné une femme à six coups de bâton pour avoir consommé de l'alcool, ce qui est interdit par la loi islamique. Face au tollé suscité, un tribunal islamique a ordonné la révision de sa peine, jugée trop sévère.
Kartika Sari Dewi Shukarno, 32 ans, mannequin et mère de deux enfants, a été condamnée à six coups de bâton et à une amende de 5 000 ringits (1 000 euros). Son crime : avoir bu trois verres de bière dans le salon d’un hôtel, en Malaisie, en décembre 2007.
La décision du tribunal islamique a été rendue il y a quelques semaines, en application de la charia, la loi islamique, qui interdit à tout musulman de boire de l’alcool. Mais ce mardi, un nouveau rebondissement vient donner un nouvel espoir à cette femme, qui vit à Singapour depuis 15 ans : un tribunal islamique a décidé de réexaminer cette décision de justice, jugée trop sévère. "La première impression est que la sentence est trop sévère et n'est pas adaptée au délit", a déclaré Shahrizat Abdul Jalil, la ministre des Femmes, de la Famille et du Développement communautaire.
L’affaire fait grand bruit en Malaisie qui compte 60 % de musulmans (sur les quelque 27 millions d’habitants) mais aussi d'importantes minorités chinoise et indienne. Le pays dispose d’un double système judiciaire et les tribunaux islamiques peuvent juger les musulmans et faire appliquer la charia.
En cas de consommation d'alcool, les musulmans encourent une amende, des coups de bâton, voire la prison, mais les poursuites sont extrêmement rares. Kartika serait la première femme à recevoir ce châtiment dans le pays.
De son côté, Amnesty International avait demandé l'abolition d'un châtiment "cruel, dégradant et interdits par la législation internationale sur les droits de l'Homme".
Le Premier ministre malaisien avait demandé à Kartika de faire appel
La Malaisie semble vouloir refermer ce dossier, bien lourd à assumer sur la scène internationale. Lundi, le Premier ministre malaisien Najib Razak avait déjà demandé à la jeune femme de faire appel de sa condamnation, ce qu’elle avait décliné.
Elle avait, pour sa part, demandé que la peine lui soit infligée en public afin de dissuader les autres musulmans de consommer de l’alcool. "Ce sera une façon plus efficace d'éduquer les musulmans à ne pas boire", avait-t-elle indiqué en exprimant des regrets.
"Je suis prête à recevoir les coups de bâton en public devant une mosquée, mais le ministère public a indiqué à mon père que ce n'était pas possible. J'ai aussi demandé à ce que des journalistes y assistent, mais cela n'a pas été autorisé", a-t-elle ajouté.
Sursis en raison du ramadan
De plus, la punition qui devait être appliquée cette semaine a finalement été reportée. La jeune mère aurait dû être transférée ce lundi à la prison des femmes, près de Kuala Lumpur, avant d’être finalement relâchée.
"La punition n'a pas été abrogée, elle a été reportée en raison du ramadan", avait fait savoir Mohamad Sahfri Abdul Aziz, un membre du conseil exécutif pour la religion.
Le sursis accordé pourrait être un moyen d'enterrer l'affaire, qui ternit l'image de la Malaisie, a estimé à l'AFP un responsable gouvernemental, sous le couvert de l'anonymat.