
Prochaine étape pour le Brexit : le vote au Parlement britannique sur l’accord validé par les Vingt-Sept. Un obstacle particulièrement difficile à franchir pour la Première ministre britannique, Theresa May. Petit cours d’arithmétique.
Theresa May franchit un obstacle après l’autre. La Première ministre britannique a obtenu, dimanche 25 novembre, la validation par les 27 pays de l’Union européenne de l’accord sur le Brexit qu’elle défend. Elle avait, dix jours plus tôt, surmonté la fronde des “Brexiters” (partisans du Brexit dur) qui menaçaient de faire tomber son gouvernement.
Mais le plus dur reste à faire : Theresa May doit maintenant franchir le mur des 320. C’est le nombre de voix dont elle a besoin au Parlement britannique pour entériner le texte sur le divorce avec l’UE.
240 soutiens acquis
Ce vote crucial pour l’avenir des relations britannico-européennes – et pour le gouvernement britannique – doit intervenir le 11 décembre. Theresa May dispose donc de deux semaines pour convaincre les députés de soutenir son accord. En cas d’échec, Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, a averti que l’issue la plus probable serait un "hard Brexit", c’est-à-dire une sortie sans accord pour régler les détails de la séparation entre le Royaume-Uni et l’UE. Les deux années passées à négocier n’auraient alors servi à rien.
Lors d'une première séance devant le Parlement, le 15 novembre, la cheffe du gouvernement avait été soumise à un feu de critique, qui présage de la difficulté de la tâche. Theresa May a un problème arithmétique à résoudre : sur l’ensemble des 639 parlementaires appelés à s’exprimer, elle ne peut compter que sur environ 240 soutiens acquis. Il s’agit, d’une part, des 85 parlementaires conservateurs "loyalistes" et, d’autre part, de 150 députés conservateurs qui travaillent directement ou indirectement pour le gouvernement et devraient démissionner de leur poste en cas de vote contre le texte.
Au-delà de ce nombre, Theresa May va avancer en terrain hostile pour aller à la pêche aux voix et trouver les 80 soutiens supplémentaires. Le débat sur le Brexit a, en effet, créé de nouvelles lignes de démarcation politiques.
Elle peut déjà oublier ceux qui ont toujours soutenu le "Remain" (rester au sein de l’UE). Soit l’écrasante majorité des 257 députés travaillistes (Labour), dont le leader, Jeremy Corbyn, a appelé à voter contre l’accord. Les 12 députés libéraux du Lib-Dem et les 35 représentants du Parti national écossais devraient aussi se faire un plaisir de rejeter un texte qui valide la sortie de l’Union européenne.
Promesses et menaces
À l’autre extrémité de l’échiquier politique, la frange la plus pro-Brexit du Parti conservateur a aussi annoncé son intention de faire échouer l’accord. Les 65 députés qui, comme Boris Johnson ou Jacob Rees-Mogg, assurent que le compromis trouvé représente une trahison de la volonté du peuple exprimé lors du référendum de juin 2016. Ils se disent prêts à renverser la Première ministre.
Theresa May a également été lâchée par les dix députés nord-irlandais du Parti unioniste démocrate (DUP), pourtant censés soutenir la politique du gouvernement. Ils estiment que la solution pour régler le problème de la frontière irlandaise n’est pas satisfaisant.
Qui reste-t-il ? Une poignée de députés travaillistes favorables au Brexit qui pourraient être séduits par l’accord de compromis. Mais les cinq parlementaires concernés devraient, pour ce faire, braver la consigne de vote de leur "chef" Jeremy Corbyn.
Il en va de même pour une autre catégorie d’élus qualifiés de "travaillistes anxieux" par la chaîne économique Bloomberg. Cette vingtaine de députés ont été élus dans des circonscriptions qui ont voté en faveur du Brexit lors du référendum. Ils craignent donc pour leur réélection s’ils s’opposent à l’accord.
Mais même avec le soutien de ces rebelles du Labour, Theresa May n’a pas la majorité au Parlement pour faire passer son texte. La partie serait-elle perdue d’avance ? "Sa seule chance est de jouer la carte de la menace avec certains et des promesses avec d’autres, en espérant ainsi réussir à obtenir, au cas par cas, des soutiens opportunistes", analyse le quotidien britannique The Guardian. Il sera ainsi intéressant de voir quelle est l’ampleur des concessions politiques que Theresa May est prête à faire pour sortir victorieuse du vote au Parlement le plus important de sa carrière.