Mais que veut vraiment Melania Trump? Son intervention dans le dossier brûlant des enfants séparés de leurs parents migrants a semé la confusion et nourri la polémique, renforçant l'image d'une Première dame plus atypique que jamais.
La crise des plus de 2 000 mineurs sans-papiers séparés de leurs parents aux États-Unis a pris un virage inattendu, jeudi 21 juin, avec la visite de Melania Trump, souriante et chaleureuse, dans un refuge pour enfants clandestins à McAllen, grande ville texane frontalière du Mexique.
Une scène encore inimaginable la veille, avant que son époux Donald Trump ne signe, dans un revirement fracassant, un décret mettant fin aux séparations parents-enfants qu'il avait lui-même encouragées avec sa politique de "tolérance zéro" face aux clandestins.
Comment puis-je "aider à réunir ces enfants avec leurs familles aussi vite que possible ?", a lancé la Première Dame américaine au personnel du refuge, les remerciant pour leur "compassion" et leur "gentillesse" apportées aux enfants "en ce moment difficile".
Le centre accueille une soixantaine de mineurs âgés de 5 à 17 ans, originaires du Honduras et du Salvador. La plupart sont des adolescents qui ont fait le voyage seuls depuis ces pays rongés par la violence. Six ont été séparés de leurs parents. "Ils ont peur sans leur famille", a affirmé Melania Trump après avoir les avoir rencontré pendant plus d’une heure. Les enfants avaient écrit "Bienvenue" sur un drapeau américain.
L'idée du voyage est venue "à 100%" de Melania Trump, a assuré sa porte-parole, Stephanie Grisham.
"Je m'en fiche complètement, et vous?"
Si l'opération, préparée dans le plus grand secret, a réussi son effet choc, elle a été perturbée par les images de la Première dame vêtue d'une veste sur le dos de laquelle étaient imprimés ces mots : "I really don't care, do u?" (Je m'en fiche complètement, et vous?).
Les réseaux sociaux se sont immédiatement enflammés et ce message sibyllin a suscité des interprétations contradictoires.
Claire Thomas, une professeure de droit qui a défendu de nombreux enfants clandestins, a été de ceux que la veste a choqués. "Je me demande comment le personnel qui l'aide à choisir ses tenues a pu permettre ça !" s'est-elle indignée.
D'autres ont voulu voir dans ce message une sorte de revanche de Melania Trump sur son mari, dont la liaison supposée avec une actrice porno en 2006, alors qu’elle venait d'accoucher de leur fils Barron, ne cesse de revenir dans l'actualité américaine.
La Veste qui fait et fera parler...
En visite surprise au Texas dans un centre ou sont refugies des enfants de clandestins Melania Trump porte cette veste " je m'en fous et vous ?" pic.twitter.com/dVkmmpv2Oa
D’après l’analyse de Jeanne Zaino, professeure de sciences politiques au Iona College de New York, le Première Dame revendiquait plutôt son indépendance, en disant aux médias et au public américain, "Je me fiche de ce que vous pensez". Hypothèse que Melania Trump a semblé confirmer en remettant la fameuse veste à son retour à Washington.
Sa porte-parole a cependant assuré qu'"il n'y avait pas de message caché" derrière cette inscription, tandis que Donald Trump affirmait dans un tweet que sa femme avait en fait voulu parler "des médias fake news".
“I REALLY DON’T CARE, DO U?” written on the back of Melania’s jacket, refers to the Fake News Media. Melania has learned how dishonest they are, and she truly no longer cares!
Donald J. Trump (@realDonaldTrump) 21 juin 2018Cet épisode a ajouté à la polémique amorcée dimanche par la première déclaration de la Première Dame sur le dossier des enfants séparés.
"Gouverner avec le coeur"
Via sa porte-parole, Melania Trump, elle-même une immigrée slovène arrivée aux États-Unis il y a plus de 20 ans, qui a gardé un gros accent étranger, avait alors dit "détester voir des enfants séparés de leur famille". Elle avait appelé à "gouverner avec le cœur" et souhaité, dans la droite ligne de son mari, un accord bipartisan au Congrès pour réformer les lois en matière d'immigration.
Certains avaient alors salué un parti pris courageux dans cette déclaration ambiguë et applaudi la critique implicite d'une politique de séparation alors vigoureusement défendue par son mari. Mais dans le camp démocrate, beaucoup ont dénoncé le "mensonge" de Melania Trump, puisqu'elle attribuait, comme son mari, la responsabilité de cette politique aux démocrates autant qu'aux républicains.
Dans un éditorial publié par le New York Times, le commentateur Charles Blow a qualifié le couple présidentiel de "Roi et Reine de la cruauté" et comparé la Première dame à Marie-Antoinette pour avoir, alors que la colère montait face aux séparations, tweeté sur le plaisir qu'elle avait eu à "prendre le thé" avec la reine d'Espagne pour discuter des "façons d'avoir un impact positif sur les enfants".
"Elle est vraiment fascinante"
Un sondage publié mardi par CNN montrait que sa cote de popularité, en hausse en début d'année, était retombée à 51 % d'opinions favorable, contre 57 % en mai.
Témoin du mystère qui l'entoure toujours, un an après son arrivée à Washington, les spéculations ont abondé dernièrement sur sa santé comme sur son entente avec son mari, après une absence d'un mois pour un problème de rein supposé "bénin" et sa décision de n'aller ni au sommet du G7 au Canada, ni à Singapour pour le sommet historique avec Kim Jong-un.
Pour Jeanne Zaino, Melania Trump s'affiche plus que jamais comme une Première dame "différente". "Elle est en train d'imposer sa voix, une voix qui n'est pas le simple écho de celle de son mari ou des républicains", estime cette analyste.
"Elle est plus proche des Premières dames des séries télé comme ‘House of Cards’ que des Premières dames traditionnelles américaines... Elle est vraiment fascinante".
Avec AFP