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Sommet Trump - Kim à Singapour : "un sommet pour les livres d’Histoire"

Sommet de Singapour, inauguration de l’ambassade des États-Unis à Jérusalem et critiques contre ses alliés relèvent tous d’une diplomatie des grands gestes chers à Donald Trump, explique Christiane Lemke, spécialiste de la politique américaine.

Tout sourire et sur de son fait. À l’issue du sommet historique de Singapour, le président américain Donald Trump s’est vanté, mardi 12 juin, du succès de sa rencontre avec le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un.

Pourtant, de l’avis général, ce face-à-face a plutôt tourné à l’avantage du maître de Pyongyang qui, sans faire de grandes concessions, a obtenu une reconnaissance inédite de son régime sur la scène internationale.

Mais c’est mal comprendre les motivations qui ont poussé le président américain à accepter de serrer la main à un dirigeant autrefois honni, assure Christiane Lemke, spécialiste de la politique américaine à l’Université Leibniz de Hanovre (Allemagne). Elle explique à France 24 pourquoi le sommet peut être considéré comme une réussite pour Donald Trump.

France 24 : Qu’est-ce que Donald Trump retire de ce sommet, où il a offert une reconnaissance internationale à Kim Jong-un ?

Christiane Lemke : Rien de concret. Du moins si on regarde le document qui a été signé. Sur la question centrale de la dénucléarisation, le sommet débouche sur plus de questions qu’il n’apporte de réponses : qui va superviser le processus ? Quel va être le calendrier ?

Mais pour Donald Trump, c’est un incontestable succès d’estime. Il apparaît comme un président fort qui a réussi là où Barack Obama a échoué. Il continue ainsi à se définir politiquement par rapport à son prédécesseur – ce qui s’impose comme le fil rouge de son mandat –, tout en faisant plaisir à sa base électorale puisque environ 80 % des républicains sont en faveur de négociations avec la Corée du Nord.

La réussite du sommet est donc une bonne opération en vue des élections de mi-mandat de novembre 2018 [renouvellement de la moitié des élus du Congrès, NDLR].

Le sommet de Singapour peut-il se résumer à une démarche électoraliste de Donald Trump ?

C’est sans conteste une dimension de cet événement, mais pas la seule. Ce sommet répond aussi à une volonté de Donald Trump de se construire un personnage digne de figurer dans les livres d’Histoire. Après tout, aucun président américain n’avait organisé de face-à-face avec un dirigeant nord-coréen.

Pour comprendre la démarche de Donald Trump, il faut la remettre dans le contexte de ses autres faits d’armes sur la scène internationale, comme l’ouverture d’une ambassade à Jérusalem ou la manière dont il traite ses alliés traditionnels. Le président américain n’a pas d’expérience diplomatique et à travers une diplomatie des grands gestes, il essaie de se construire une légitimité internationale.

Mais cette approche diplomatique ne comporte-t-elle pas des risques ?

Elle a conduit à des situations tendues, comme après l’imposition des taxes douanières qui ont poussé des alliés de Washington à envisager des mesures commerciales de rétorsion.

On peut être étonné que Donald Trump traite mal ses alliés traditionnels et se montre conciliant avec ses “ennemis”, comme la Corée du Nord. Mais là encore, il y a une logique. Sur le plan international, le président américain fait tour pour rebattre les cartes diplomatiques afin d’apparaître comme l’artisan principal d’un nouveau paysage des relations internationales.