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Attentats du 13-Novembre et "belles histoires" : le pari risqué de Jules et Gédéon Naudet pour Netflix

Avec le documentaire "13 Novembre : Fluctuat Nec Mergitur", disponible sur Netflix le 1er juin, les réalisateurs Jules et Gédéon Naudet entendent raconter "des belles histoires" nées de l’horreur. Reste à voir si le public est prêt pour cela.

Le 11 septembre 2001, alors qu’ils suivaient une équipe de pompiers de New York pour un documentaire, les frères Jules et Gédéon Naudet avaient filmé de l’intérieur les attentats du World Trade Center. Et au milieu du chaos, ils avaient tout de suite perçu de l’espoir.

"Au moment où on était témoins du pire de l’humanité, on a surtout vu le meilleur de l’être humain", se souviennent les réalisateurs français, que Mashable FR a rencontrés en avril dernier. "On a voulu retrouver la même chose après ce qu’il s’est passé à Paris le 13 novembre 2015 et montrer ces histoires de courage, de bravoure et d’amour."

40 récits du 13-Novembre

Pendant "six à huit mois", Jules et Gédéon Naudet ont travaillé à instaurer une relation de confiance avec des dizaines de victimes et témoins des attentats du 13-Novembre – du Stade de France, des terrasses ou du Bataclan. En résultent 40 récits de Parisiens, d’amateurs de musique, d’amoureux, de pompiers, de membres de la BRI ou même du Président de la République de l’époque, François Hollande. Face caméra, tous racontent comment ils ont vécu cette soirée-là. "Sous les uniformes, sous le titre officiel, il y a des êtres humains. Et on voulait justement exposer comment l’être humain réagit dans ce genre de moment", explique Jules Naudet.

"En fait, ce sont des histoires d’humanité dans l’horreur"

Si la formule peut surprendre, le réalisateur de 45 ans n’hésite pas à qualifier ces témoignages de "belles histoires". Et de développer : "En fait, ce sont des histoires d’humanité dans l’horreur. Ces gens n’ont aucun message de haine, de vengeance, de colère. Comme s’ils avaient vécu tellement d’horreur ce soir-là, qu’ils ne peuvent en ressortir qu’avec un message d’espoir sur la vie."

Sommes-nous prêts pour revivre ça ?

Les trois épisodes du documentaire intitulé "13 Novembre : Fluctuat Nec Mergitur", notamment coproduit par la journaliste Marie Drucker, seront disponibles pour les 125 millions d’abonnés Netflix à travers le monde à partir du vendredi 1er juin. Et si on ne peut que louer le choix de minimiser les images amateur pour ne pas tomber dans le sensationnalisme, ce projet pose forcément cette question : sommes-nous prêts pour voir ça ? Rien qu'au sein de notre petite rédaction, la réponse n'est pas évidente.

Les réalisateurs sont forcément convaincus du bien-fondé de leur démarche. En plus de laisser davantage de "place à la parole des victimes", ils espèrent que ces mots inspireront tous les spectateurs. "Depuis le 11-Septembre, j’ai besoin d’entendre ces témoignages de force. Ça me reconstruit, ça me nourrit", soutient Gédéon Naudet.

"Raviver les blessures et la souffrance"

Pourtant lorsque nous avions interrogé Juliette Palacin, psychologue clinicienne à l’Institut national d’aide aux victimes et de médiation (INAVEM) au moment de la sortie du film "Traque à Boston" en mars 2017, qui retraçait l’attentat du marathon de Boston, elle affirmait que ces œuvres pouvaient non seulement "raviver les blessures" des victimes directes d’attentats, mais aussi entraîner "de la souffrance" auprès de tous les spectateurs de par le fort sentiment d’identification déclenché par un film ou un documentaire.

Reste que, plutôt que de subir des images ou des témoignages d’une traite et de plein fouet sur un immense écran de cinéma, la diffusion de "13 Novembre : Fluctuat Nec Mergitur" sur Netflix permettra à tout un chacun de garder le contrôle sur ses émotions, en arrêtant et reprenant la lecture autant de fois que nécessaire.

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