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Corée du Nord : Kim Yo-jong, de l'ombre de son frère, Kim Jong-un, à la lumière des JO

Kim Yo-jong est la première représente de la dynastie nord-coréenne des Kim à se rendre sur le territoire sud-coréen depuis 1953. La sœur du leader nord-coréen est l'une des figures les plus influentes du régime.

Front haut, regard sûr, vêtue d’un manteau noir et entourée d’une cohorte de gardes du corps portant tous la même cravate bleu roi. L’image de cette arrivée de Kim Yo-jong à Séoul, (Corée du Sud) pour la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques d’hiver vendredi 9 février, restera dans les annales diplomatiques. La sœur du dirigeant nord-coréen Kim Jong-un est la première représentante de la dynastie des Kim à fouler le sol sud-coréen pour un voyage officiel depuis la guerre de Corée (1950-1953).

Les services de renseignement de tous les pays doivent être en ébullition. Une occasion en or pour en apprendre plus sur la mystérieuse sœur, présentée comme un rouage important sinon essentiel du régime. Car sa biographie est pour le moins lacunaire et truffée de rumeurs.

"Princesse" Kim

Compliqué, pour commencer, de connaître son âge. Les États-Unis lui donnent 29 ans, tandis que les services sud-coréens de renseignement assurent qu’elle est née en 1987 et aurait donc 30 ou 31 ans.

Dans sa jeunesse, elle était connue sous le nom de Pak Mi-hyang… du moins en Suisse, où elle a fait une partie de sa scolarité à l’école de Liebefeld-Steinhölzi en compagnie de son frère Kim Jong-un (qui répondait à l’époque au nom de Pak-un). Elle retourne en Corée du Nord en 2000 (ou 2001), puis ne fait plus parler d’elle jusqu’à la mort de son père Kim Jong-il fin 2011.

Elle fait partie des officiels qui apparaissent alors sur les photos de l’enterrement. Selon les experts du pays, un lien particulier unissait Kim Jong-il à la fille qu’il a eue avec la danseuse née au Japon Ko Yong-hui (également mère de Kim Jong-un). Konstantin Pulikovsky, représentant spécial de la Russie pour l’Extrême-Orient, a raconté en 2012 que Kim Jong-il répétait fièrement que Kim Jong-un et Kim Yo-jong montraient tous les deux le même intérêt et les mêmes dispositions pour la politique. Feu le leader nord-coréen avait aussi l’habitude d’appeler sa fille "la douce-douce Yo-jong" et "princesse Yo-jong", d’après un cuisinier japonais pour la dynastie des Kim.

Avec l’accession au pouvoir de son frère, elle devient une figure beaucoup plus visible du régime nord-coréen. En 2014, elle est propulsée directrice adjointe du département de la Propagande et de l’Agitation. À ce poste stratégique, Kim Yo-jong doit à la fois conseiller son frère mais aussi s’assurer que tous ses déplacements publics se déroulent sans heurts. Elle apparaît alors de plus en plus souvent sur les photos officielles, en retrait de Kim Jong-un, comme une sorte de maîtresse de cérémonie des apparitions du dirigeant.

Mariée ?

L’influence grandissante au sein du régime de la "première sœur" du pays a nourri les spéculations sur son avenir politique. Lorsqu’à l’automne 2014, Kim Jong-un disparaît quelque temps des radars, certains s’imaginent que Kim Yo-jong pourrait assurer l'intérim à la tête de la Corée du Nord. Mais c’était oublier l’importance des règles de succession non-écrites, inspirées du confucianisme, qui interdisent aux femmes de prétendre au trône.

Kim Yo-jong n’est, cependant, jamais très loin du pouvoir puisqu’elle a été nommée en 2017 au sein du très fermé politburo, qui constitue la garde rapprochée de Kim Jong-un.

En dehors de son activité politique, on ne sait rien de sa vie privée. Les rumeurs les plus persistantes la présentent comme mariée au fils de Choe Ryong-hae, le très influent secrétaire général du Parti du travail de Corée. Fils dont on ne connaît pas le nom mais qui, d’après les services sud-coréens de renseignement, est membre de la Division-39, une branche secrète du gouvernement chargée de trouver des fonds pour le régime et qui servirait aussi à alimenter la caisse noire personnelle de Kim Jong-un.

Kim Jong-un a donc envoyé pour le représenter l’une de ses plus fidèles conseillères à Séoul, signe qu’il prend cette cérémonie et l’olympiade au sérieux. Kim Yo-jong doit déjeuner avec le président sud-coréen Moon Jae-in samedi et pourrait croiser le vice-président américain Mike Pence dans les couloirs olympiques. Une situation qui pourrait se révéler gênante : Kim Yo-jong figure en effet sur la liste noire américaine pour des "violations des droits de l’Homme" et aucun ressortissant américain ne peut légalement avoir affaire à elle. Quitte à rater une occasion de renouer le dialogue.