À l'occasion du premier anniversaire de l'attentat de Berlin, Angela Merkel a exprimé ses regrets pour les défaillances de l'État, qui n’a pas été capable d’empêcher l'attaque. En cause : l'incapacité des services à communiquer entre eux.
"Aujourd'hui doit être non seulement un jour de deuil, mais aussi le jour de [notre] volonté de faire mieux." À l'occasion du premier anniversaire de l'attentat du marché de Noël de Berlin, la chancelière allemande, Angela Merkel, a exprimé des regrets, mardi 18 décembre. Tout d’abord pour les défaillances de l'État, qui n’a pas été capable d’empêcher l'attaque. Ensuite, pour le manque de soutien apporté aux familles des victimes.
Début décembre, une partie des proches des 12 morts et de la centaine de blessés a publié une lettre ouverte très offensive dans laquelle elle reprochait à la dirigeante allemande de ne les avoir jamais contactés. "Une erreur corrigée seulement hier [lundi] par Angel Merkel qui les a rencontrés, rapporte Aude Mailliet, correspondante de France 24 à Berlin. Plus tôt, le président Frank-Walter Steinmeier avait reconnu lui aussi que le soutien aux victimes avait été "insuffisant" et admis des erreurs des services de sécurité avant l'attaque. Malgré ces rattrapages, "aujourd’hui, la colère s’est mêlée au deuil", observe notre correspondante.
Taxi non remboursé pour les survivants
L’attaque au camion bélier perpétrée le 19 décembre 2016 sur le marché de Noël de Berlin est l'attentat le plus sanglant jamais commis sur le sol allemand. Aucun hommage national n'a pourtant été organisé. Un rapport officiel très critique commandé par le gouvernement a aussi dénoncé la faiblesse des indemnisations ainsi que des maladresses administratives choquantes, comme l'envoi aux familles d'injonctions de paiement pour les autopsies des défunts.
Dernier exemple du genre, rapporté par le quotidien Bild mardi, la mairie de Berlin a signifié dans son invitation pour les commémorations adressées aux proches et aux blessés que "le coût d'un taxi ne sera pas remboursé ! Les transports en commun doivent être utilisés".
De quoi nourrir la rancœur des intéressés, qui ont appris aussi ces derniers mois de diverses commissions d'enquêtes que l’auteur de l’attentat, le Tunisien Anis Amri, aurait pu être arrêté avant son passage à l'acte.
"Il est difficile de nier qu’il y a eu effectivement des négligences, estime sur France 24 Yan Saint-Pierre, consultant sur les questions de terrorisme. Que ce soient les services de sécurité extérieure, les services de sécurité intérieure, la police de Berlin ou la police nationale, ils ont tous été impliquées dans un certain degré de défaillances, même dans certains cas d’incompétences. Depuis un an, il existe constamment des tentatives de couvrir les erreurs et de faire porter la responsabilité à un autre service."
"Manque de communication et mauvaise évaluation"
Arrivé en Allemagne en 2015 après une peine de prison en Italie, Anis Amri avait profité du chaos administratif provoqué par l'afflux de centaines de milliers de migrants cette année-là pour déposer moult demandes d'asile et obtenir autant de titres de séjour provisoires sous diverses identités. Bien que catalogué comme islamiste dangereux et trafiquant de drogue, Anis Amri était resté en liberté car, pour les services de sécurité, il pouvait fournir des renseignements.
Mais, en mars 2016, alors que le parquet fédéral avait été mis au courant qu’il préparait un casse dans le but de se constituer un butin lui permettant d’acheter des armes en vue de commettre un attentat, le jeune Tunisien n’a jamais été inquiété. Comment l’expliquer ? "C’est la fameuse technique du petit poisson qui peut rapporter gros. Malheureusement, aujourd’hui, un petit poisson peut-être très dangereux, explique Yan Saint-Pierre. Dans l’ensemble, il y a eu un manque de communication et une mauvaise évaluation du danger jumelés à une compétition interne entre les services. Mais, encore une fois, cela démontre que les critères d’évaluation du risque doivent être changés."
Après l’attentat de Berlin, les autorités allemandes ont entamé une campagne pour engager danvantage de personnel et accroître l’investissement matériel dans le contre-terrorisme. "Il y a eu certes des changements mais cela prend du temps de se familiariser avec les nouveaux systèmes, analyse l'expert. Et, surtout, la grande question reste la capacité de communication des agences entre elles, que ce soit au niveau des Länder ou au niveau fédéral." Selon Berlin, l’action des pouvoirs publics a déjà porté ses fruits puisque trois attentats auraient été récemment déjoués sur le territoire allemand.
Avec AFP