
Le nombre de Rohingya réfugiés au Bangladesh depuis fin août pour échapper aux violences en Birmanie a franchi la barre du demi-million, a annoncé l'ONU, jeudi. Le flux des passages tend toutefois à faiblir depuis plusieurs jours.
L'exode des Rohingya de Birmanie a franchi, jeudi 28 septembre, le cap symbolique du demi-million de réfugiés arrivés au Bangladesh depuis fin août. Cette crise humanitaire est suivie de près par l'ONU, qui n'a pas pu se rendre dans la région, comme prévu.
Des représentants des Nations unies devaient, pour la première fois depuis le début de la nouvelle flambée de violences, avoir accès au théâtre du conflit dans l'État birman du Rakhine (ouest) mais le gouvernement birman a reporté cette visite très encadrée à la dernière minute, officiellement à cause du mauvais temps.

Le Conseil de sécurité de l'ONU doit se réunir dans la journée à New York pour évoquer à nouveau le conflit en Birmanie, qui provoque l'un des plus importants déplacements de population de ce début de XXIe siècle en Asie.
L'exode des Rohingya a pris de court le Bangladesh, nation pauvre d'Asie du Sud à majorité musulmane. Dans les gigantesques camps à la frontière, autorités et ONG sont débordées par la marée humaine et s'inquiètent des risques sanitaires : les conditions sont réunies pour l'apparition d'épidémies de choléra, dysenterie ou diarrhées.
À quelques heures de la réunion du Conseil de l'ONU, le Bangladesh a été le témoin d'une nouvelle tragédie migratoire. Partie mercredi soir d'un village côtier du Rakhine, une embarcation de Rohingya a coulé à quelques encablures de la terre ferme. Les eaux du golfe du Bengale ont charrié 14 corps, principalement des femmes et des enfants. Ce bilan humain était appelé à s'alourdir.
Guerre d'informations
Minorité musulmane de l'ouest de la Birmanie, les Rohingya fuient une campagne de répression de l'armée consécutive à des attaques de la jeune rébellion rohingya le 25 août 2017. L'ONU considère que l'armée birmane et les milices bouddhistes se livrent à une épuration ethnique contre cette communauté au Rakhine, région historiquement troublée.
À Shah Porir Dwip, l’un des principaux points d’entrée des Rohingya au Bagladesh, la frontière est fermée depuis cinq jours. "Mais, la nuit, des réfugiés essaient de braver l’interdiction de passer", rapporte Cyril Payen, envoyé spécial de France 24.
Au Rakhine, côté birman, des dizaines de villages ont été réduits en cendre et des milliers de Rohingya seraient déplacés ou cachés dans les forêts, survivant avec peu de nourriture et sans aide médicale. "Des récits font état de villages et de maisons brûlés. Ils sont encore des dizaines de milliers à vouloir passer la frontière", selon Cyril Payen.
Sous le feu des critiques, la Birmanie dénonce un parti pris pro-Rohingya de la communauté internationale et met largement en avant les près de 30 000 bouddhistes et hindous également déplacés par les combats depuis fin août.
Vilipendée, sa dirigeante Aung San Suu Kyi doit préserver un fragile équilibre avec la très puissante armée, à l'œuvre dans ce conflit. Dans un discours la semaine dernière, la prix Nobel de la paix s'est dite ouverte à un retour de réfugiés mais selon des critères qui restaient ambigus. Les Rohingya, plus grande population apatride au monde, sont traités comme des étrangers en Birmanie, un pays à plus de 90 % bouddhiste.