François Bayrou a présenté, mercredi, en Conseil des ministres, sa loi de moralisation de la vie publique. Un projet de loi phare du quinquennat terni par les soupçons d'emplois fictifs qui éclaboussent trois membres du gouvernement.
La loi de moralisation de la vie publique devait être la vitrine d’un gouvernement exemplaire. Le ministre de la Justice, François Bayrou, a présenté, mercredi 14 juin, en Conseil des ministres, ce premier grand chantier législatif du quinquennat. Mais les récentes accusations d’emplois fictifs qui pèsent sur trois membres du gouvernement dont le garde des Sceaux, garant de cette proposition, font désordre.
Un calendrier gênant
À l’origine, le projet de loi doit permettre d’en finir avec des décennies de pratiques politiques douteuses qui ont nourri le sentiment du "tous pourris" et la montée du populisme. Seul problème, François Bayrou, porteur du projet qui se veut le héraut de la morale et de la transparence en politique, est aussi mis à l'épreuve sur le front judiciaire. Des dénonciations anonymes ont conduit le parquet de Paris à ouvrir une enquête préliminaire sur les emplois présumés fictifs du MoDem, parti fondé par l’actuel garde des Sceaux.
Le Canard enchaîné a en outre publié mercredi 14 juin, – le même jour que la présentation du projet – , de nouvelles informations compromettantes pour la formation centriste, concernant notamment la secrétaire particulière de François Bayrou qui aurait été également embauchée durant deux ans en tant que collaboratrice d'une eurodéputée MoDem.
Loin de faire profil bas, François Bayrou s’est attiré les foudres des journalistes avec un appel passé à Radio France pour se plaindre de questions trop pressantes à son goût posées à des collaborateurs du MoDem au sujet de ces révélations. À cet égard, l’affaire a valu à François Bayrou un recadrage du chef du gouvernement, Édouard Philippe. "Quand on est ministre, on ne peut plus réagir comme quand on est un simple citoyen", avait-il déclaré mardi sur Franceinfo.
Une mise au point qui n'a vraisemblablement pas été entendue par l'intéressé. "'Il faut de la liberté de parole. Je ne sais pas vivre sans. Quand on pense qu'il y a quleque chose d'important à dire, il faut le dire", a fait savoir en retour l'apôtre de la moralisation de la vie publique, sur RTL.
J'ajoute qu'il faut de la liberté de parole. Je ne sais pas vivre sans. Quand on pense qu'il y a qqch d'important à dire, il faut le dire.
— François Bayrou (@bayrou) 14 juin 2017"La situation peut s’avérer délicate"
Dès lors, on peut s’interroger sur la crédibilité du garde des Sceaux pour mener un tel projet. Pour René Dosière, député apparenté PS de l’Aisne, "il n’y a aucune raison pour que François Bayrou perde la crédibilité qu'il a acquise au cours de sa carrière politique", explique-t-il à France 24, avant de nuancer son propos : "si en tant que responsable d’un parti politique, il est soumis à une enquête préliminaire que les services du garde des Sceaux diligentent, la situation peut s’avérer délicate. Dans ce cas, il faudra clarifier la situation pour qu’on ne puisse pas penser que le garde des Sceaux va influer sur une enquête du parquet."
Aux tourments de Bayrou, s’ajoutent les affaires de Richard Ferrand et Marielle de Sarnez. Le premier, ministre de la Cohésion des territoires, est impliqué dans une affaire immobilière pour laquelle une enquête préliminaire a été ouverte. Il est également accusé d’être à l’origine d'un montage dont aurait bénéficié sa compagne. La seconde, ministre chargée des Affaires européennes, fait quant à elle l’objet d’une enquête préliminaire qui porte sur des soupçons d’emploi fictif concernant l'une de ses collaboratrices parlementaires.
J'ajoute qu'il faut de la liberté de parole. Je ne sais pas vivre sans. Quand on pense qu'il y a qqch d'important à dire, il faut le dire.
— François Bayrou (@bayrou) 14 juin 2017Ce premier projet de loi, qui devait donner une impulsion positive au gouvernement, est donc sérieusement mis à l’épreuve de la justice. "L’essentiel, c’est le contenu de la loi, tient à préciser, philosophe, René Dosière, qui a fait de la transparence de la vie politique son cheval de bataille. Si cela met un terme à des procédures anciennes, tant mieux !"