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On a rencontré Liz Parrish, la première femme génétiquement modifiée

Et vous, que feriez-vous si l'on vous donnait demain la possibilité de ralentir votre vieillissement ? Liz Parrish ne s'est pas attardée sur la question. Pour prouver que son entreprise BioViva en est capable, l'Américaine de 46 ans a sauté le pas.

C'est une personne très atypique. À la fois férocement convaincue par l'efficacité de son traitement et un peu hagarde, comme perdue au milieu des critiques auxquelles elle fait face. Liz Parrish ne fait pas l'unanimité et elle le sait.

Au sein de la communauté scientifique, il se dit que son projet de lutter contre la dégradation des cellules manque par endroits de rigueur. Ailleurs dans la société civile, c'est son envie de ralentir le vieillissement de l'homme qui est questionnée. Prolonger la vie humaine, est-ce éthique ?

"Si vous pouviez faire une chose qui pourrait sauver des millions de vies, peut-être même des milliards, le feriez-vous ? Moi, je le ferais", lance l'entrepreneuse à chaque interview. Pour cette Américaine de 46 ans, il est évident que si des hommes sont capables de repousser l'âge de la mort, alors il leur appartient de le faire puis de démocratiser ce traitement. "Vieillir est une maladie", a estimé Liz Parrish sur la scène de l'Échappée volée, un événément lancé par le créateur de TEDxParis pour discuter de l'innovation mise au service de la société.

Liz Parrish a subi deux thérapies géniques expérimentales imaginées par sa propre entreprise en septembre 2015 : la première a été pensée pour contrer la perte de masse musculaire liée à l'âge et la seconde pour lutter contre l’appauvrissement des cellules souches responsables des maladies et des infirmités liées à l’âge.

Selon l'entreprise BioViva dont elle est la CEO, il est possible de régénérer nos télomères, soient les extrémités de nos brins d'ADN, qui s'érodent à mesure que nous avançons dans la vie. "Des études chez l'animal montrent que la thérapie génique de la télomérase prolonge la durée de vie", promet Liz Parrish. De là à être certain que l'effet est le même chez l'homme, il y a encore un gouffre. Aux États-Unis, la Food and Drug Administration (FDA), organisme en charge des denrées alimentaires et des médicaments, a refusé de donner son accord à BioViva pour soumettre le traitement appliqué aux souris à des patients humains. Alors pour contourner cette interdiction, Liz Parrish s'est rendue en Colombie en 2015 afin de se faire ses injections.

Une escroquerie médicale ou un transhumanisme en marche ?

Les premiers résultats annoncés se veulent prometteurs : les télomères de l'Américaine auraient repoussé de 9 %, ce qui équivaut à un rajeunissement de vingt ans. "L'imagerie IRM de mon corps entier a également révélé une augmentation de ma masse musculaire et une rédiction de ma graisse intramusculaire", se réjouit celle qui a l'impression d'avoir gagné en vigueur alors qu'elle avoue avoir peu de temps pour faire du sport en ce moment. Bien sûr, ce bilan est à prendre avec beaucoup de pincettes : d'une part, il intervient après seulement deux ans d'observation, ce qui est encore peu, d'autre part, il émane de l'entreprise elle-même, qui a tout intérêt à communiquer sur son succès.

Un article du MIT Technology Review fait mention de George Church, un expert en génomique à Harvard, qui regrette que l'expérimentation ait fait l'économie de se faire sous la supervision d'organisme de régulation. Car même si le test de la patiente zéro Liz Parrish est confirmé par quelques organisme tiers, tels que le laboratoire d'essais cliniques SpectraCell qui estime que les télomères sont effectivement "plus longs" ou encore l'organisme luttant contre les maladies liées au vieillissement Biogerontology Research Foundation qui confirme le rajeunissement de ses globules blancs, il est difficile de faire avancer la discussion collective tant que les résultats ne pourront être vérifiés par d'autres chercheurs et publiés dans les revues scientifiques.

"Il y a de fortes chances pour que l'on se souvienne de cette expérimentation comme l'une des pires escroqueries médicales ou, éventuellement, comme le début improbable d'une ère où les êtres humains se font administrer des thérapies géniques non pas pour soigner des maladies, mais pour rajeunir", alerte le MIT Technology Review.

Sachant que l'objectif de BioViva est de commercialiser massivement son traitement d'ici 2020, il est évident que ce planning laisse peu de temps pour en débattre ne serait-ce que d'un point de vue éthique.

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