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Avec Bruno Le Maire, Bercy vire à droite

Le candidat malheureux à la primaire de la droite Bruno Le Maire a été nommé ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie du gouvernement d'Édouard Philippe.

François Fillon lui avait fait miroiter le Quai d'Orsay, Emmanuel Macron lui a confié Bercy. Le député du parti Les Républicains (LR) Bruno Le Maire devient ce mercredi 17 mai le ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie. Le nouveau président a mis cet ex-chiraquien, ex-villepiniste, ex-filloniste à la tête de l'un des ministères les plus sensibles en cette période de molle reprise économique.

À 48 ans, Bruno Le Maire à un CV bien rempli et de l'ambition à revendre. Député de l'Eure, il avait tenté de rafler l'UMP à Nicolas Sarkozy en 2014, puis a essayé de devenir le champion de la droite pour l'élection présidentielle de 2017 en se présentant comme "l'homme du renouveau" qui voulait "torpiller les technocrates", auxquels il admet pourtant volontiers appartenir. Il a voulu jouer la partition du candidat de la rupture avec le système politique qui a si bien réussi à Emmanuel Macron. Mais Bruno Le Maire n'a pas convaincu l'électorat de droite, qui ne l'a crédité que d'un peu plus de 2 % des suffrages.

"Énarque défroqué"

Bruno Le Maire a toujours souffert de son apparence de gendre idéal élevé à Neuilly-sur-Seine et de son profil de premier de toutes les classes. Difficile de prêter à quelqu'un qui a fait Science Po Paris, l'ENA, Normale Sup et a fini premier de l'agrégation de lettres modernes, l'ambition de casser le système dans lequel il a excellé et baigné. Ses efforts pour casser son image lui ont valu le qualificatif d'"énarque défroqué".

Son entrée au gouvernement Philippe n'est pas une surprise. Il avait l'un des premiers ténors à droite à prôner la collaboration avec Emmanuel Macron. Mais son arrivée à Bercy peut surprendre. Son profil le destinait davantage au Quai d'Orsay. Il a, en effet, fait ses classes politiques dans l'ombre de Dominique de Villepin, à l'époque où ce dernier était ministre des Affaires étrangères de Jacques Chirac. C'est là que Bruno Le Maire se fait remarquer comme un conseiller brillant, féru de littérature et de musique classique. Il est directeur de cabinet de Dominique de Villepin et "un rouage essentiel de l’opposition de la France à la guerre en Irak", souligne Le Monde.

Privatiser Pôle Emploi

Mais Emmanuel Macron a préféré remettre les clefs du Quai d'Orsay à Jean-Yves Le Drian, un poids lourd de la gauche. Le choix du ministère de l'Économie pour Bruno Le Maire n'est pas anodin politiquement : c'est un signal fort pour la droite libérale. Le nouveau maître de Bercy, virulent opposant à "la société de l'assistanat", a proposé de limiter les aides sociales et voudrait privatiser Pôle Emploi.

Le virage à droite de Bercy pourrait, cependant, ne pas être trop brutal. L'autre homme du ministère, Gérald Darmanin, qui s'est vu confier le Budget et la Fonction publique, est connu pour être un "gaulliste social". À 34 ans, le maire LR de Tourcoing avait même quitté l'équipe de campagne de François Fillon, aux positions économiques trop libérales pour lui. La bataille entre les deux têtes de Bercy, pourtant du même bord, risque d'être vive.