
Le négociateur en chef de l'UE pour le Brexit, Michel Barnier, a averti, mercredi, que les discussions avec Londres ne seraient pas "sans douleur", sachant que Bruxelles pourrait réclamer 100 milliards d'euros au Royaume-Uni avant son départ.
Cent milliards d'euros... environ. C'est la somme que l'Union européenne (UE) s'apprêterait à exiger de Londres pour régler la facture du Brexit, d'après les calculs du quotidien britannique Financial Times, publiés mercredi 3 mai. Le journal financier estime que Bruxelles peut demander entre 91 milliards et 113 milliards d'euros dans le cadre financier pluriannuel adopté en 2013, et qui court pour la période 2014-2020.
David Davis, le secrétaire britannique au Brexit, s'est empressé d'assurer que son pays "n'allait pas payer 100 milliards d'euros" ajoutant qu'il n'avait jamais vu circuler, dans les sphères officielles, une addition aussi salée. Michel Barnier, le négociateur en chef de l'Union européenne pour le Brexit, a, de son côté, affirmé n'être pas en mesure de donner de chiffre précis. Il a néanmoins reconnu que les négociations ne seraient "ni rapides ni sans douleurs" car Bruxelles compte bien récupérer son dû. En effet, des sommes ont été "engagées" et des "problèmes" seraient inévitables si les "programmes devaient être amputés ou suspendus" avant la sortie officielle de l'UE du Royaume-Uni, soit le 29 mars 2019 .
De 60 milliards à 100 milliards d'euros
Cette agitation autour d'une estimation, qui ne provient pourtant d'aucun document officiel, souligne à quel point la question de l'addition présentée à Londres est sensible. Les affirmations du Financial Times ont même éclipsé les détails de la feuille de route européenne pour les négociations à venir, présentée mercredi.
Si les autorités britanniques se sont étranglées en prenant connaissance des calculs du Financial Times s'est, en partie, car cette estimation est bien supérieure à la précédente. Londres s'était préparé à recevoir une facture d'environ 60 milliards d'euros, sur la foi de comptes-rendus dans la presse faisant état de discussions "privées" entre le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker et d'autres dirigeants européens.
Cette nouvelle estimation reflète aussi le climat de plus en plus tendu entre le Royaume-Uni et ses partenaires européens. Certains d'entre eux – comme l'Allemagne et la France – auraient ainsi décidé de revoir à la hausse leurs exigences financières vis-à-vis du Royaume-Uni.
Obsession de l'addition
Selon le Financial Times, Paris souhaite que Londres participe davantage pour soutenir l'agriculture européenne avant de claquer la porte. La politique agricole commune a toujours été une pomme de discorde entre les deux pays, la France jugeant que son voisin outre-Manche ne participait pas suffisamment à l'effort de solidarité agricole.
L'Allemagne, quant à elle, est contre le fait que Londres conserve des participations dans plusieurs biens, notamment immobiliers, qui appartiennent à l'Union européenne. Un manque à gagner pour le Royaume-Uni qui pourrait s'élever à dix milliards d'euros, d'après le Financial Times.
Cette obsession de l'addition agace aussi les négociateurs britanniques qui aimeraient prendre le problème à l'envers. Derrière le chiffre, il y a une bataille sur la feuille de route des négociations. La Première ministre britannique, Theresa May, voudrait avant tout discuter des futurs contours des relations commerciales et diplomatiques avec l'Europe. À l'inverse, Bruxelles insiste sur la nécessité d'évacuer le volet financier en premier. Les bons comptes feraient les bonnes négociations.