
Le créateur du World Wide Web, Tim Berners-Lee, vient de recevoir le prix Alan Turing qui récompense des inventeurs essentiels du monde des sciences informatiques.
Justice est faite : Tim Berners-Lee a reçu le prix Alan Turing de l'Association for Computing Machinery (ACM). Officieusement, cette distinction est considérée comme un véritable Nobel d'informatique.
Tim Berners-Lee est l'inventeur du World Wide Web. Il semble donc logique qu'il soit couronné par un prix portant le nom du père de l'informatique, Alan Turing. Il recevra sa récompense lors d'une cérémonie à San Francisco le 24 juin prochain, accompagné d'une enveloppe d'un million de dollars mis à disposition par Google.
Déjà anobli par la reine d'Angleterre en 2004, c'est une deuxième consécration pour lui. "C'est incroyable de regarder tous les géants de ce domaine, tous les anciens chercheurs en sciences informatiques", a-t-il confié au Guardian. "Et c'est un grand honneur d'être ajouté à la fin de cette liste."
Informaticien un jour, informaticien toujours
En 1990, le premier serveur Web et la première page Web sont mis en ligne sous l'impulsion de Tim Berners-Lee, donnant ainsi naissance au World Wide Web au sein du CERN (Organisation européenne pour la recherche nucléaire). La plus ancienne page conservée remonte au 13 novembre de cette année-là.
Se doutait-il de la révolution que cette simple page provoquerait ? Probablement pas, mais ce qui est sûr, c'est qu'il imaginait sa création comme un lieu de totale liberté. "L'idée était qu'il s'agissait d'un lieu universel, qui ne devait pas avoir de limites, de barrières", raconte-t-il au Guardian. "On devait pouvoir tout y mettre, des notes gribouillées au chef-d'œuvre final. On devrait pouvoir tout mettre sur le Web."
À 61 ans, Tim Berners-Lee est loin d'avoir abandonné son invention. Il est toujours président du World Wide Web Consortium (W3C) qu'il a fondé en 1994 et s'intéresse plus que jamais aux évolutions de sa création.
Défendre les valeurs du Web
L'actualité, d'ailleurs, l'inquiète beaucoup. Protection de la vie privée, neutralité du Net, liberté d'accès à l'information sont autant de valeurs qu'il défend et qu'il voit menacées aujourd'hui. "La vie privée n'est pas une notion partisane", confie-t-il au Guardian. "Je suis choqué que le Parti républicain ait réussi à suggérer qu'il faille s'en débarrasser." Le 12 mars 2017, à l'occasion du 28e anniversaire du Web, Tim Berners-Lee publiait une tribune. Il y pointait du doigt trois problèmes qui l'inquiètent beaucoup.
"La vie privée n'est pas une notion partisane"
D'abord, la perte du contrôle de nos données personnelles. Pour Tim Berners-Lee, l'idée de départ n'est pas fondamentalement stupide à nos yeux – échanger quelques données contre un service gratuit – mais les entreprises ne laissent aucun contrôle aux internautes sur la gestion de ces données, et de qui les récupère. Il mentionne aussi les fake news : "En exploitant cette science des données [des réseaux sociaux et moteurs de recherche], des personnes mal intentionnées peuvent truquer ce système pour répandre la désinformation et obtenir des profits financiers ou politiques."
Enfin, il alerte sur la publicité politique, devenue bien trop répandue et insidieuse. Et conclut : "Pour construire le Web, il a fallu notre participation à tous, et c’est à nous tous, désormais, de construire le Web que nous voulons – pour tous." Au travail.
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