
Thomas Gallay, condamné à six ans de prison au Maroc pour terrorisme, est jugé en appel depuis novembre 2016. Pour ses soutiens et son avocat, qui doit plaider mercredi, ses droits sont bafoués.
"Il y a des problèmes de procédures et des problèmes de fond." Juste avant les plaidoiries de la défense, prévues mercredi 22 février à Rabat, au Maroc, l’avocat Frank Berton, joint par France 24, dénonçait les droits bafoués de son client, le Français Thomas Gallay, jugé en appel après sa condamnation à six ans de prison pour son appartenance à une cellule terroriste.
"Le tribunal prend une à deux heures tous les quinze jours. Les réquisitions du procureur ont eu lieu il y a un mois, je veux bien que la Cour ait de la mémoire mais quand même !", a déploré Me Frank Berton. "Je ne suis même pas sûr que je pourrais plaider en français, alors que j’ai l’autorisation du ministre de la justice au Maroc."
De reports en annulations d’audiences, le procès en appel de Thomas Gallay dure depuis novembre 2016. "C’est un procès de plus en plus sensible. On ne sait plus comment sortir de ce dossier", s'inquiète l'avocat de Thomas Gallay.
"Le droit à un procès équitable"
Taubira : "Thomas Gallay a droit à un procès équitable" https://t.co/XHfcc8rqwp pic.twitter.com/C6LwAoJJfm
— L'Obs (@lobs) 1 février 2017Tout remonte à février 2016 : Thomas Gallay, ingénieur français de 37 ans, qui vit alors à Essaouira depuis deux ans, est arrêté dans le cadre du démantèlement d’une "dangereuse cellule terroriste, qui se préparait à commettre plusieurs attentats-suicides dans plusieurs villes du pays", selon le ministère de l’intérieur marocain. Cinq mois plus tard, le Français, seul étranger parmi les neuf accusés, est condamné à six ans de prison ferme pour "soutien financier à des personnes en vue de la commission d’actes de terrorisme".
Mais les conditions de cette condamnation sont rapidement dénoncées par ses proches et son avocat. En cause, notamment, deux procès-verbaux rédigés en arabe et que le Français, non arabophone, a signé sans comprendre : on peut y lire que Thomas Gallay a prêté allégeance au groupe État islamique et qu’il a des projets terroristes. "Des aveux fabriqués de toutes pièces", dénoncent ses soutiens, qui ont lancé une pétition en ligne. "Il n’a pas eu de traducteur, pas d’interprète, il a tout découvert chez le juge d’instruction", résume Frank Berton.
L’accusation de "soutien financier" à un terroriste présumé ? Elle repose sur les 700 dirhams (70 euros environ) que le Français a donnés – en trois fois – à une vague connaissance afin de l'aider à trouver un appartement.
L’ONG Human Rights Watch voit dans les déboires du Français une affaire "emblématique de la tendance des tribunaux marocains à se fonder sur des procès-verbaux de police pour démontrer la culpabilité des accusés. Souvent, les tribunaux ignorent ou balaient d’un revers de la main les argumentaires tendant à montrer que la police judiciaire a utilisé des méthodes douteuses pour obtenir les aveux et déformer leur teneur", poursuit l’ONG.
Début février, c’est l’ancienne garde des sceaux, Christiane Taubira, qui estimait, dans une interview à L’Obs, que Thomas Gallay avait "le droit à un procès équitable". Pour le HWR, "tous les regards sont désormais tournés vers la Cour d’appel de Rabat".