
Les sept candidats à la primaire de la gauche ont tenu jeudi soir leur premier débat. En dehors de quelques échanges de fond sur le revenu universel ou la Loi travail, la soirée a plutôt suscité l'ennui.
La gauche espérait, avec son premier débat télévisé, jeudi 12 janvier, susciter de l'intérêt pour sa primaire. Elle a plutôt suscité l'ennui. Interrogés tour à tour durant 2 h 30, Jean-Luc Bennahmias, Benoît Hamon, Arnaud Montebourg, Vincent Peillon, Sylvia Pinel, François de Rugy et Manuel Valls ont chacun exposé leurs propositions sur des thèmes aussi variés que l'économie, le terrorisme, la laïcité ou encore la crise républicaine. Mais en dehors des échanges sur le revenu universel ou la Loi travail, les candidats ne sont pas parvenus à passionner les téléspectateurs.
À défaut, ceux-ci ont pu découvrir des visages peu familiers : les recherches Google concernant Sylvia Pinel, François de Rugy et Jean-Luc Bennahmias ont explosé pendant le débat. La prestation de ce dernier notamment, dont l'agitation et les réponses décousues ont provoqué des sourires gênés ou amusés chez ses concurrents, a été particulièrement remarquée et raillée sur les réseaux sociaux. L'ancien membre des Verts et du MoDem a notamment semblé découvrir dans la bouche de la journaliste de RTL, Elizabeth Martichoux, sa proposition de constituer un corps de vigiles privés, niant son existance alors même qu'elle figure sur son site Internet officiel.
Du côté des favoris, difficile de trouver et dégager un vainqueur. Benoît Hamon a été particulièrement ciblé sur sa proposition de revenu universel, tandis que Manuel Valls a passé une bonne partie de la soirée à justifier son action et son bilan de Premier ministre, notamment sur la Loi travail. Quant à Arnaud Montebourg, il a certes été épargné par les attaques, mais il a parfois paru en retrait, sur la réserve.
Ce premier débat de la primaire de la gauche a toutefois eu un mérite : celui de souligner les réelles divergences qui existent entre les candidats sur le bilan de François Hollande, le revenu universel ou la Loi travail.
- Le verdict des candidats sur le quinquennat de Hollande
Les sept candidats en lice pour la primaire de la gauche – dont cinq ont été ministres de François Hollande – ont été d’emblée sommés de faire "en un mot" le bilan du quinquennat. L’ex-Premier ministre Manuel Valls a fait valoir sa "fierté d'avoir servi les Français dans une période très difficile", en référence notamment aux attentats terroristes. Arnaud Montebourg, congédié du gouvernement en août 2014, a, au contraire, jugé le quinquennat de François Hollande "difficile à défendre". Plus mesuré, Benoît Hamon a évoqué "un sentiment d'inachevé", tandis que Vincent Peillon disait "le sentiment d'une profonde incompréhension". "Peut mieux faire", a lâché Jean-Luc Bennahmias tandis que François de Rugy évoquait un bilan "contrasté, en demi-teinte". La plus positive aura été l’ex-ministre du Logement, Sylvia Pinel, qui a insisté sur le sens de la "responsabilité" qui a prévalu, selon elle, ces cinq dernières années.
- Pour ou contre le revenu universel
Proposition phare de Benoît Hamon, le revenu universel d'existence a été au cœur de la séquence économique et sociale du débat. Si Jean-Luc Bennahmias adhère au concept au point de l’avoir intégré à son programme, Vincent Peillon a fustigé une idée qui "philosophiquement pose un gros problème". Faisant valoir son alternative de "revenu minimum décent", Manuel Valls a défendu "une société du travail".
"Quand Michel Rocard a mis en place le RMI, on prétendait déjà que l’on aurait une société qui encouragerait la paresse. Ce n’est pas le cas", lui a rétorqué Benoît Hamon. François de Rugy a estimé que le débat ne devait pas être sur le revenu universel mais sur le chômage… "Je ne propose pas un revenu de base pour solde de tout compte", a-t-il critiqué.
- Abroger ou pas la Loi travail
Réforme passée en force au moyen de l'article 49-3 de la Constitution, la Loi travail qui est entrée en vigueur au 1er janvier divise les sept candidats à la primaire de la gauche : trois d’entre eux promettent d’ailleurs de l'abroger ou de l'amender. Si Manuel Valls a présenté la loi comme une "une avancée", Benoît Hamon et Arnaud Montebourg ont redit leur volonté d'abroger une loi "sans légitimité démocratique", qui "facilite les licenciements" et "la baisse de la rémunération des heures supplémentaires". Vincent Peillon ne souhaite pas abroger la loi, mais il veut "supprimer l'article qui permet à un accord d'entreprise de réduire, par exemple, la majoration des heures supplémentaires". Jean-Luc Bennhamias, Sylvia Pinel, François de Rugy n'ont, eux, pas indiqué qu'ils souhaitaient revenir sur la loi.
- Se désister en faveur de Mélenchon et/ou Macron ?
Sans surprise, aucun des sept candidats à la primaire organisée par le PS n'a voulu jeudi envisager de se désister en faveur de Jean-Luc Mélenchon ou d'Emmanuel Macron s'ils les devancent, comme le suggéraient les journalistes. Pour Arnaud Montebourg, "imaginez qu'il y ait 3 millions de votants à cette primaire, ce que je crois, nous aurons un mandat de rassembler l'ensemble des gauches". Benoît Hamon a pour sa part dit "oui à la discussion" avec les autres candidats de la gauche. "Je m'engage à faire en sorte que ce dialogue existe, s'il n'est pas conclusif, nous en prendrons acte, mais il faut qu'il existe", a-t-il précisé. Pour Vincent Peillon, "la plus grande erreur de ce quinquennat, c'est d'avoir été sectaire, brutal", alors que par le passé, "la gauche a su gagner quand elle a rassemblé". "On ne peut gagner qu'à partir du cœur de la gauche, le PS", a-t-il ajouté, promettant d'organiser le rassemblement avec Jean-Luc Mélenchon et Emmanuel Macron. Pour Manuel Valls, "la présidentielle, ça n'est pas un concours hippique, le jeu des petits chevaux (...). Chacun devra prendre ses responsabilités et tenir compte de la réussite de cette primaire".