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Vidéo : après la défaite de Jammeh, l'espoir retrouvé des prisonniers politiques gambiens

Après la défaite du président autocrate Yahya Jammeh à la présidentielle en Gambie, les familles des prisonniers politiques caressent l'espoir de voir leurs proches bientôt libérés. Reportage à Banjul, la capitale gambienne.

Il a dirigé durant 22 ans la Gambie et ne tolérait aucune contestation. À la surprise générale, Yahya Jammeh a reconnu, vendredi 2 décembre, sa défaite à l’élection présidentielle et félicité Adama Barrow pour sa victoire. Dans la foulée, des dizaines de familles d’opposants politiques emprisonnés ont recouvré l’espoir de voir leurs proches sortir de Mile Two, la tristement célèbre prison de Banjul, la capitale gambienne.

"Je n’arrivais pas à y croire. Je pensais être dans un rêve, confie Mymuna Darboe. La première chose à laquelle j’ai pensé c’est à mon mari et ses collègues : ‘quand et comment ils seraient libérés, à quelle heure ?’ Cela a été ma première pensée."

Son époux, Ousainou Darboe, leader du parti d’opposition UDP (Parti démocratique uni), purge actuellement une peine de trois ans de prison pour avoir protesté pacifiquement après la mort en détention de Solo Sendeng, un des membres de sa formation. "Il n’a commis aucun crime. Mais ceux qui l’ont tué, les criminels, eux, sont libres tandis que mon mari et ses collègues sont à l’isolement à la prison Mile Two, au pire endroit de la prison", commente Mymuna.

"Je ne souhaite rien de bon à Yahya Jammeh"

Même cri du cœur pour Bintou, la mère de Fatoumata Diawara, arrêtée et torturée en avril. "Je ne souhaite rien de bon à Yahya Jammeh. Mon sentiment, c’est qu’il devrait être amené à Mile Two pour qu’il souffre comme il a fait souffrir la Gambie. Qu’il subisse la même chose", dit-elle.

Au total, 44 membres de l’UDP sont en prison. Pour leur avocat, pas question d’attendre l’intronisation du nouveau président en janvier pour les relaxer. "Tous les prisonniers politiques vont être libérés, espère Me Lamin Cham. Nous allons en faire la demande au président Jammeh et nous espérons le rencontrer la semaine prochaine. Il ne passera le pouvoir qu’en janvier mais nous exigeons que ces gens soient libérés d’ici là."

Pendant plus de deux décennies, le régime de Yahya Jammeh a réprimé – parfois dans le sang – toute contestation politique. Le 2 novembre dernier, l’organisation Human Rights Watch (HRW) publiait un rapport dans lequel elle décrivait la répression mise en place par l’homme fort de Banjul depuis son arrivée au pouvoir en 1994. "Au cours des 22 dernières années, le président Jammeh et les forces de sécurité gambiennes ont fait des disparitions forcées, de la torture, de l'intimidation et des arrestations arbitraires les moyens de réprimer la dissidence et de se maintenir au pouvoir".

Après avoir alerté sur les risques d’une répression accrue à l’issue de la présidentielle, HRW s’est félicitée de la bonne tenue du scrutin. "Hier [vendredi], les Gambiens ont pu exercer leur droit d'élire leur président. Aujourd'hui, une fenêtre d'opportunité s'offre à eux pour faire reculer la peur et placer le respect des droits humains au premier plan", a déclaré, samedi, Babatunde Olugboji, directeur adjoint du bureau des Programmes de HRW, tout en soulignant que la période de transition présentait des "risques" de violations des droits de l’Homme.