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"Poutinophile" et "souverainiste" : la politique étrangère selon Fillon

Défenseur d’un dialogue avec la Russie, en particulier sur le dossier syrien, partisan d’une "confrontation sérieuse avec les États-Unis" et d’une "Europe des nations", que réserve François Fillon sur les questions de politique internationale ?

Fervent défenseur du dialogue avec la Russie, notamment sur le dossier syrien, François Fillon est certainement celui qui connaît le mieux Vladimir Poutine parmi la classe politique française. Il fut son homologue entre 2008 et 2012, alors qu’il était en poste à Matignon et tutoie l'homme fort de Moscou, qu'il a rencontré à de nombreuses reprises.

"Poutine sera l'un des responsables qu'il rencontrera le plus pendant son séjour rue de Varenne, en moyenne deux ou trois fois par an. Des rendez-vous diplomatiques qui, au fil du temps, s'aventurent hors du sentier protocolaire. Autour d'une table de billard, en septembre 2008, dans la résidence officielle de Sotchi", rappelle l’Express dans un article intitulé "François Fillon et son ami Poutine" publié en janvier 2014.

"Plus poutinophile que russophile", comme le décrit Nicolas Henin, auteur de "La France russe", le Sarthois souhaite notamment lever l’embargo imposé à Moscou après l’annexion de la Crimée.

"La Russie est le plus grand pays du monde et l'on ne cesse de la repousser vers l'Asie, alors qu'elle ne constitue en rien une menace", estime François Fillon dans une interview accordée à TF1 deux jours après sa surprenante victoire au premier tour de la primaire de la droite avec plus de 44 % des suffrages. Une victoire qualifiée "d’événement sensationnel" par Alexeï Pouchkov, sénateur et président de la Commission des Affaires étrangères de la Douma, la chambre basse du Parlement russe, dans une série de messages publiés lundi 21 novembre et relevés par le journal Le Monde.

Syrie : "La Russie fait preuve de réalisme"

Au Moyen-Orient, le député de Paris prône une coalition avec la Russie et une alliance avec Bachar al-Assad pour éradiquer l’organisation État islamique, sa priorité dans la région.

La situation en Syrie dure depuis quatre ans. Si l'on veut que cela cesse il faut parler avec les puissances capables d'arrêter ce massacre. pic.twitter.com/avY0PsfF1G

— François Fillon (@FrancoisFillon) 21 novembre 2016

Dans une tribune publiée le 1er avril 2016 par le magazine Marianne, il précisait sa position : "Depuis trois ans, je dis et redis que, à force de faire du départ d’Assad notre priorité, nous avons laissé l’EI gagner du terrain et gâché l’opportunité de bâtir une véritable coalition internationale. […] Dans ce contexte, une seule puissance a fait preuve de réalisme : la Russie". Et de poursuivre : "Pendant qu’Obama et Hollande s’offusquaient du choix des Russes de bombarder les opposants à Assad sans distinction, Poutine redonnait de l’air aux forces syriennes, désormais en mesure de combattre efficacement l’EI. La Russie a obtenu en six mois ce que les États-Unis et leurs alliés n’ont pu réaliser depuis leur engagement dans ce conflit en 2014". Une position très éloignée de celle de la diplomatie française.

À propos de la situation à Alep-Est, accablé par une pluie de bombardements menés par l'armée du président syrien et l’aviation russe, où vivent encore 250 000 civils, il refuse de parler de "crimes guerre". "Je ne sais pas, je ne suis pas sur place", répond sans ciller le vanqieur de la primaire de la droite. Et ce, malgré les rappels de l'ONU, qui a déclaré cette semaine que les quartiers rebelles de la ville syrienne étaient soumis depuis quatre mois à la "tactique cruelle" du siège comme "près d'un million" de personnes au total dans le pays.

Pendant la campagne, François Fillon s’est également beaucoup investi dans la défense de la cause des chrétiens d’Orient. Pour cela, il a multiplié les voyages. "Il s’est rendu à plusieurs reprises en Irak, au Liban", rappelle Romain Gubert, rédacteur en chef du Point. Un investissement qui a participé à le rendre populaire au sein l’électorat catholique.

"Beaucoup de contentieux avec les États-Unis"

Sur le volet américain, François Fillon souhaite une "confrontation sérieuse avec les États-Unis sur les conditions des alliances" pour que Paris "défende ses intérêts" en politique étrangère." Selon lui, "les intérêts de la France sont menacés aujourd'hui par les incursions de la justice américaine dans notre économie" et il existe "beaucoup de contentieux avec [Washington], pas seulement sur la politique étrangère" mais aussi des "contentieux économiques considérables".

"Les États-Unis exercent une forme de contrôle de l'économie européenne absolument insupportable, contraire au droit international et à la morale internationale", estime l’ancien Premier ministre.

Il est temps pour la France et les Européens de comprendre qu’être l’ami des Etats Unis, n’est pas être son vassal. #PalaisDesCongrès

— François Fillon (@FrancoisFillon) 18 novembre 2016

Celui qui a soutenu Hillary Clinton lors de la campagne se dit confiant quant à la présidence Trump : "Ce n'est pas la première fois qu'il y a un président américain élu un peu original. […] On a eu un président qui s'appelle Ronald Reagan [1980-1988, NDLR) dont on disait à peu près la même chose. Il ne faut pas en tirer des conséquences comme le font tous les hommes politiques français absolument stupides sur les élections dans notre pays".

Nous avons beaucoup de contentieux avec les Etats-Unis, et beaucoup ne datent pas de Monsieur Trump. #PrimaireLeDebat

— François Fillon (@FrancoisFillon) 17 novembre 2016

Europe : "Respecter la souveraineté de la France"

Côté européen, François Fillon est un partisan d’une “Europe des Nations”, qui respecterait la “souveraineté de la France”. "L’Europe doit être un instrument et non pas une religion. C’est pour cette raison que je suis l’un des seuls, aux côtés de Philippe Seguin, à avoir fait campagne contre le traité de Maastricht", précise-t-il dans son programme. "L’Europe devra concentrer son action sur quelques domaines bien définis et laisser la liberté aux États nations de se gouverner comme ils l’entendent sur une majorité de sujets, en respect du principe de subsidiarité."

"Je propose donc pour relancer l’Europe de se concentrer sur trois priorités stratégiques que l’on peut déterminer dès maintenant et mettre en œuvre sans avoir besoin d’un nouveau traité : la sécurité des citoyens avec des frontières efficaces, une immigration maîtrisée et une défense autonome ; la souveraineté économique et financière en faisant de l’euro une monnaie de réserve ; l’investissement, l’innovation et la recherche au service de grands projets européens et d’une société de la connaissance", résume François Fillon.