À partir du 7 novembre à 16h34 (et 7 sec), les femmes françaises travailleront "bénévolement". Si les femmes étaient payées comme les hommes, elles devraient, pour toucher le même salaire qu’aujourd’hui, s’arrêter de travailler à ce moment précis.
"Ah oui, carrément. C'est une bonne initiative... Fermez le site à 16h34. Mais... [l'air ennuyé, les sourcils vraisemblablement levés par le souci de productivité] ça pourrait être pas mal que vous veniez à 7h du mat', pour compenser ?", nous a d'abord répondu notre rédacteur en chef adjoint.
"Bah non, ça n'aurait plus de sens, sinon...", lui a-t-on rétorqué. Alors que nous venions de lui faire part de notre envie de terminer notre journée à 16h34, ce lundi 7 novembre, en soutien à la mobilisation contre les écarts de salaires entre hommes et femmes, la réaction (un peu trop) spontanée de notre rédacteur en chef adjoint nous a beaucoup fait rire – lui compris.
Car comme l'a rappelé le collectif féministe Les Glorieuses à l'origine de l'appel à mobilisation, si les femmes étaient rémunérées comme les hommes, elles devraient, pour atteindre le même salaire annuel qu’aujourd’hui, s’arrêter de travailler à ce moment précis. Avec une moyenne de 15% de différence, les femmes travaillent environ 38 jours ouvrés par an bénévolement.
#7novembre16h34 https://t.co/vZC3IQRwmV pic.twitter.com/D1S3wRRcHo
— Les Glorieuses (@Les_Glorieuses) 30 octobre 2016
En ce lundi sur Mashable FR, nous avons donc décidé, avec le soutien de nos rédacteurs en chef, qu'aucun article ne sera posté après celui que vous êtes en train de lire, puisque dans notre rédaction à 80% féminine, nous ne sommes aujourd'hui que des femmes à tenir la boutique. Pour continuer à faire vivre le site, nous reviendrons évidemment dès demain matin pour poursuivre notre mission qui est de vous offrir un tour d'horizon de l'actualité numérique.
"Notre équipe est clairement féminine", se réjouissent nos rédacteurs en chef
Certains esprits peu avisés cherchent régulièrement à discréditer "le combat féministe" en opposant l'argument que "dans les pays occidentaux, après tout, les femmes peuvent voter, porter des pantalons, porter des jupes, avorter, faire des enfants, travailler".
Merci mais tout cela ne suffit pas. Pas tant que dans les milieux professionnels subsiste, brillant et incassable, ce "plafond de verre" qui complique l'accès des femmes aux postes supérieurs et empêche de les rémunérer comme leurs homologues masculins.
Pour ne rien arranger, certains milieux sont également touchés par un sexisme qui ne dit pas son nom. Léger et pernicieux, celui-là est plus difficilement repérable : il ne ressemble pas à une mauvaise sortie de Jean-Marie Bigard ou une main aux fesses sur la ligne 13 un jour où la rame est bondée parce qu'il pleut.
Parlons par exemple de la sphère tech, celle que l'on connaît le mieux chez Mashable FR : la misogynie, c'est celle qui consiste à vite accuser une gameuse de "Fake Geek Girl" ou encore cette diatribe du dessinateur de comics professionnel Tony Harris qui s'en prend violemment aux femmes cosplay. Mais c'est aussi ce procès d'illégitimité trop souvent fait aux femmes entrepreneures qualifiées de bossy là où les hommes sont salués pour leur "capacité à tenir une équipe", ou encore cette tendance à partir du principe que notre journaliste Marine Benoit est forcément un mec ("Hello Benoit !") sans doute parce qu'une personne qui couvre les dernières keynotes d'Apple et de Microsoft est forcément pourvue d'un pénis.
Le tableau n'est pas tout noir – en tout cas, il s'éclaircit progressivement : on apprend aux petites filles à coder, on encourage les femmes à lancer des start up... et pour construire la version française de Mashable, nos rédacteurs en chef n'ont pas hésité à recruter des plumes sans considération de genre. Merci à eux pour cela. "Notre équipe est clairement féminine", les entend-on souvent sincèrement se réjouir lorsqu'ils parlent de notre rédaction, tous deux très sensibles aux questions de parité. Et nous de plaisanter : "Une rédac féminine, oui... mais avec quand même deux hommes pour rédacteurs en chef".
16h34, c'est l'heure du goûter. Mais c'est aussi l'heure de se féliciter du chemin parcouru... tout en refusant d'abdiquer sur celui des combats qu'il reste à mener.
Émilie Laystary avec Marine Benoit et Louise Wessbecher
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