Après une longue bataille juridique entre Alger et Londres, la justice britannique a donné son feu vert pour l’extradition de l’ex-magnat algérien Rafik Khalifa vers son pays d’origine, où il a été condamné à la prison à perpétuité.
La justice britannique a autorisé, ce jeudi, l’extradition de l’ancien "golden boy" algérien Rafik Khalifa. Peu après cette annonce, son avocate Anna Rothwell a fait part de son intention de faire appel de cette décision.
A la tête d’un riche groupe industriel et financier (compagnie de transport aérien, banques, médias, etc.) au début des années 2000, cet Algérien, aujourd’hui âgé de 43 ans, pharmacien de son état, a déjà été condamné par contumace par la justice algérienne, le 22 mars 2007, à la réclusion à perpétuité pour "association de malfaiteurs, vol qualifié, détournement de fonds, et faux et usage de faux".
Le procès de ce fils d’un ancien ministre a eu un retentissement politique sans précédent, tant en France qu’en Algérie. Pas moins de six anciens ministres et 200 témoins, liés directement ou indirectement à l’affaire, ont défilé devant la barre du tribunal d’Alger.
L’épopée de Khalifa a commencé vers la fin de la décennie 1990. Profitant des entrées que son père possédait au sein de l’appareil politique et économique algérien, l’ancien businessman fonde Khalifa Bank, qui propose des intérêts mirobolants allant de 11 à 13 %. Une aubaine pour de nombreux actionnaires privés et entreprises publiques qui y ont déposé leurs avoirs.
Trois luxueuses villas sur la Croisette
La suite est connue. Rafik Abdelmoumen Khalifa, après avoir amassé des fortunes, diversifie ses activités. Il se lance dans le transport aérien (Khalifa Airways, qui se dotera de 13 Boeing achetés en leasing) et dans les médias (chaîne de télévision Khalifa News). Le milliardaire ouvre également une agence de location de voitures de luxe à Paris ainsi qu’à Londres, et sponsorise l’Olympique de Marseille (OM).
En 2000, Khalifa achète trois luxueuses villas sur la Croisette cannoise et se lie d’amitié avec les stars du showbiz : Gérard Depardieu, Catherine Deneuve, le chanteur Cheb Mami… Autant de célébrités qui, à l’époque, n’ont pas hésité à vanter les mérites et le courage du jeune Algérien.
A cette même période, sur la chaîne de télévision française TF1, le journaliste économique Jean-Marc Sylvestre salue, à la faveur d’un entretien exclusif, la réussite et l’ascension fulgurante de ce businessman venu d’Algérie.
Comme un château de cartes
Seulement voilà, au début de 2003, le public découvre que le groupe Khalifa doit sa montée en puissance à un endettement gigantesque. L’origine des fonds commence à soulever des questions. En France, le parquet de Nanterre ouvre, à la fin de 2003, une information judiciaire contre Rafik Khalifa pour "abus de confiance, banqueroute par détournement d’actifs, banqueroute par dissimulation de comptabilité, blanchiment en bande organisée".
De nombreux procès ont lieu en Algérie et en France. L’empire Khalifa s’écroule. Comme un château de carte.
Acculé, endetté après avoir perdu tous ses soutiens politiques et médiatiques, Rafik Khalifa s’est réfugié à Londres pour fuir la justice algérienne. Qui risque désormais de le rattraper.