
Malgré les pressions exercées par le régime iranien, l'opposant Mir Hossein Moussavi a réaffirmé le principe de la contestation. Mehdi Karroubi, autre candidat réformiste, a annulé une cérémonie en mémoire des victimes de la répression.
Le candidat malheureux à l’élection présidentielle iranienne Mehdi Karroubi a annulé, jeudi, la cérémonie prévue en mémoire des victimes de la répression, mortes lors des manifestations ayant suivi la réélection du président conservateur Mahmoud Ahmadinejad.
Un comm uniqué, posté sur le site de Mehdi Karroubi, indique que "malgré tous les efforts déployés pour honorer la mémoire des victimes, la cérémonie n’aura pas lieu jeudi". Il ajoute : "Il est regrettable que dans cette situation, on ne donne pas un endroit à des dirigeants politiques tels que Karroubi pour organiser une cérémonie de deuil." Toutefois, malgré cette interdiction, Karroubi s’est dit déterminé à honorer la mémoire des victimes la semaine prochaine à l’universit é de Téhéran ou au cimetière de la ville (Behesht-e Zahra).
Farhad Pouladi, correspondant de l’AFP à Téhéran, explique à FRANCE 24 que "tous les groupes ont besoin de permis pour organiser des rassemblements et le ministère de l’intérieur n’a pas donné une suite favorable à la demande de Karroubi". Mina, une jeune Iranienne, ajoute dans un email envoyé à FRANCE 24 mercredi : "Nous devons organiser un rassembl ement à la mémoire des victimes, mais toutes les deux minutes, la télévision iranienne diffuse des messages affirmant que toutes les marches seront sévèrement réprimées."
Arresta tions d 'opposants
Soucieux de faire retomber la pression, l’ayatollah Husseini Ali Montazeri, considéré comme possible successeur d’Ali Khamenei comme guide suprême, a demandé au gouvernement de mettre en place une commission "impartiale" pour mettre fin à la crise. "Si les Iraniens ne peuvent pas parler de leurs droits légitimes lors de rassemblements pacifiques, la situation risque de se compliquer davantage et affectera les fondements de la République", a-t-il déclaré à l’AFP.
D es échauffourées ont éclaté mercredi entre les manifestants et la police à Téhéran. Selon des témoins sur place, plusieurs c entaines de pro-Moussavi, qui tentaient de se rassembler devant le Parlement, ont été délogés par les bassidjis (milice du pouvoir).
Par ailleurs, le candidat Mir Hussein Moussavi a exhorté ses militants à poursuivre la contestation, tout en évitant un bain de sang. Pendant ce temps, le journal iranien Etemad a publié les noms de 71 personnalités et journalistes réformistes ayant pris part à la campagne électorale du candidat Moussavi. De son coté, le site de Moussavi, Kalemah ("parole"), a indiqué que 70 académiciens et membres d’associations islamiques universitaires ont été arrêtés mercredi après avoir rencontré l'opposant.
Londres et Washington accusés d'être derrière les manifestations
Malgré les mesures de sécurité draconiennes, la lutte des militants pro-Moussavi ne faiblit pas. Ils annoncent le lancement, vendredi, de milliers de ballons dans le ciel de Téhéran portant le message "Neda restera éternellement dans nos cœurs". L’action se veut un hommage à la mémoire de Neda Soltane, cette jeune Iranienne tuée la semaine dernière en marge d’une manifestation, apparemment par un sniper embusqué. Après la large diffusion sur le Web de la vidéo de son agonie, Neda est en passe de devenir l’icône involontaire de la mobilisation.
Sur le front diplomatique, le président Ahmadinejad a demandé aux Etats-Unis de mettre fin à leur ingérence dans les affaires de son pays. "M. Obama a fait une erreur en disant des choses pareilles… Nous voulons savoir pourquoi il a cru l’opposition et répété les mêmes choses déjà dites par son prédécesseur", a soutenu le président iranien.
Depuis, le début de la violence, Téhéran n’a pas cessé d’accuser Londres et Washington d’être derrière les manifestations et de jeter de l’huile sur le feu. En guise de représailles, Téhéran a expulsé l’ambassadeur britannique, Londres en a fait de même avec l'ambassadeur iranien.
De son côté, Hugo Chavez a réitéré ses accusation contre la CIA, responsable selon lui des violences post-électorales qui secouent l’Iran. Le président du Venezuela a estimé que Mahmoud Ahmadinejad a gagné légalement et sans fraudes: "Nous sommes absolument sur de cela car nous connaissons un peu la politique iranienne."