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Dans la bande de Gaza, le "pire zoo du monde" ferme ses portes grâce à une entente internationale inattendue

Le zoo de Khan Younès, dans la bande de Gaza, est vide depuis mardi 23 août. Le "pire zoo du monde" n'accueillait plus que 15 animaux sauvés grâce à une collaboration entre l'association Four Paws et les autorités palestiniennes et israéliennes.

Quinze survivants. De la centaine d'animaux venus remplir en 2007 les enclos du zoo de Khan Younès, dans la bande de Gaza, seuls quinze ont survécu. 

Ces quinzes animaux – tigre, tortues, singes et porc-épics confondus – ont quitté ce zoo de l'enfer le 23 août 2016, grâce à l'action de l'association autrichienne de protection des animaux Four Paws (ou Vier Pfoten en autrichien, pour "quatre pattes"). L'emplacement géographique du zoo, sur un territoire sous le coup d'un blocus politique et économique, a rendu l'opération très difficile. Mais les vétérinaires et bénévoles de l'association ont finalement pu évacuer les animaux pour les amener dans des locaux plus sûrs et appropriés.

"The world’s worst zoo" shut down as last surviving animals leave Gaza https://t.co/tsAul4bh8C #China pic.twitter.com/bIrLEJqvyi

— Teleame | News (@TeleameNews) 25 août 2016

Les animaux, victimes collatérales du conflit israélo-palestinien

Le zoo de Kahn Younès a pendant des années été renommé "le pire zoo du monde" par les médias et les défenseurs des droits des animaux. L'une des deux principales causes de cette appellation, c'est le manque de moyens, qui sautait aux yeux des visiteurs : enclos sales et vétustes, bâtiments à moitié effondrés. Les animaux semblaient tous malades, à cause du manque de nourriture et de soins. Quand les habitants de la bande de Gaza souffraient d'une pénurie, lié au blocus instauré par l'Égypte et Israël, les animaux en souffraient aussi.

Depuis la création du zoo en 2007, trois conflits majeurs ont secoué la zone en 2008, 2012 et 2014. Les attaques ont été meurtrières dans les deux camps... et dans les enclos.

Durant la Guerre de Gaza de l'été 2014, les intenses bombardements empêchent le propriétaire du zoo, Mohammed Aweda, de rendre visite aux animaux pendant 17 jours, comme une majorité du staff. Des deux tigres, la femelle finit par mourir de faim et du manque de soins.

La tigresse a fini par mourir de faim

Pour attirer l'attention sur la situation catastrophique de son établissement, Mohammed Aweda décide de conserver, mommifier et exposer les animaux morts dans son zoo. Une manière pour lui de rappeler que ces animaux ont vécu ici, mais aussi de montrer aux visiteurs les conséquences du blocus de la bande de Gaza par les pays frontaliers. Les animaux, d'autant plus terrifiants qu'ils ont été mal embaumés, sont installés dans un enclos, où vivent deux pélicans – vivants.

This zoo in Gaza displays dead and starving animals... https://t.co/gA1ax3ENAN pic.twitter.com/K1QDyW7Q1O

— Emmanuel damola (@oladam) 14 mars 2016

L'association Four Paws décide alors d'intervenir. Mais le blocus de la bande de Gaza rend difficile l'accès de vétérinaires et de médicaments jusqu'au zoo de Khan Younès. Le zoo demande de l'aide.

Plusieurs missions à petite échelle permettent à l'association d'amener bénévoles, nourriture et quelques médicaments de l'autre côté de la frontière bien gardée.

Au cœur du conflit, une entente inattendue

Mohammed Aweda décide au début de l'année 2016 de fermer le zoo, et met en vente les animaux. Mais l'affaire piétine, et les animaux continuent de mourir les uns après les autres. Un faon à peine né mourra le 22 août 2016, la veille de l'arrivée des membres de Four Paws, mortellement blessé en tentant de fuir son enclos.

Les responsables israéliens et palestiniens s'assoient à la même table pour discuter du problème

L'association met alors en place une gigantesque coalition internationale réunissant plusieurs pays d'Afrique et du Moyen-Orient, afin de reloger rapidement les animaux restants. Des responsables israéliens et palestiniens s'asseoient à la même table pour discuter du problème. Il s'agit pour Four Paws d'obtenir l'autorisation de transporter les animaux hors de la bande de Gaza – ce qui semble impossible avec le blocus – puis de les reloger dans des réserves en Israël, en Jordanie et jusqu'en Afrique du Sud.

En deux mois, un futur "logement" est trouvé pour chaque animal. Au vu de la mobilisation internationale et de l'écho médiatique de cette affaire, les autorités israéliennes acceptent de laisser les membres de Four Paws entrer puis sortir de la bande de Gaza avec les animaux, par la frontière d'Erez. 

Au moment où nous écrions ces lignes, les animaux du zoo de Gaza sont en route vers leur nouveau chez-eux. Les singes ont pris la direction du New Hope Center, une réserve en Jordanie. Le tigre survivant, lui, a pris l'avion pour l'Afrique du Sud, où il rejoindra la réserve de grands félins Lionsrock.

Retour au statu quo

Dans la bande de Gaza, la frontière s'est refermée dès le passage des animaux rescapés. Les Palestiniens subissent toujours le blocus et le manque de ressources. Le Washington Post rapporte que certains d'entre eux ont ironisé sur leur sort des humains comparé à celui des tortues et des pélicans.

One guy said Palestinians should pretend to be Tarzan, so they could escape along with their animal friends https://t.co/fVnTXXztgS

— William Booth (@BoothWilliam) 24 août 2016

Deux millions de Palestiniens vivent encore dans la bande de Gaza, dans des conditions très dures. Sur le Web, certaines personnes ont du mal à s'émouvoir de l'histoire des animaux survivants du "pire zoo du monde", se demandant quand on viendra sauver les hommes, femmes et enfants, eux aussi coincé dans le "grand zoo qu'est la bande de Gaza".

Yes, It is good for the #animals for they now have a better opportunity at life; sad for the children of #Gaza... https://t.co/1s3wxxr6nR

— Majed Abusalama (@MajedAbusalama) 25 août 2016

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