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Turquie : la purge se poursuit après le coup d'État raté

Dans l'armée, l'éducation nationale ou au sein des institutions religieuses, Ankara poursuit sa purge après le coup d'État raté. Une demande d'extradition de l'opposant Fethullah Gülen, accusé d'y être lié, a été envoyée à Washington.

Bien que l'état-major ait pris la défense de l'armée turque, mardi, soulignant que son "écrasante majorité n'a absolument rien à voir" avec la tentative de coup d'État, survenu dans la nuit du vendredi 15 au samedi 16 juillet, ils sont plusieurs milliers de soldats à avoir été placés en garde à vue.

Les militaires ayant pris part à cette "vilénie" seront "sanctionnés de la manière la plus lourde", a affirmé l'état major dans un communiqué publié sur son site.

Les purges se poursuivent et touchent tous les secteurs, à travers le pays où, de source proche de Binali Yildirim, 257 fonctionnaires travaillant au cabinet du Premier ministre ont été relevés de leurs fonctions.

Le Conseil de l'enseignement supérieur a, de son côté, réclamé la démission de tous les recteurs d'universités publiques. Le ministère de l'Éducation a annoncé, mardi, la suspension de plus de 15 000 de ses employés soupçonnés d'être liés au prédicateur Fethullah Gülen, accusé d'être derrière le putsch manqué.

La Diyanet (Direction des affaires religieuses, autorité musulmane suprême du pays) a fait savoir, que 492 de ses employés avaient été mis à pied pour leur implication présumée et aussi pour des liens "terroristes" présumés.

Lundi 18 juillet, le pouvoir turc avait fait état de 7 543 arrestations et a annoncé le renvoi de plus de 5 000 policiers.

Le chef du gouvernement turc a en outre affirmé, mardi, que son gouvernement avait envoyé des dossiers aux États-Unis pour demander l'extradition de Fethullah Gülen, un ancien allié d'Erdogan, devenu son pire ennemi, et qu'il accuse d'être l'instigateur de la tentative de coup d'État.

Le prédicateur, exilé en Pennsylvanie dans le nord-est des États-Unis depuis 1999, nie ces accusations. Il est à la tête d'un mouvement appelé "Hizmet" ("service", en turc), qui compte un gigantesque réseau d'écoles, d'ONG et d'entreprises et est très influent dans les médias, la police et la magistrature.

"Il n'est plus possible de parler de démocratie"

Une nouvelle fois, il a réfuté son implication dans la tentative de coup d'État qui a fait au moins 308 morts vendredi, dont 100 mutins.

Pour lui, le déroulement de cette tentative interroge, notamment, sur le rôle éventuel joué par le gouvernement.

"Vous avez des informations de presse indiquant que des membres du parti au pouvoir étaient au courant de la tentative huit, dix, voire 14 heures à l'avance", relève-t-il.

"Ce coup d'État manqué, quels qu'en soient les auteurs ou les meneurs, renforce" le président et ses partisans, conclut-il.

"Il n'est plus possible de parler de démocratie"

Il s'inquiète aujourd'hui des conséquences de la reprise en main qu'a initiée le dirigeant turc. L'ancien imam évoque des appels lancés, selon lui, par des partisans du président, à s'en prendre aux sympathisants d'Hizmet, le mouvement qu'a inspiré Fethullah Gülen.

"Dans un paysage comme celui-là, il n'est plus possible de parler de démocratie, de Constitution, d'une forme de gouvernement républicain, estime l'opposant. Ce régime ressemble davantage à un clan ou à un gouvernement tribal", a-t-il ajouté , d'une voix faible.

Interrogé sur son éventuelle extradition, réclamée par le président Erdogan, il assure n'avoir "pas d'inquiétude", face à une tentative, qu'il juge vouée à l'échec.

Le secrétaire d'État américain John Kerry a indiqué lundi que ce n'était pas envisageable en l'absence de preuves et qu'il appartenait aux autorités turques d'en fournir. "Nous leur présenterons plus de preuves qu'ils n'en veulent", a promis le Premier ministre turc.

Avec AFP et Reuters