La prière du vendredi a été dirigée par le guide suprême Ali Khamenei, fait rare dans le pays. Il a appelé au calme suite aux manifestations qui ont secoué l'Iran depuis la réélection de l'ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad.
AFP - Le guide suprême iranien Ali Khamenei fait vendredi sa première apparition en public après six jours de contestation populaire sans précédent en 30 ans dans le pays, en prononçant un prêche attendu à la principale prière à Téhéran.
Les partisans de Mir Hossein Moussavi, qui conteste les résultats de la présidentielle et réclame un nouveau scrutin, ont annulé pour la première fois depuis le début du mouvement une manifestation prévue à l'Université, où l'ayatollah Khamenei doit s'exprimer vers 13H00 locales (08H30 GMT).
L'enjeu est d'autant plus sérieux pour Ali Khamenei, la plus haute autorité de la République islamique, qu'il avait implicitement appuyé la candidature du président sortant, l'ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad, avant de saluer sa réélection pour quatre ans comme une "grande fête".
Le guide a depuis enjoint le Conseil des gardiens de la constitution à examiner avec attention les plaintes de M. Moussavi et des autres candidats, Mehdi Karoubi et Mohsen Rezaï, sur des irrégularités pendant le scrutin.
L'institution a fait savoir qu'elle entendrait samedi les trois protestataires, qui ont fait état de 646 irrégularités. Elle doit rendre au plus tard dimanche un avis sur un possible nouveau décompte partiel.
Le prêche de la prière du vendredi donne la ligne politique du pouvoir sur un évènement donné, a fortiori s'il est prononcé par le guide suprême en personne, et à un moment où le régime fait face à la plus importante contestation populaire depuis la révolution islamique en 1979.
Preuve que ce prêche est attendu par tous, les partisans de M. Moussavi se sont donné le mot pour annuler toute manifestation. Des consignes circulant sur les sites de socialisation et par e-mail enjoignaient ainsi de ne pas se réunir dans Téhéran.
M. Moussavi, qui participait jeudi à une manifestation interdite dans le centre de la capitale, avait donné des gages de fidélité au régime, tout en réitérant que son mouvement visait à obtenir l'annulation de l'élection.
"Nous ferons tout sacrifice nécessaire pour préserver le système (le régime)", a affirmé M. Moussavi, qui a été un des acteurs clé de la révolution de 1979.
"Nous sommes ici pour obtenir nos droits, nous voulons seulement récupérer nos votes", a-t-il ajouté, selon son site internet Kalameh.
Depuis l'annonce des résultats de l'élection samedi, l'opposition menée par M. Moussavi organise d'imposantes manifestations quotidiennes dans les rues, dont l'une avait dégénéré lundi avec la mort de sept manifestants dans des heurts.
Ce mouvement s'est répandu au-delà de la capitale. Les autorités ont fait état de nombreuses arrestations de manifestants dans des grandes villes comme Mashhad ou Tabriz.
Le prêche du guide suprême est d'autant plus attendu que l'unité de façade du régime sur les évènements commence à se lézarder.
L'Assemblée des experts, qui compte 86 religieux chargés notamment de superviser l'activité du guide suprême, s'est "félicitée" jeudi de la participation record au scrutin (85%) mais n'a pas eu un mot sur la réélection de M. Ahmadinejad. Un silence qui vaut désaveu du décompte des voix.
Akbar Hachémi Rafsandjani, l'ex-président qui dirige cette Assemblée, a été accusé par M. Ahmadinejad d'orchestrer la campagne de M. Moussavi.
Par ailleurs, au moins cinq grands ayatollah, le rang le plus élevé dans le clergé chiite iranien, ont demandé au Conseil des gardiens de prononcer un "verdict convaincant" sur les plaintes des candidats.