Une soixantaine de députés français issus de toutes les partis politiques demandent la création d'une commission d'enquête parlementaire sur le port de la burqa et du niqab en France, le voile intégral porté par certaines musulmanes.
AFP - Une soixantaine de députés, emmenés par le député PCF de Vénissieux (Rhône) André Gérin, ont demandé la création d'une commission d'enquête parlementaire sur le port en France de la burka ou du niqab, le voile intégral revêtu par certaines femmes musulmanes, au risque de relancer une "guerre du voile".
"Nous sommes aujourd’hui confrontés, dans les quartiers de nos villes, au port par certaines femmes musulmanes de la burka, voilant et enfermant intégralement le corps et la tête dans de véritables prisons ambulantes ou du niqab qui ne laisse apparaître que les yeux", écrit M. Gérin dans sa proposition de résolution. Il juge cette "tenue vestimentaire dégradante".
Sa proposition, déposée le 8 juin, est cosignée par 58 députés de toutes tendances politiques, en particulier de droite (3 PCF, 7 PS, 43 UMP, 2 NC, 3 NI) et il espère qu'elle sera soutenue par le gouvernement. Si elle voit le jour, la commission d'enquête parlementaire compterait 30 membres et devrait avant le 30 novembre "définir des propositions afin de lutter contre ces méthodes qui constituent une atteinte aux libertés individuelles sur le territoire national".
La présidente de Ni putes ni soumises, Sihem Habchi, a été prompte à réagir, considérant qu'il fallait "encourager le débat sur cette question, (...) rendre visible la réalité et la dégradation de la condition des femmes".
"La loi de 2004 sur la laïcité (interdisant les signes ostensibles d'appartenance religieuse dans les établissements scolaires, ndlr) était nécessaire mais pas suffisante; il faut rouvrir le débat et ce sera à chacun de se positionner sur la laïcité, sur la mixité. La France a une responsabilité face aux femmes qui sont en train de se battre en Iran pour leurs droits", a encore estimé Sihem Habchi.
Le secrétaire général de l'Union des organisations islamiques de France (UOIF), Fouad Alaoui a lui dénoncé "une nouvelle manoeuvre propre à encourager les amalgames". Il regrette dans une brève déclaration à l'AFP cette démarche qui intervient "justement quand on parle de l'Iran" et se dit "triste qu'on en arrive à ce niveau".
La proposition d'André Gérin intervient alors que la question du voile avait resurgi avec le discours du Caire du président Barack Obama. Celui-ci avait invité les pays occidentaux à ne pas gêner les musulmans dans la pratique de leur religion et critiqué ceux qui décident "les vêtements qu'une femme doit porter".
"En France, toute jeune fille qui veut porter le voile peut le faire. C'est sa liberté", avait réagi Nicolas Sarkozy, précisant toutefois que cette liberté ne s'applique pas aux fonctionnaires qui reçoivent le public "parce que nous sommes un Etat laïc". Le président Sarkozy n'avait pas parlé alors de l'interdiction des signes religieux dans les écoles publiques, qui relève de la loi.
Depuis le vote de la loi de 2004, le débat sur le voile s'est apaisé, même si la Haute autorité de lutte contre les discriminations (Halde) est intervenue pour interdire les cours de français à une femme complètement voilée. Depuis aussi, la propriétaire d'un gîte rural a été condamnée pour avoir refusé d'accueillir deux femmes portant le voile.
Entre les tenants de la laïcité et ceux invoquant la liberté d'expression, le voile islamique reste un sujet de polémique, susceptible d'être relancée par la proposition d'André Gérin. Aucune statistique n'est aujourd'hui disponible sur la proportion de musulmanes voilées de la tête aux pieds.