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Les partisans de Bernie Sanders entre révolution et résignation

correspondante à Washington – Ils étaient des centaines à assister, jeudi à Washington, à l'un des derniers meetings de Bernie Sanders. Si le candidat socialiste ne lâche rien, ses partisans hésitent entre continuer la révolution et se ranger derrière Hillary Clinton.

Dure semaine pour les partisans de Bernie Sanders. Mardi soir, Hillary Clinton a revendiqué la victoire aux primaires démocrates. Puis, jeudi 9 juin, le président Barack Obama a annoncé publiquement qu’il soutenait l’ex-secrétaire d’État, quelques minutes après sa rencontre avec Bernie Sanders à la Maison Blanche.

Pourtant, le candidat socialiste n’abandonne pas : il a fait campagne le soir même dans la capitale américaine, qui tient sa primaire mardi prochain. En plus d’une heure de discours, le sénateur du Vermont n’aura pas dit un mot sur Hillary Clinton. À la place, il a égrené ses thèmes de campagne, comme s’il voulait rappeler à la jeune génération tous les combats qu’il reste à mener.

Des milliers de supporters sont venus l’accueillir, et pour beaucoup, lui dire au revoir. Car la plupart le savent, le mouvement initié par Bernie Sanders vit ses derniers jours. Mais pour les plus fidèles, pas question d’abdiquer face à l’"establishment".

Juan Speraman, 31 ans, est catégorique, il continuera à soutenir son candidat jusqu’à la convention de juillet : "Le programme de Bernie Sanders est l’antithèse de celui de Hillary Clinton. Bernie ne devrait pas céder face au système. Il doit rester le progressiste qui nous inspire tous."

La tentation du vote indépendant

Même si Sanders demande à ses partisans de soutenir Clinton, Juan assure qu’il n’obéira pas. Il votera plutôt Jill Stein, la candidate du Green Party, le parti écologiste, qui ne cesse d’appeler Bernie Sanders à la rejoindre dans un mouvement indépendant : "J’ai été un démocrate jusqu’ici, mais si Bernie perd, c’est fini. En fait, la seule raison pour laquelle je suis encore un démocrate, c’est parce que Bernie représente le dernier espoir pour ce parti. J’espère que les membres de l’establishment vont réaliser qu’ils ont eu tort. Ils devraient écouter ce candidat qui représente vraiment les classes moyennes et populaires, qui a inspiré les jeunes et attiré de nouveaux adhérents, même des indépendants et des républicains ! Si ça n’est pas le cas, eh bien nous sommes prêts pour un troisième parti, nous sommes prêts pour une femme candidate… Jill Stein !"

Lucy et Woody Woodruwf, la soixantaine révolue, envisagent eux aussi de voter pour l’écologiste. "Nous venons du Maryland, un État très démocrate, donc cela n’aura pas de conséquence si nous votons pour un troisième parti", explique le couple.

Pour eux, le plus important, c’est le message qu’a su transmettre Bernie Sanders aux plus jeunes. "Grâce à lui, le mot 'socialisme' n’est plus un tabou. Nous avons grandi dans l’ombre du rideau de fer et du McCarthysme [chasse aux sorcières anti-communiste dans les années 1950, NDLR]. C’est vraiment rafraîchissant de voir qu’il a réussi à ouvrir les portes du socialisme à une nouvelle génération d’Américains."

Résignation et espoir

Beaucoup dans le public sont pourtant résignés à voter pour Hillary Clinton. S’ils sont venus jeudi soir, c’est pour rendre hommage au combat de Bernie Sanders, en espérant que ses idées survivent après les primaires. "Même si Obama vient de soutenir Clinton, Bernie ne doit pas se retirer, et ce pour le bien du parti. Il faut continuer le dialogue jusqu’au bout", estiment Anna Benoic et Keyla Gilson, deux étudiantes de 20 ans. Le moment venu, elles se rangeront toutefois derrière Clinton car "voter pour un parti indépendant revient à voter pour Donald Trump. Or Trump président, c’est le pire qui puisse arriver."

Parmi la foule, beaucoup sont des bénévoles qui ont travaillé jour et nuit pour faire élire leur candidat. Robert Yochem, 45 ans, ne regrette pas son sacrifice. "Je le soutiendrai jusqu’au bout, mais au moment où il faudra soutenir le nominé du Parti démocrate, je serai là. Dans l’idéal, j’aimerais que le parti dans son ensemble adopte les idées promues par Sanders. Et je pense que Clinton est ouverte à la négociation."

Aujourd’hui, Robert veut aller de l’avant : "Bien sûr, aujourd’hui, je suis un peu amer. Je suis triste car Sanders ne sera pas le candidat de mon parti mais je l’accepte. Donnez-moi une semaine pour avaler la pilule, et je retournerai parcourir le Maryland, la Pennsylvanie, la Virginie et Washington D.C. pour soutenir Hillary Clinton."