
Jair Bolsonaro à Brasilia le 17 juillet 2025. © Adriano Machado, Reuters
L'ex-président brésilien Jair Bolsonaro a échappé jeudi 24 juillet à la détention provisoire, mais la Cour suprême l'a averti qu'il irait aussitôt en prison s'il enfreignait de nouveau une interdiction de s'exprimer sur les réseaux sociaux.
Jair Bolsonaro, 70 ans, est visé depuis la semaine dernière par une interdiction de s'exprimer sur les réseaux sociaux, directement ou par le biais de tiers, en raison de soupçons de manœuvres pour faire obstruction à son procès pour tentative de coup d'État.
La Cour suprême doit boucler dans les prochaines semaines ce procès. L'ex-chef d'État d'extrême droite (2019-2022) est accusé d'avoir tenté d'empêcher l'investiture de l'actuel président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva, 79 ans, son tombeur aux élections de 2022.
Dans le cadre de l'enquête pour obstruction à la justice, Jair Bolsonaro est contraint depuis vendredi de porter un bracelet électronique, en plus de l'interdiction de réseaux sociaux et d'autres mesures.
"Humiliation maximale"
Le juge Moraes, que Jair Bolsonaro a souvent qualifié de "dictateur", a estimé jeudi qu'une publication du parlementaire Eduardo Bolsonaro relayant une intervention de son père a été "une tentative de contourner" les mesures prises contre le leader du camp conservateur. La publication en question, assortie de critiques du fils Bolsonaro contre la justice, relayait un extrait de vidéo dans lequel l'ancien président, présent lundi au siège du Parlement, montrait pour la première fois devant la presse son bracelet électronique et, sur un ton furieux, dénonçait une "humiliation maximale".
"S'agissant d'une irrégularité isolée et sans information sur d'autres infractions à ce stade", le juge Moraes a cependant écarté pour l'heure en placement en détention provisoire. Mais il a prévenu que tout écart lui vaudrait une détention "immédiate". "La justice est aveugle mais elle n'est pas idiote!", a averti le magistrat dans sa décision.
"C'est une tentative grossière et désespérée de me censurer en utilisant mon père comme otage", a réagi Eduardo Bolsonaro sur le réseau social X, traitant le juge de "tyran lâche". Ce fils Bolsonaro s'est installé il y a quelques mois aux États-Unis, où il plaide auprès de l'administration Trump pour des pressions en faveur de son père.
Donald Trump, modèle de Jair Bolsonaro
Il a eu récemment doublement gain de cause. Modèle de l'ancien président brésilien, Donald Trump a annoncé en juillet des droits de douane supplémentaires de 50 % sur les produits venus du Brésil, justifiant cette mesure punitive par une supposée "chasse aux sorcières" contre Jair Bolsonaro.
Et le département d'État a fait savoir que le juge Moraes et d'autres membres de la Cour suprême étaient privés de visa aux États-Unis.
L'enquête lancée par la haute juridiction brésilienne contre Jair et Eduardo Bolsonaro vise à déterminer si la campagne menée auprès de Washington relève d'une obstruction à la justice.
Le juge Moraes avait donné lundi un délai de 24 heures à la défense de Jair Bolsonaro, sous peine de "prison immédiate" de l'ancien président, pour qu'elle s'explique sur la diffusion de ses déclarations du même jour au Parlement, qui avaient été largement relayées par ses soutiens.
Jair Bolsonaro "n'a en aucun cas été interdit de donner des interviews" et n'a donc "pas enfreint" la décision prise à son encontre, avaient répondu ses avocats. Ils avaient expliqué que l'ancien président n'avait pas été informé de son interdiction de s'exprimer via les plateformes, une mesure qui avait suscité confusion et critiques, au sein de la mouvance bolsonariste mais aussi de la presse et des juristes.
La défense avait donc demandé au magistrat qu'il précise l'étendue des restrictions d'expression auquel l'ex-chef d'État est désormais soumis.
"Aucune interdiction"
Le juge Moraes a répondu jeudi que Jair Bolsonaro n'est soumis à "aucune interdiction" d'accorder des entretiens ou de prononcer des discours. Selon lui, il est uniquement interdit d'utiliser les publications sur les réseaux sociaux comme un "modus operandi" pour faire obstruction à la justice.
Déjà inéligible jusqu'en 2030 pour désinformation sur le système de vote électronique avant le scrutin de 2022, Jair Bolsonaro clame son innocence et se dit victime de "persécution". Si la Cour le juge coupable de tentative de coup d'État, il risque jusqu'à 40 ans de prison.
Avec AFP