Le candidat réformateur Mir Hossein Moussavi et des centaines de milliers de ses partisans ont à nouveau manifesté à Téhéran ce lundi, bravant l'interdiction du gouvernement. Certains journaux contestataires ont été suspendus.
AFP - Des centaines de milliers de partisans de Mir Hossein Moussavi, candidat malheureux à la présidentielle en Iran, ont manifesté pacifiquement lundi à Téhéran pour protester contre la réélection du président iranien Mahmoud Ahmadinejad, malgré l'interdiction du rassemblement.
Mir Hossein Moussavi, qui conteste la victoire du dirigeant ultraconservateur et juge que le scrutin était truqué, participait à la manif
estation juché sur le toit d'une voiture.
S'adressant aux manifestants à l'aide d'un porte-voix, il s'est dit "prêt à participer de nouveau à une élection présidentielle", tandis que son épouse, Zahra Rahnevard, a déclaré à l'AFP qu'ils "iraient jusqu'au bout" pour contester le résultat du scrutin du 12 juin, qui a vu la victoire de Mahmoud Ahmadinejad avec près de 63% des voix.
Le candidat réformateur Mehdi Karoubi participait également au rassemblement, auquel était aussi attendu l'ancien président réformateur Mohammad Khatami, qui veut continuer à protester jusqu'à l'annulation de l'élection présidentielle, selon son frère, Mohammad Reza Khatami.
Le guide suprême, Ali Khamenei, pour qui le résultat du scrutin s'apparente à une "vraie fête", a appelé M. Moussavi, un ancien Premier ministre et un conservateur modéré, à poursuivre sa contestation par la seule voie légale.
"Vous devriez continuer à agir par les voies légales", a-t-il lancé pendant une rencontre dimanche, faisant allusion au dépôt par M. Moussavi d'un recours devant le Conseil des gardiens de la Constitution pour obtenir l'annulation des résultats. Le Conseil doit rencontrer M. Moussavi mardi.
En attendant, des centaines de milliers de manifestants, selon les estimations de l'AFP, occupaient l'essentiel de l'avenue Azadi, qui mesure plus d'une cinquantaine de mètres de large et s'étend sur un peu plus de quatre kilomètres de long.
"Au moins un million et demi de personnes" selon un policier interrogé par l'AFP, "jusqu'à deux millions", selon un autre, se trouvaient sur cette artère principale du centre de Téhéran, lieu traditionnel des manifestations de commémoration de la révolution islamique de 1979.
Les manifestants criaient "mort au dictateur" mais aussi "les Iraniens préfèrent la mort à l'humiliation" ainsi que "Moussavi nous te soutenons" tandis que le réseau des téléphones mobiles dans la zone était coupé.
La police anti-émeute, très discrète, n'est pas intervenue.
De nombreux manifestants arboraient des morceaux d'étoffe verte, la couleur de la campagne électorale du candidat malheureux, sur laquelle on pouvait lire: "Où est mon vote?".
"Ce n'est pas la première fois que je proteste", a dit un manifestant, Mehdi, 40 ans, en "espérant que Moussavi résisterait jusqu'au bout".
Une jeune étudiante de 21 ans, Fahar, a espéré que la police et la milice islamique des bassidjis "se comporteraient de façon civilisée" alors que les affrontements entre manifestants et forces de sécurité ont été parfois très violents samedi et dimanche.
La télévision iranienne a montré de brèves images de la manifestation, dont les agences de presse n'ont pas fait mention. En revanche, la télévision avait amplement couvert la veille celle de soutien au président Mahmoud Ahmadinejad.
Le journal de M. Moussavi, Kalameh Sabz, a été suspendu lundi, selon un autre quotidien.
De leur côté, quelque 200 parents de manifestants arrêtés au cours du week-end ont exigé leur libération devant le tribunal révolutionnaire de Téhéran avant de se disperser pacifiquement.
Le président Ahmadinejad a pour sa part repoussé à mardi une visite prévue lundi en Russie.
Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a souligné que la volonté du peuple devait être respectée alors que l'Union européenne a demandé à l'Iran d'enquêter sur la conduite de l'élection.
Paris et Berlin ont convoqué l'ambassadeur d'Iran et le Premier ministre britannique, Gordon Brown, a affirmé que l'Iran devait répondre aux "questions sérieuses" soulevées par les élections.