L'influent cardinal français Philippe Barbarin, éclaboussé par des affaires de pédophilie dans son diocèse de Lyon, a affirmé vendredi que le pape François lui avait témoigné sa "confiance".
Au terme d'un entretien avec le pape François au Vatican, l'influent cardinal français Philippe Barbarin, empêtré dans des affaires de pédophilie dans son diocèse de Lyon (centre-est), a confirmé, vendredi 20 mai, qu’il allait rester à son poste.
"Si la justice mettait en lumière un grave manquement dans la conduite de ma mission, (une démission) serait effectivement une perspective à envisager. Pour l'heure, ce ne serait pas responsable, ce serait même contraire à mon devoir : on ne quitte pas le navire en pleine tempête !", a indiqué le prélat, l'un des plus influents de l'Église de France, dans un entretien au quotidien Le Figaro.
Selon Mgr Barbarin, le pape lui a "redit sa confiance" au cours de leur entretien au Vatican, tout en estimant que les évêques ayant protégé des pédophiles devaient démissionner. Il lui a également conseillé "d'attendre paisiblement que la justice ait accompli sa mission".
François : "Il n'y a pas de place pour ceux qui abusent des enfants"
François "a d'abord pris le temps d'écouter attentivement. Il semblait très informé de la situation. Il m'a redit sa confiance, sa prière et sa conviction intime : il n'y a pas de place dans le ministère pour ceux qui abusent des enfants, et ce, de façon imprescriptible", a-t-il raconté au Figaro.
Selon le porte-parole du Vatican, Federico Lombardi, l'entretien au Saint-Siège a porté sur la crise qui secoue l'Église catholique de France mais aussi sur des sujets plus pastoraux, comme la préparation du pèlerinage des gens de la rue en novembre à Rome, à l'occasion du Jubilé de la miséricorde, et d'un autre pèlerinage de 300 élus de la région Rhône-Alpes.
Le cardinal Barbarin, l'une des personnalités les plus influentes de la hiérarchie catholique française, est visé par deux enquêtes préliminaires pour "non dénonciation" d'agressions sexuelles commises sur de jeunes scouts entre 1986 et 1991 par un prêtre du diocèse de Lyon, Bernard Preynat. Ce dernier, en activité jusqu'en août 2015, a été mis en examen le 27 janvier après avoir reconnu les faits. Archevêque de Lyon depuis 2002, le cardinal Barbarin nie avoir couvert de tels faits mais a admis en avril "des erreurs dans la gestion et la nomination de certains prêtres".
Si ce soutien accordé par le pape n’est pas une surprise – François avait déjà pris fermement la défense de l'archevêque de Lyon mardi, estimant que sa démission avant l'issue d'un hypothétique procès serait "un contresens" – il a provoqué une vague de déception. Auparavant, des associations de victimes et plusieurs personnalités politiques, dont le Premier ministre français, Manuel Valls, avaient réclamé la démission du cardinal.
"Une fois de plus, les victimes sont laissées de côté"
"On aurait aimé être reçus à la place du cardinal Barbarin, on constate une fois de plus que les victimes sont laissées de côté", a critiqué auprès de l'AFP Bertrand Virieux, l'un des co-fondateurs de l'association lyonnaise "La Parole Libérée". Cette association des victimes de prêtres pédophiles avait écrit au pape en mars pour solliciter une audience privée.
"On n'a jamais reçu de réponse officielle alors qu'on aurait aimé lui expliquer notre vision de l'affaire", a regretté Bertrand Virieux.
Le pape François a créé au Vatican une instance judiciaire pour juger les prêtres pédophiles, mise en place une commission internationale d'experts chargée de proposer des mesures de prévention et rencontré des victimes à Rome et à Philadelphie. Mais le sujet reste tabou dans de nombreux pays, en particulier en Afrique et en Asie, et le pape s'est attiré les foudres d'une partie des fidèles chiliens en confirmant, l'année dernière, la nomination d'un évêque soupçonné d'avoir protégé un prêtre condamné pour des agressions pédophiles.
Avec AFP