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Sur les hauteurs du mont Beuvray, Arnaud Montebourg signe son retour en politique

Fidèle à son traditionnel rendez-vous du lundi de Pentecôte sur le mont Beuvray, l'ancien ministre socialiste Arnaud Montebourg a lancé lundi "un appel" aux Français qui marque son retour sur la scène politique française. Analyse.

Comme tous les ans depuis 2004, Arnaud Montebourg a choisi le lundi de Pentecôte pour effectuer sa traditionnelle ascension du mont Beuvray, au cœur de sa Bourgogne natale, entouré des apôtres de la gauche du Parti socialiste (PS). Un rendez-vous sur les terres mitterrandiennes destiné à frapper les esprits : du haut de la colline du Morvan qui culmine à 821 mètres, le prophète du made in France a lancé, lundi 16 mai, "un appel" aux Français pour leur "proposer dans les mois qui viennent de construire un grand projet alternatif pour la France".

En marche vers la présidentielle ?

Entouré d'environ 200 personnes dont sa compagne, l'ancienne ministre de la Culture Aurélie Filippetti, et plusieurs députés socialistes "frondeurs", l’ancien ministre du redressement productif n’a négligé aucun détail pour obtenir les échos de la presse. La couverture 3G étant plus qu’aléatoire sur les hauteurs du Morvan, une camionnette équipée d’une antenne satellite a été prévue pour que les journalistes puissent relayer les propos de celui qui se présente aujourd’hui comme un simple entrepreneur. Son intervention prévue à 11h30 a également été pensée pour être retransmise dans les journaux télévisés de 13 heures.

Pas d’annonce fracassante en vue d’une éventuelle candidature à l’élection présidentielle de 2017 pour autant. "Il faut dire que toutes les candidatures des personnalités politiques du Parti socialiste sont aujourd’hui suspendues à celle de François Hollande, explique à France 24 Brice Teinturier, directeur général délégué de l'institut de sondages Ipsos. Si François Hollande décide de se représenter, il y a fort à parier qu’aucun membre du PS n’osera présenter sa candidature au risque d’être tenu pour responsable de l’éclatement du parti. Et de poursuivre, "il semble difficile d’imaginer une primaire à gauche si le président Hollande décide de se représenter. Et jusqu’à maintenant, on n’a jamais vu de président en exercice sous la Ve République ne pas se présenter pour effectuer un second mandat… "

Un chemin semé d’embûches

L’exercice de communication ressemblait pourtant à s’y méprendre à un discours de précampagne. En s’adressant "aux économistes, aux entrepreneurs et aux syndicalistes, aux innovateurs, aux chercheurs et aux créateurs, aux scientifiques et aux artistes, et tout simplement aux Français", l’ancien ministre de gauche "tente de rassembler un large front commun qui transcende les traditionnels clivages gauche /droite, analyse de son côté Stéphane Rozès, président de la société CAP (Conseil, Analyse et Perspective) et maître de conférences à Sciences-Po Paris. Il montre là qu’il incarne une nouvelle façon de faire de la politique".

Un discours qui permet surtout de signer son retour politique et de dire "à tous qu’il est toujours là et qu’il faut compter sur lui pour incarner une sensibilité différente", observe Brice Tenturier. Reste que celui qui se présente comme une alternative à François Hollande et Jean-Luc Mélenchon connaît une côte de popularité en berne dans les sondages, analyse le politologue d’Ipsos. "Les Français ne voient pas en lui une alternative crédible."

Des troupes clairsemées

Autre obstacle à surmonter : Montebourg ne "dispose que d’un nombre limité de soutiens, parmi lesquels on trouve les frondeurs", explique le politologue. Même si ces socialistes insoumis ont été galvanisés par leur combat contre la Loi travail et leur tentative presque victorieuse (à deux voix près) de déposer à l'Assemblée une motion de censure de gauche contre le gouvernement, ils ne représentent qu’ "un bataillon très minoritaire au sein du PS".

Le reste de l’aile gauche du parti lui reproche toujours d’être l’un des responsables de la nomination de Manuel Valls à Matignon. Les proches de Martine Aubry, eux, n’ont toujours pas admis qu’il se soit rallié à François Hollande plutôt que la maire de Lille au second tour de la primaire de 2011. De son côté, Benoît Hamon, qui avait dû quitter le gouvernement en même temps que lui après leur coup d'éclat d'août 2014 à Frangy-en-Bresse, a déjà annoncé qu’il pourrait être lui aussi candidat si une primaire est organisée pour 2017.

À l'issue de son discours, l'ex-ministre a une nouvelle fois plaidé, devant la presse, en faveur d'une primaire à gauche, comme le prévoient les statuts du parti. Un conseil national du PS tranchera la question le 3 juin.