
Le Premier ministre, favorable à une loi pour interdire le voile à l'université, a été contredit par le secrétaire d'État en charge de l'Enseignement supérieur. "Il n'y a pas besoin de loi", a estimé ce dernier.
Faut-il interdire le port du voile islamique à l'université ? La question divise au sein du gouvernement français. "Il n'y a pas besoin de loi sur le voile à l'université", a estimé, mercredi 13 avril, le secrétaire d'État à l'Enseignement supérieur Thierry Mandon, se distinguant de son Premier ministre. Manuel Valls a en effet jugé de son côté qu'il "faudrait le faire" dans une interview accordée au journal Libération.
Pour le chef du gouvernement, "il faudrait le faire, mais il y a des règles constitutionnelles qui rendent cette interdiction difficile. Il faut donc être intraitable sur l'application des règles de la laïcité dans l'enseignement supérieur". Et d'estimer que le voile était un asservissement pour la femme "dès lors qu'il est revendiqué politiquement de manière militante".
Si le foulard ne se confond pas avec le voile traditionnel, "fondamentalement, je pense que ce voile identitaire, politique, revendiqué, en cachant la femme, vise à la nier", explique le Premier ministre. "Comment ignorer que les femmes subissent dans les quartiers populaires une pression culturelle faite de sexisme et de machisme ?", s'interroge-t-il.
"Il n'y a pas de contagion du foulard", rétorque Thierry Mandon
Une vision que ne partage pas le secrétaire d'État à l'Enseignement supérieur. "Si j'ai l'occasion de lui en parler, je lui dirai qu'il n'y a pas besoin de loi", a réagi Thierry Mandon interrogé sur RTL. "Ce que je vois sur le terrain, ce que me disent tous les présidents d'université, c'est qu'il n'y a pas de problème."
"Il n'y a pas de contagion du foulard", a-t-il relativisé. "Il y a des étudiantes qui ont tout à fait, parce qu'elles sont adultes, le droit de garder un foulard, le foulard n'est pas interdit dans la société française."
"Quand on est usager d'un service public on a le droit d'avoir un foulard, on peut en penser ce qu'on veut, mais ce droit existe", a poursuivi le secrétaire d'État. Et de conclure : "Je pense qu'il n'y a pas besoin de ce texte".
En décembre 2015, l'Observatoire de la laïcité, une commission d'experts qui dépend de Matignon, avait estimé qu'il n'était "ni utile ni opportun" de légiférer sur le port de signes religieux, dont le foulard islamique, par les étudiants.
L'état des lieux dressé par l'Observatoire révélait "une situation globale respectueuse de la laïcité", avec seulement 130 cas de "désaccords ou conflits ponctuels" lui ayant été remontés, pour un total de 130 universités et établissements, rassemblant environ 2 millions d'étudiants.
Ces situations conflictuelles ne concernaient pas que le port du voile, mais aussi la question de l'adaptation du calendrier universitaire à l'observance du shabbat ou de fêtes, la contestation d'enseignements pour des motivations religieuses ou encore la présence ostensible de Bibles sur des tables de candidats lors d'examens.
Avec AFP