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TPIY : Jugé coupable de génocide et de crimes de guerre, Karadzic est condamné à 40 ans de prison

L'ancien chef politique des Serbes de Bosnie Radovan Karadzic a été jugé coupable de génocide à Srebrenica, de crime de guerre et de crime contre l'humanité pendant la guerre de Bosnie. Il a été condamné par le TPIY à 40 ans de prison.

Coupable. Le jeudi 24 mars, après six ans de procès, Radovan Karadzic a été jugé coupable du génocide de Srebrenica et de neuf autres accusations de crimes contre l'humanité et crimes de guerre pour son rôle dans la guerre de Bosnie, qui a fait 100 000 morts et 2,2 millions de déplacés entre 1992 et 1995. Le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) l’a condamné à 40 ans de prison.

"Radovan Karadzic, la cour vous condamne à 40 années de détention", a asséné le juge O-Gon Kwon, en présence de l’accusé et d’associations de victimes qui attendaient, pour certaines, ce verdict depuis plus de 20 ans.

À 14 heures exactement à La Haye, le juge O-Gon Kwon a commencé à lire le verdict. Égrenant les 11 chefs d’accusation retenus contre l’ancien chef politique des Serbes de Bosnie, le juge a commencé par rejeter l'une des deux accusations de génocide, dans sept municipalités de Bosnie. "La chambre n'a pas été capable, sur la base des preuves présentées, d'identifier une intention de génocide de la part de l'accusé", a affirmé le juge O-Gon Kwon. "L'accusé ne peut être tenu responsable de génocide sous le chef d'accusation numéro 1".

Coupable de génocide à Srebrenica

L’ancien psychiatre en revanche été reconnu coupable de crime contre l’humanité pour  le  siège de Sarajevo. Pendant 44 mois, la capitale bosniaque a été prise sous les bombes et les tirs de snipers qui ont tué plus de 10 000 personnes – dont 1 500 enfants. Il est également jugé coupable de crime contre l’humanité pour les  meurtres,  les persécutions et les prises d'otages commises dans plusieurs villages de Bosnie.  L’accusation de crime contre l’humanité a aussi été retenue pour sa politique "de nettoyage ethnique".

Autre verdict très attendu : celui concernant le massacre de Srebrenica, cette "zone de sécurité" sous protection théorique de l’ONU,  où 8 000 musulmans de Bosnie, hommes et adolescents, ont été tués par les séparatistes bosno-serbes en juillet 1995. Le juge a reconnu Radovan Karadzic coupable de génocide à Srebrenica, déclarant que l'ancien chef politique des Serbes de Bosnie avait ordonné la prise de la ville et donné son accord pour la tuerie, avec l’intention "d’éliminer" cette population. Il a enfin été reconnu de crime de guerre pour la prise en otage de casques bleus. 

"À Srebrenica, Karadzic a planifié puis mis en œuvre une purification ethnique en tuant systématiquement les hommes, puis les femmes, avec l’aide de Ratko Mladic. Ce dernier a opéré un tri entre les hommes, les femmes et les enfants, sous le regard des casques bleus qui sont là mais qui n’ont pas de mandat pour intervenir alors que ces hommes et ces femmes vont tout droit à la mort", rappelle Gauthier Rybinski, chroniqueur international pour France 24.

Un jugement "important" mais insatisfaisant pour nombre de victimes

Ce verdict ne satisfait pas cependant pas entièrement les victimes, présentes en nombre dans la salle. "L’enjeu était de savoir si les juges décideraient s’il y a eu génocide ailleurs qu’à Srebrenica, notamment dans la région de Prijedor où beaucoup de civils ont été assassinés. Mais ils ont estimé qu’il n’y avait pas génocide mais crimes contre l’humanité", souligne Stéphanie Maupas, correspondante de France 24 à La Haye.

Malgré la déception d’une partie des victimes, le Haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme Zeid Ra'ad al-Hussein a préféré retenir le caractère "historique" de ce verdict qu’il a qualifié d'"extrêmement important". "Le déguisement utilisé par Radovan Karadzic pendant ses 14 années de fugue a été retiré, le verdict prononcé aujourd'hui lève le voile qui dissimulait ses manipulations politiques, et le révèle tel qu'il était : l'architecte d'actes de destructions et de meurtres à grande échelle", a-t-il déclaré à l’issue de la séance.

Radovan Karadzic peut encore faire appel de cette décision, ce qui risque probablement d'arriver, estime Stéphanie Maupas. "Mais si c'était le cas, cela prendrait des années", estime la journaliste. Entre temps, celui qui est considéré comme l'une des figures les plus sanguinaires de la guerre de Bosnie continuera de purger sa peine en prison.