logo

Chine : la province du Zhejiang fait la chasse aux croix chrétiennes trop voyantes

Arrêté pour s’être opposé à la démolition de la croix surplombant son église, un pasteur chinois vient d'écoper de 14 ans de prison pour "fraude fiscale". Une message de grande fermeté envoyé par les autorités locales aux chrétiens de la région.

Bao Guohua, célèbre pasteur de la province du Zhejiang, à l'est de la Chine, et sa femme, Xing Wenxiang, ont été arrêtés en juillet dernier par les autorités chinoises. Leur tort : ils avaient publiquement dénoncé une campagne de démontage des croix surmontant les églises chrétiennes menée par les autorités locales.

Depuis 2014, les règlements provinciaux exigent en effet que les croix soient désormais placées sur la façade des édifices religieux, et non plus à leur sommet, et que leur hauteur ne dépasse pas un dixième de celle du bâtiment. Cette nouvelle politique s’inscrit dans le cadre d’une campagne intitulée "Trois rectifications pour une démolition".

"Officiellement, cette opération vise à ‘embellir’ la province [du Zhejiang] en supprimant les aspects disgracieux des structures illégalement construites. Mais les chrétiens et les défenseurs des droits de l’Homme dénoncent, quant à eux, une vaste opération de répression visant les lieux de culte chrétiens et en particulier les croix dressées sur les édifices, dans le but de stopper la croissance des églises dans la région", a expliqué de son côté l’agence d’information Églises d’Asie, sur son site internet.

Dix autres personnes condamnées

Durant leur procès, les époux n’ont pas été inculpés sous un chef d’accusation religieux mais…. fiscal. Le tribunal chinois a en effet condamné Bao Guohua à 14 ans de prison pour détournement de fonds, opérations commerciales illégales et dissimulation d'informations comptables, a-t-on appris auprès des médias locaux, lundi 29 février.

Sa femme Xing Wenxiang a, elle, été condamnée à 12 ans d'emprisonnement. D'après China Aid, une association basée aux États-Unis, Bao Guohua et son épouse ont été obligés de récuser leurs avocats avant le procès. Leurs biens ont été saisis, d'après les médias chinois.

Dix autres personnes ont été condamnées à des peines de prison dans le cadre de cette affaire, ont rapporté le journal Zhejiang Daily et la télévision locale, sans préciser leur durée.

"Nouvelle inquisition"

Selon Le Monde, la communauté chrétienne de cette région fait face à la "nouvelle inquisition communiste menée par les dirigeants de la province pour plaire au président Xi Jinping, dont le Zhejiang fut le fief au milieu des années 2000". Les chrétiens de la ville de Whenzou, dans le Zheijang, "[seraient allés] trop loin dans [leur] ferveur pour une religion qui reste éminemment suspecte dans le nouveau climat de reprise en main idéologique."

>> À lire sur les Observateurs de France 24 : "Une chaîne humaine pour défendre une église chinoise"

Ce n’est pas la première fois que les chrétiens sont dans le collimateur des autorités chinoises. Le plus célèbre des avocats des pasteurs et militants chrétiens du Zhejiang, Zhang Kai, est détenu au secret depuis août 2015.

En 2014, les autorités de la ville de Wenzhou avaient démoli la monumentale église de Sanjiang, au motif que sa construction n'avait pas respecté les règles.

La Chine compte quelque 5,7 millions de catholiques et 23 millions de protestants, selon des chiffres du Bureau des affaires religieuses datant de 2014. Mais avec l'"église souterraine" prospérant en dehors des organisations officielles, la communauté chrétienne chinoise pourrait au total comprendre quelque 60 millions de personnes, selon certaines estimations.

Avec AFP