Lors de sa visite au musée du Capitole de Rome lundi 25 janvier, le président iranien Hassan Rohani n'a vu aucune des statues dénudées, dissimulées derrière des paravents. Une initiative du musée qui a fait polémique dans la péninsule.
Autocensure trop zélée ou protocole diplomatique ? À l’occasion de la visite du président iranien Hassan Rohani, lundi 25 janvier, le célèbre musée du Capitole à Rome a dissimulé toutes ses statues dénudées derrière des paravents en bois. Une initiative prise par respect pour la culture et la sensibilité de l'Iran.
Selon des sources iraniennes, citées par le Corriere della Sera, les Vénus aux seins nus et autre Éros en tenue d’Adam n’auraient pas obtenu l’aval d’une inspection préalable de la délégation diplomatique iranienne. Une information démentie mercredi 27 janvier par le président iranien lui-même qui a assuré que Téhéran n'a jamais contacté Rome à ce sujet, ni donné d'instruction en ce sens. Pour autant, il dit avoir "apprécié l'accueil qui lui a été réservé" en Italie. “Les Italiens sont très accueillants, ce sont des gens qui font le maximum pour mettre leurs invités à l’aise et je les remercie pour cela”, a-t-il declaré.
En accueillant son hôte lundi dans ce site prestigieux où de nombreux accords ont été signés, le président du Conseil italien, Matteo Renzi, avait mis l'accent sur la richesse historique des deux pays, assurant qu'ils avaient en commun d'être "deux superpuissances de la beauté et de la culture".
"Che vergogna !"
L'"attention" du musée italien en a surpris, voire agacé plus d’un. Le ministre de la Culture lui-même, Dario Franceschini, a jugé cette initiative "incompréhensible", précisant que ni lui, ni le Premier ministre ne l’ont autorisée. "Je pense qu’on aurait facilement pu trouver d’autres solutions pour ne pas offenser un important visiteur étranger plutôt que de faire ce choix incompréhensible de recouvrir les statues", a-t-il déclaré à la presse mercredi.
Certaines personnalités politiques avaient dénoncé une "soumission culturelle", tandis que de nombreux titres de presse avaient également affiché leur colère. Dans un tweet mardi, le quotidien de gauche L’espresso a déclaré : "Quelle honte d’avoir couvert les statues du Capitole pour la visite de Rohani".
Le journal libéral Il foglio a lui titré sur "L’Italie met des burqas à ses statues", tandis que le parti anti-immigrés de la Ligue du Nord a dénoncé un "énième acte de soumission à une culture qui ne nous appartient pas. Le gouvernement semble avoir honte de nos racines et de notre histoire. Faut-il mettre le hijab aussi aux œuvres d'art au nom de l'intégration ?"
Cette indignation a fait sourire les Radicaux: "Il y a seulement sept mois, toujours ‘par respect’, les affiches de l'exposition de Tamara de Lempicka ont été couvertes pour la visite du pape dans notre ville laïque de Turin. Personne ne s'en était scandalisé".
L'Italie met de l'eau dans son vin
Toujours par "respect" et pour ménager la sensibilité de son hôte, l’Italie a également accepté de bannir le vin d’un déjeuner avec le président Sergio Matterella, et d'un dîner avec Matteo Renzi, la consommation d’alcool étant prohibé par l’islam.
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Si l’Italie a accepté de mettre de l’eau dans son vin, la France s’était de son côté montrée plus intransigeante sur son patrimoine culturel spiritueux. Le 17 novembre, Hassan Rohani devait être reçu par François Hollande – une visite finalement repoussée au jeudi 28 janvier à cause des attentats de Paris. Mais lorsque le protocole s’agitait encore dans l’ombre début novembre pour organiser la rencontre, l’Iran avait demandé un menu halal et la suppression des bouteilles d’alcool à table.
La France avait indiqué qu’elle n’accèderait pas à cette requête, l’usage voulant qu’une sélection de vins français soit proposée au cours de repas officiels organisés à l’Élysée. L’idée d’un petit déjeuner avait alors été évoquée, mais rejetée par Téhéran. Finalement, deux mois après, il semblerait que tout repas ait été écarté. Hassan Rohani sera reçu à l’Élysée par François Hollande et Laurent Fabius à ...15 heures, pas même à l’heure du goûter.