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Le virus Zika est devenu en quelques semaines l’ennemi sanitaire numéro 1 au Brésil et plus largement en Amérique du Sud. Le lien avec une multiplication de naissances de nourrissons atteints d’une déformation neurologique inquiète les autorités.

Le carnaval de Rio approche à grand pas et, en août, la métropole brésilienne accueillera les Jeux olympiques. Le tout dans un climat de psychose national nourri par un virus dont l’extension semble incontrôlable : le Zika. Cette maladie, transmise par les moustiques tigres, est soupçonnée d’être à l'origine de 3 893 cas de microcéphalie constatés sur des nouveau-nés (crâne de taille anormalement petit ce qui nuit au développement intellectuel) rien qu’au Brésil.

Depuis plusieurs semaines, l’épidémie a conquis de nouveaux territoires et s’étend désormais à 21 pays en Amérique du Sud. L’Organisation mondiale de la santé a prévu, lundi 25 janvier, que le virus s’installerait dans tous les pays du continent “sauf le Canada et le Chili” qui n'ont pas encore de moustique tigre sur leur sol.

Les autorités de plusieurs États touchés ont, ces derniers jours, conseillé aux femmes de ne pas tomber enceintes. Une consigne critiquée par des ONG de défense de droits de femmes qui en dit long sur le désarroi des pays concernés face à un virus qui, jusqu’à récemment, était considéré comme inoffensif.

Le Zika, une maladie nouvelle ? Le virus ne vient pas d’être découvert à la faveur d’une vague, sans précédent, au Brésil de naissances de bébés atteints de microcéphalie dont les mères ont souffert de zika pendant leur grossesse. Le virus a, en fait, été identifié pour la première fois en 1947 dans la forêt Zika, en Ouganda, sur des singes. Les premiers cas d’hommes infectés remontent à 1952 en Ouganda et Tanzanie. “Il a longtemps été considéré comme un virus présent uniquement en Afrique et en Asie où se trouvait le moustique tigre”, rappelle Frédéric Simard, spécialiste des maladies infectieuses au CNRS.

Qui est Aedes aegypti ? C’est le nom scientifique du moustique tigre, un petit insecte de 5 mm de long dont la piqure peut transmettre le virus du Zika. Avant l’épidémie actuelle, l’Aedes aegypti était surtout redouté parce qu’il était aussi responsable de la transmission de la dengue et du chikungunya.

Son terrain de jeu a longtemps été uniquement l’Afrique et l’Asie. Mais depuis une trentaine d’années, il voyage à la faveur de la mondialisation des échanges et du tourisme. Le moustique tigre a, ainsi, trouvé en Amérique du Sud un climat tropical propice a son développement, si bien que “sa population y croit très rapidement”, note le spécialiste du CNRS.

Pourquoi parle-t-on autant du Zika aujourd'hui ? La vague actuelle de cas de zika souligne une dangerosité qui était jusqu’alors méconnue. “80 % des patients souffrent d’une faible température (38°C). Le virus n’était donc pas considéré comme une menace”, explique Frédéric Simard.

L’explosion des cas en Amérique du Sud a mis en évidence d’autres symptômes potentiels. Les naissances d’enfants atteints de microcéphalie ont choqué l’opinion publique, mais “il n’y pas de preuve définitive que le Zika, contractée par la mère enceinte, est la cause de cette malformation”, tient à rappeler Frédéric Simard qui fait ainsi écho à la position de l’Organisation mondiale de la santé. “Tout ce dont on est sûr, c'est que le virus favorise la microcéphalie”, ajoute-t-il.

“Un faible pourcentage de patients va aussi souffrir d’une conséquence neurologique, le syndrome Guillain-Barré se traduisant par une paralysie [partielle ou totale, NDLR] temporaire de quelques semaines ou mois”, note le virologue du CNRS. En clair, c’est la virulence de l’épidémie qui a permis de faire des liens plus précis entre les cas de microcéphalie ou de syndrome de Guillain-Barré et le zika.

Pourquoi l’épidémie est-elle si forte ? Le Brésil, dont le climat tropical sied aux moustiques, offre un terreau “extrêmement propice” à la propagation de la maladie. “Il est très difficile de contrôler le moustique Aedes aegypti à Rio, où un tiers de la population vit dans les favelas avec de nombreux foyers de prolifération [comme les eaux stagnantes]”, explique Roberto Medronho, épidémiologiste à l’Université de Rio.

Il souligne aussi une urbanisation désordonnée et des programmes de contrôles de “faible efficacité” qui se retrouvent dans d’autres pays du sous-continent et dans les Caraïbes.

La France est-elle à l’abri ? À partir du moment où le moustique tigre a été repéré dans un pays, le risque de propagation du virus Zika existe. L’aedes aegypti s’est installé en France en 2003 et il a déjà causé 8 cas de dengue et 12 de chikungunya dans le sud de l'Hexagone.

À quand le premier cas de Zika sur le territoire nationale ? Des patients ont peut-être déjà été touchés par cette maladie en France, mais devant la faiblesse des symptômes, ils n’ont pas jugé utile de consulter un médecin (une légère fièvre pendant quelques jours). Le Haut Conseil de la santé publique s’y prépare en tout cas : il a mis en ligne, en octobre 2015, un rapport qui résume les modalités de prise en charge des personnes atteintes par ce virus.

Comment se traite le Zika ? “Il n’y a ni vaccin, ni traitement”, affirme Frédéric Simard. Dans la grande majorité des cas, ce n’est pas un problème puisque le Zika n’est pas plus dangereux qu’une simple grippe. Le meilleur moyen, notamment pour les femmes enceintes, d’y échapper reste d’éviter d’être piqué par un moustique…