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L'Union européenne menace de sanctionner la Pologne qui a adopté la semaine dernière une loi jugée liberticide pour la presse. Les dirigeants des médias publics seront désormais choisis et révoqués par le gouvernement.
Dimanche 3 janvier, le commissaire européen au Numérique, l'Allemand Günther Oettinger, a menacé Varsovie d'enclencher une procédure inédite pour violation des valeurs fondamentales de l'Union européenne. Il reproche à la Pologne d'avoir adopté une loi soumettant les médias publics au contrôle du parti conservateur au pouvoir.
"Beaucoup de choses plaident pour que nous activions le ‘mécanisme d'État de droit’ et que nous placions Varsovie sous surveillance", a déclaré Oettinger à l'édition dominicale du journal allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ).
Dans un communiqué, un porte-parole de la Commision européenne a d'ores et déjà annoncé que le président Junker a fixé au 13 janvier la tenue d'un débat "sur la situation de l'État de droit en Pologne".
Mercredi et jeudi, les députés et sénateurs polonais ont approuvé une loi controversée qui met fin aux mandats des dirigeants de la télévision et de la radio publiques. C'est désormais le ministre du Trésor - le parti au pouvoir, donc - qui aura la compétence de nommer et de révoquer les nouveaux chefs des médias publics. Jusqu'à présent, ils étaient choisis selon une procédure supervisée par le Conseil national de l'audiovisuel (KRRiT).
"Rationaliser et baisser les frais de gestion"
Selon PiS, le parti conservateur au pouvoir depuis deux mois, ces changements conduiront "à rationaliser et à baisser les frais de la gestion des sociétés de radio et télévision publiques, ainsi qu'à retrouver les standards professionnels et éthiques nécessaires pour réaliser la mission publique". Pour l'opposition polonaise, il s'agit tout simplement d'une prise de contrôle direct de ces médias par le pouvoir.
Si la Pologne, dans le viseur de l'UE, ne réagit pas aux propositions de changements formulées par la Commission européenne, cette dernière pourra donc entamer une "procédure pour atteinte aux valeurs fondamentales européennes", explique le journal FAZ. "Cela ne s'est pas encore produit mais" les sanctions prononcées peuvent "aller jusqu'au retrait (au pays incriminé) du droit de vote" au sein du Conseil européen.
"Un directeur (de radio ou de télévision publiques) ne peut pas être licencié sans raisons. Ce serait arbitraire", a insisté Günther Oettinger. "La liberté et le pluralisme des médias sont cruciaux [...] dans un État respectueux des valeurs communes [de 'UE]", a indiqué de son côté le vice-président de la Commission européenne Frans Timmermans.
Démission de plusieurs patrons de chaînes
Les patrons de plusieurs chaînes de la télévision publique TVP ont présenté leur démission, juste après l'adoption de la loi, notamment les directeurs de deux chaînes généralistes TVP1 et TVP2, ainsi que les responsables de la chaîne culturelle TVP Kultura, de l'Agence d'informations TAI et du bureau des ressources humaines de la TVP.
L'approbation de cette loi a suscité un tollé international. Plusieurs organisations de médias comme l'Union européenne de Radio-Télévision (UER/EBU), l'Association des journalistes européens (AEJ) et Reporters sans frontières (RSF) ont exprimé leur "indignation" face à ces dispositions, et le vice-président de la Commission européenne a demandé des explications à Varsovie.
Dans une lettre au ministre polonais de la Culture, l'Association des journalistes européens s'est déclarée "profondément préoccupée". Ces changements "placeront la télévision et la radio publiques sous contrôle direct du gouvernement, impliquant le licenciement pour des raisons politiques de journalistes respectés, et conduiront à une ingérence éditoriale systématique dans le contenu des émissions, en faveur de l'actuel gouvernement", a affirmé l'association, une ONG reconnue par l'Unesco et le Conseil de l'Europe.
Avec AFP