Lors de la Cop21, l’accord final a été repoussé vendredi de 24 heures, après une nuit de négociations très difficiles. En cause : la résistance farouche de plusieurs pays.
"Évidemment, nous n’allions pas avoir de COP sans crise". C’est avec un sourire mi-figue, mi-raisin que Matthieu Orphelin, porte-parole de la Fondation Hulot , est revenu, vendredi 11 décembre, sur une nuit de négociations "très difficile" et un nouveau projet d’accord qui "comporte des avancées, mais aussi des blocages".
Conséquence directe de ces crispations de dernière minute : il n’y aura pas d’accord final avant samedi matin , a déclaré Laurent Fabius, président de cette COP21. Pourtant, le document de travail, qui ne compte plus que 27 pages, reflète un consensus sur des points très débattus depuis le début de la conférence sur le climat. Après deux nuits blanches, tout le monde est notamment tombé d’accord sur le chapitre des financements, pour la période après 2020. Les négociateurs ont par ailleurs accepté qu’un paragraphe séparé traite de l’adaptation des pays les plus exposés aux conséquences des changements climatiques.
Et l’objectif à plus long terme visant à limiter la hausse des températures à 1,5°C avant la fin du siècle apparaît même dans le document alors qu’au départ, des pays comme les États-Unis ou le Canada ne voulaient pas en entendre parler. "Ce sont des points très importants et positifs pour nous, les petits pays", assure à France 24 l’un des délégués d’un État insulaire, souhaitant conserver son anonymat. "En fait, les négociateurs sont d’accord sur 90 % du texte qui devrait être adopté dans la journée de vendredi", a même affirmé à France 24 un officiel de l’ONU.
"Discussions très chaudes"
Mais si tout va bien, qu’est-ce qui empêche tout le monde de sabrer le champagne climatique ? "Les intérêts nationaux priment encore trop souvent sur la solidarité", résume Matthieu Orphelin. Plusieurs pays ont ainsi campé sur des positions très dures pendant la nuit de négociations, qui s’est achevée à 6 heures du matin. "Les discussions ont été très chaudes", confirme un délégué. Face à l’instransigeance de certains pays, l’homme qui, la veille, avait déjà passé une nuit blanche, a quitté la table des négociations avant minuit.
L’ Arabie saoudite et l’Irak continuent ainsi de bloquer toute référence possible à un prix carbone, qui vise à rendre les produits issus de l'exploitation d'énergies fossiles plus chers, comme solution à la réduction des émissions de CO2. Le représentant saoudien affirme que cela reviendrait à instaurer une sorte d’impôt sur le pétrole. Les pays pétroliers voient aussi d’un très mauvais œil la référence au 1,5°C qui obligerait le monde à accélérer la transition énergétique, rendant l’or noir beaucoup moins lucratif.
La Chine et l’Inde rejettent les objectifs de réduction des émissions
Autre coup de gueule, celui de la Chine et de l’ Inde . Ces deux puissances asiatiques ne veulent pas d’un cycle de révision qui leur impose avant 2020 des nouveaux objectifs toujours plus ambitieux de réduction des émissions de CO2. Ces États veulent pouvoir adapter leur politique énergétique en fonction de leurs besoins de développement.
Du côté des pays dits "riches", le Japon et la Suisse ont déploré des obligations de financements trop contraignants pour les pays développés. Les États-Unis, quant à eux, prennent avec des pincettes l’article sur les "pertes et dommages", très important aux yeux des États vulnérables. Ils ne veulent pas que le texte fasse référence à des concepts comme la responsabilité des États développés dans les dégâts provoqués par le réchauffement climatique, et la compensation, par ces États riches, des pays qui subissent de plein fouet les conséquences de la hausse des températures. "Le Congrès [où les républicains sont majoritaires, NDLR] n’acceptera jamais ça", a fait savoir le représentant de Washington à la table des négociations.