Par 397 voix contre 223, les députés britanniques ont autorisé, mercredi soir, des frappes aériennes en Syrie contre le groupe État islamique. Une décision qui ne fait pas l'unanimité au sein de l'opinion publique.
Après plus de 10 heures d'un débat passionné, le Parlement britannique a voté, mercredi 2 décembre au soir, à une confortable majorité, en faveur de frappes aériennes en Syrie contre le groupe État islamique (EI). Les députés britanniques répondaient aux appels des alliés du Royaume-Uni, après les attaques de Paris qui ont fait 130 morts.
Le vote a été acquis par 397 voix pour, 223 voix contre, montrant que de nombreux députés travaillistes se sont joints aux députés conservateurs du Premier ministre David Cameron.
"Nous devons répondre à l'appel de nos alliés", avait plaidé ce dernier dans une Chambre bondée. "L'action que nous proposons est légale, nécessaire et c'est la bonne chose à faire pour la sécurité de notre pays", a-t-il martelé. Selon lui, la contribution militaire du pays pourrait "faire une vraie différence", grâce à l'utilisation de missiles Brimstone notamment.
Le Parlement britannique avait une première fois rejeté, en 2013, des frappes aériennes contre le régime de Bachar al-Assad en Syrie, échaudé par les opérations en Afghanistan et en Irak en 2003, lancées sous l'ex-Premier ministre travailliste Tony Blair.
"Nous ne sommes pas en 2003. Nous ne devons pas utiliser les erreurs du passé comme excuse à l'indifférence et à l'inaction", a plaidé David Cameron.
Jeremy Corbyn laisse le choix aux travaillistes
Le leader pacifiste du Labour Jeremy Corbyn, bien qu'opposé aux frappes, avait décidé de ne pas imposer de consigne de vote pour éviter une rébellion ouverte de ses troupes, pouvant perdre au passage son autorité de chef de parti.
Evan O’Connell, membre du Parti travailliste, a jugé sur France 24 que Jeremy Corbyn avait fait "un très bon choix" en laissant décider les parlementaires travaillistes. Evan O’Connell, qui n'est pas député, a précisé sa position quant à d’éventuels bombardements de son pays en Syrie : "Je suis pour les frappes si et seulement si ces frappes se font dans le cadre d’une stratégie plus globale, d’une coordination avec tous les pays acteurs et avec l’assurance que les frappes ne soient pas utilisées par la Syrie comme le sont les frappes russes."

Le soutien de l'opinion publique, fort au lendemain des attentats meurtriers à Paris, est en recul : d'après un sondage de l'institut YouGov, publié mercredi, 48 % des sondés soutiennent une intervention en Syrie, contre 59 % une semaine auparavant.
Jeremy Corbyn a d'ailleurs accusé le gouvernement de précipiter le vote avant que l'opinion publique ne se retourne complètement. "Étendre les frappes aériennes britanniques ne va probablement pas faire de différence", a-t-il estimé, mettant en doute leur légalité et craignant qu'elles ne provoquent surtout des pertes civiles.
En début de soirée, quelque 200 manifestants se sont allongés par terre devant le Parlement, bloquant toute une rue, pour une action censée simuler la mort de civils sous les bombes britanniques. "Ne bombardez pas la Syrie !" "Nous voulons la paix !", ont scandé les quelque 2 000 manifestants présents, qui sont restés devant le Parlement jusqu'au vote tard dans la soirée, et ont hué son résultat.
Des frappes peut-être dès jeudi soir
Selon le ministre des Affaires étrangères Philip Hammond, interrogé sur Channel 4, les frappes devraient intervenir "très rapidement (...) probablement pas ce soir, mais peut-être dès demain soir", les avions britanniques effectuant déjà des vols de reconnaissance au-dessus de la Syrie.
La Grande-Bretagne dispose déjà de huit Tornados GR4 basés à Chypre et d'un nombre indéfini de drones qui participent à des frappes en Irak depuis l'an dernier.
La décision des frappes ne fait pas l'unanimité dans le pays, et même le quotidien conservateur "Times" publiait jeudi un éditorial de Matthew Parris relevant amèrement que la seule justification donnée était "que la Grande Bretagne ne doit pas rester de côté", sans tirer les leçons de l'Irak et la Libye, où une victoire militaire a été suivie du chaos par manque de préparation sur l'après intervention.
Avec AFP