Le porte-parole de l'autorité judiciaire iranienne a annoncé dimanche la condamnation à une peine de prison du correspondant du "Washington Post", Jason Rezaian, accusé d'espionnage en Iran. Il n'a pas précisé la durée de cette peine.
Après plusieurs mois de flou juridique, un tribunal iranien a prononcé une peine de prison, d'une durée non révélée, contre le journaliste Jason Rezaian, correspondant du "Washington Post" en Iran, rapporte dimanche 22 novembre l'agence de presse officielle Irna qui cite le porte-parole des affaires judiciaires iranien. Le reporter irano-américain avait été arrêté il y a plus d'un an pour espionnage.
"Une peine de prison figure dans la condamnation de Jason Rezaian mais je ne peux donner de détails", a annoncé le porte-parole des affaires judiciaires, Gholamhossein Mohseni Ejei, lors de son point de presse hebdomadaire. Le 11 octobre, il avait déclaré que le tribunal reconnaissait le journaliste coupable sans plus de précision, et il avait ajouté que ce dernier avait 20 jours pour faire appel.
"Il n'a rien fait de mal"
Réagissant à la condamnation de son correspondant par un communiqué, le responsable du service étranger du "Washington Post", Douglas Jehl, a estimé dimanche que le procès et la peine de Jason Rezaian n'étaient qu'une "mascarade" et il a demandé la libération immédiate du journaliste. "Chaque jour que Jason passe en prison est une injustice" car "il n'a rien fait de mal", a ajouté Douglas Jehl. Il note qu'après "488 jours de prison, l'Iran n'a apporté aucune preuve" concernant les accusations contre lui. "Son procès et sa condamnation sont un simulacre et il devrait être libéré immédiatement", conclut-il.
Jason Rezaian, 39 ans, a été arrêté le 22 juillet 2014 à son domicile en compagnie de son épouse, Yeganeh Salehi, qui a par la suite été remise en liberté. Son procès à huis clos s'est achevé il y a trois mois. Le journaliste a été notamment accusé d'avoir "collaboré avec des gouvernements hostiles" et d'avoir diffusé de la propagande contre le régime iranien.
Victime d'une guerre politique
Depuis le début de l'affaire, le "Washington Post" n’a cessé de contester les accusations d'espionnage portées contre son journaliste. En octobre, le quotidien américain affirmait que l’opacité des déclarations iraniennes étaient bien la preuve que le cas de Jason Rezaian était prisonnier d’enjeux qui le dépassent.
D’après plusieurs analystes iraniens, le journaliste est l’otage d’une guerre politique entre le président modéré Hassan Rohani et la frange des ultraconservateurs iraniens. La véritable raison de l’arrestation du journaliste tiendrait à ses liens étroits avec le gouvernement réformateur iranien, ont expliqué plusieurs de ses collègues sous couvert d’anonymat au "New York Times".
"Les adversaires politiques du président iranien, qui le jugent trop conciliants à l’égard de l’Occident pourraient être responsables de l’arrestation de M. Rezaian", analyse le correspondant du "New York Times" à Téhéran, citant ces même sources anonymes. "Ces adversaires auraient vu l’opportunité d’embarrasser ainsi M. Rohani en emprisonnant un journaliste irano-américain perçu comme proche de son gouvernement", ajoute-il.
"Alors que partout ailleurs, cultiver ses contacts avec des sources gouvernementales est une pratique courante du journalisme, en Iran cela a tendance à être perçu comme un comportement suspicieux. Les journalistes étrangers sont fréquemment accusés d’espionnage", conclut le "New York Times".
Possible échange de prisonniers
Washington et Téhéran n'ont officiellement plus de liens diplomatiques depuis la crise des otages de 1979 mais l'accord sur le nucléaire iranien du 14 juillet dernier est censé faciliter un dégel relatif dans leurs relations.
Fin septembre, le président iranien Hassan Rohani avait déclaré que son pays était prêt à un échange de prisonniers avec Washington, qui verrait la libération d'Iraniens détenus aux États-Unis contre celle d'Américains incarcérés en Iran, dont le journaliste du "Washington Post". Mais un responsable iranien avait par la suite rejeté l'idée d'un échange de prisonniers.
Avec AFP et Reuters