Deux attentats-suicides revendiqués par l'EI ont frappé jeudi le fief du mouvement chiite libanais Hezbollah à Beyrouth. L'attaque, qui a fait au moins 43 morts, est l'une des plus meurtrières depuis la fin de la guerre civile au Liban en 1990.
Le Liban observe, vendredi 13 novembre, une journée de deuil national au lendemain du double attentat ayant fait au moins 43 morts dans la banlieue sud de Beyrouth. Une attaque contre le fief du Hezbollah chiite que le groupe jihadiste sunnite État islamique (EI) a revendiquée.
itLes deux organisations se font la guerre en Syrie voisine, déchirée par un conflit de plus en plus complexe qui a fait depuis 2011 plus de 250 000 morts. L'attaque de jeudi, qui a aussi fait près de 200 blessés, est la plus sanglante contre un bastion du Hezbollah depuis son implication début 2013 dans le conflit en Syrie au côté du régime de Bachar al-Assad, et l'une des plus meurtrières au Liban depuis la fin de la guerre civile (1975-1990).
it"J'ai cru que c'était la fin du monde"
Jeudi en fin d'après-midi, deux hommes ont successivement fait détoner leurs ceintures explosives dans une rue commerçante bondée du quartier de Bourj al-Barajné, selon l'armée. Un troisième "terroriste" qui n'a pu faire exploser sa ceinture a été retrouvé mort, a-t-elle ajouté.
Un photographe de l'AFP a vu des corps ensanglantés dans des magasins pulvérisés et des flaques de sang au milieu de voitures détruites par les explosions. "La technique employée est tristement classique : une première explosion qui attire un certain nombre de personnes venus porter secours aux victimes et une seconde explosion une trentaine de mètres plus loin, rapporte Selim el-Meddeb, correspondant de France 24 à Beyrouth. Le périmètre visé comportait une mosquée chiite et un centre commercial".
it"Des soldats du califat ont réussi à faire exploser une motocyclette piégée garée contre un rassemblement de 'rafida' [terme péjoratif désignant les chiites] après que des apostats sont accourus sur les lieux, un des chevaliers du martyre a fait détoner sa ceinture explosive au milieu du groupe", a affirmé l'EI dans un communiqué. La revendication n'a pu être authentifiée, mais le texte est conforme au format habituel des revendications du groupe extrémiste.
Le bilan n'a cessé de s'alourdir, la Croix-Rouge libanaise faisant état dans un dernier bilan provisoire de 41 morts et 181 blessés. Parmi ces derniers, de nombreux sont dans un état critique, selon le ministre de la Santé, Waël Abou Faour.
"Je venais d'arriver dans la rue quand l'explosion a eu lieu. J'ai transporté moi-même trois femmes et un de mes amis morts" dans les attaques, a déclaré un témoin à une télévision locale. Un autre a lancé : "Quand la seconde explosion s'est produite, j'ai cru que c'était la fin du monde".
Un "acte abject"
Le président français François Hollande a exprimé son "effroi" et son "indignation", dénonçant un "acte abject". Washington a également condamné le double attentat-suicide, évoquant des "actes terroristes horribles".
Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a parlé "d'acte méprisable" et appelé les Libanais à "continuer de travailler à préserver la sécurité et la stabilité" du pays.
Entre juillet 2013 et février 2014, les fiefs du Hezbollah ou des régions fidèles à ce mouvement ont été visés par neuf attentats, la plupart revendiqués par des groupes extrémistes sunnites. Ceux-ci avaient présenté leurs attaques comme une "vengeance" à la décision du Hezbollah d'envoyer des milliers de ses hommes combattre en Syrie au côté du régime de Bachar al-Assad contre les rebelles et les jihadistes, en grande majorité des sunnites.
"Il y a deux jours l’organisation État islamique a enregistré une importante défaite en Syrie, dans la région d’Alep, face à l’armée syrienne soutenue par le Hezbollah libanais et appuyée par l’aviation russe, rappelle Selim el-Meddeb. Si la revendication n’établit pas de liens directs avec ces deux événements, beaucoup au Liban craignent que cette attaque n’intervienne en représailles à cette défaite."
itIl y a moins d'un mois, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, avait de nouveau défendu son combat en Syrie auprès du régime Assad, en parlant d'"une bataille essentielle et décisive".
La présence du Hezbollah en Syrie "est plus importante que jamais - qualitativement, quantitativement et en matière d'équipement", avait-il dit. "Sans la persévérance au sol face à Daech [acronyme arabe de l’EI] et ses alliés […] qu'en serait-il de la région aujourd'hui, en Irak, en Syrie et au Liban ?" avait-il poursuivi. D'après un dernier bilan donné par l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), 971 membres du Hezbollah ont trouvé la mort en Syrie.
Avec AFP