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Kunduz : la frappe américaine a été menée "à la demande" des forces afghanes, selon l'Otan

Les raids américains qui ont causé la mort de 22 personnes à l'hôpital de Médecins sans Frontières de Kunduz, en Afghanistan, ont été menées à la demande de Kaboul, a affirmé le général John Campbell, patron de la mission de l'Otan dans le pays.

Le raid aérien américain qui a tué 22 personnes à l'hôpital de Médecins sans Frontières (MSF) dans la ville afghane de Kunduz a été mené "à la demande" des forces afghanes, a affirmé l'Otan, lundi 5 octobre.

L'armée afghane, acculée par les rebelles talibans, "a demandé un soutien aérien aux forces américaines" dans la nuit de vendredi à samedi, a déclaré le général américain John Campbell, patron de la mission de l'Otan en Afghanistan. Ces dernières ont alors déclenché une frappe aérienne.

MSF a de son côté pointé les "contradictions" dans le récit donné par les États-Unis du bombardement. "Le récit [de Washington] sur l'attaque change sans cesse", s'est indigné Christopher Stokes, le directeur général de l’organisation.

L’assertion du général américain va en effet à rebours des récits fournis jusque-là par l'Alliance atlantique, selon lesquels le bombardement visait à soutenir des soldats américains ciblés par les Taliban.

>> À lire sur France 24 : "Les frappes aériennes sur un hôpital de MSF à Kunduz sont "inexcusables", selon l'ONU"

La frappe, qui a fait au moins 22 morts, dont 12 employés et 10 patients, et poussé MSF à retirer son personnel de Kunduz, constitue un coup terrible pour la population civile prise dans les combats entre l'armée afghane et les Taliban pour le contrôle de cette ville du nord de l’Afghanistan. C'est en effet le seul établissement de la région capable de soigner les blessures de guerre les plus graves. "À l'heure actuelle, je ne peux pas vous dire si le centre de traumatologie de Kunduz rouvrira ou pas", a expliqué Kate Stegeman, porte-parole de MSF en Afghanistan.

Situation "confuse et compliquée"

Peu après le raid meurtrier, Barack Obama a rapidement annoncé l'ouverture d'une enquête, dont il attend les résultats pour "porter un jugement définitif sur les circonstances de cette tragédie". La situation sur le terrain était "confuse et compliquée" lors de la frappe, a renchéri son secrétaire à la Défense, Ashton Carter.

Des explications alors jugées "insuffisantes" par Christopher Stokes, qui s'est prononcé pour une enquête "exhaustive et transparente" menée par un "organisme international indépendant". Car MSF rejette en bloc les justifications de responsables afghans, selon lesquelles des combattants talibans se trouvaient dans l'établissement et s'en servaient comme base.

"Ces déclarations impliquent que les forces afghanes et américaines aient décidé ensemble de raser un hôpital entièrement fonctionnel [...]. Cela équivaut à reconnaître qu'il s'agit d'un crime de guerre", a déclaré Christopher Stokes, en écho à l'ONU qui jugeait dès samedi que la frappe aérienne pourrait relever du "crime de guerre" si elle était jugée "délibérée par la justice". De plus, "cela contredit totalement les premières tentatives du gouvernement américain de minimiser les conséquences des attaques comme n'étant qu'un ‘dommage collatéral’", un vocable connoté utilisé par l'Otan quelques heures après la frappe.

MSF affirme avoir transmis préventivement les coordonnées GPS de son hôpital aux armées afghane et américaine. Or les bombardements se sont poursuivis "pendant plus de quarante-cinq minutes" après que l'ONG a averti ces armées que son établissement avait été touché par de premiers tirs. "Les impacts étaient très ciblés, toujours sur le même bâtiment. L'avion est parti, puis il est revenu pour redonner suite à une série d'impacts, exactement sur le même bâtiment", a expliqué à l'AFP le Dr Bart Janssens, directeur des opérations de MSF.

"Dommages collatéraux" controversés

En Afghanistan, les frappes aériennes de la coalition de l'Otan, qui compte encore 13 000 soldats dont 10 000 Américains, font l'objet d'une controverse quant aux "dommages collatéraux" qu'elles engendrent. Mais elles se sont avérées capitales dans le soutien apporté par l'Otan à l'armée afghane dans sa contre-offensive pour reprendre Kunduz aux Taliban.

Les insurgés étaient parvenus à s'emparer de la ville en quelques heures seulement la semaine dernière, remportant ainsi leur plus grande victoire depuis la chute de leur régime en 2001 et infligeant un grave revers au président Ashraf Ghani.

Les forces afghanes ne leur ont opposé qu'une faible résistance, symptomatique des énormes difficultés qu'elles rencontrent pour contenir les combattants islamistes qui ont étendu leur insurrection aux régions du nord du pays.

Avec AFP