Les élections régionales de dimanche s'annoncent décisives pour l'avenir de la Catalogne. Si les indépendantistes, de droite comme de gauche, remportent une majorité de sièges, ils entameront le processus d'indépendance de la province.
Drapeaux de l'Espagne d'une part, indépendantistes de l'autre. Une campagne électorale très particulière s'est achevée, vendredi 25 septembre, en Catalogne, où tous les analystes s'accordent sur un point : les élections régionales de dimanche sont historiques.
"Il est une Catalogne qui aime son peuple, sa terre et qui pour cela ne veut pas qu'elle soit amputée de l'Espagne et de l'Europe", a déclaré le chef du gouvernement espagnol Mariano Rajoy devant un millier de militants agitant des drapeaux du royaume d'Espagne, dans un palais des Congrès de Barcelone.
C'était le cinquième déplacement en 15 jours en Catalogne de Mariano Rajoy, mobilisé comme jamais pour un scrutin régional et exceptionnellement soutenu, vendredi soir, par l'ex-président français Nicolas Sarkozy, venu défendre "l'unité de l'Espagne".
Car même si en théorie, ces élections régionales ne visent qu'à renouveler le Parlement de 135 sièges de cette région industrieuse de 7,5 millions d'habitants entre Pyrénées et Méditerranée (nord-est de l'Espagne), elles sont sans précédent.
Les indépendantistes, représentés par la grande coalition "Junts pel si", de droite et de gauche, et la liste d'extrême gauche de la Cup (Candidature d'unité populaire), ont décidé d'en faire un plébiscite : s'ils ont une majorité de sièges, comme l'indiquent les sondages, ils mettront en branle un processus qui mènera la Catalogne vers l'indépendance, en 2017.
Ce suffrage mène vers "l'espoir, la dignité, la liberté", a clamé vendredi soir leur figure de proue Artur Mas, le président sortant, devant les dizaines de milliers de personnes réunies par la coalition Junts pel si, "Ensemble pour le oui".
Inquiétudes du monde économique
"Dimanche, le 27 septembre, est un jour historique", a-t-il martelé au pied de la montagne de Montjuic, où quatre colonnes illuminées en rouge symbolisaient les quatre traits rouges (sur jaune) du drapeau catalan.
Après un siècle de tensions plus ou moins vives avec Madrid autour de la langue catalane - interdite sous la dictature de Francisco Franco (1939-1975) - et la fiscalité, le fossé s'est brutalement creusé en moins d'une décennie entre les nationalistes catalans et le gouvernement central, sur fond de grave crise économique.
Furieux de l'invalidation par le Tribunal constitutionnel en 2010 d'une partie du statut d'autonomie de la région, les nationalistes réclamaient en vain depuis 2012 un référendum d'autodétermination.
Mais leurs projets inquiètent les banques, les grands groupes, et les marchés, au moment où l'Espagne commence à sortir de la crise, avec une croissance de 3,3 % prévue pour 2015. Sans la Catalogne, le pays serait amputé non seulement de 16 % de sa population mais aussi de 25 % de ses exportations et de 19 % de son PIB. Et les ministres espagnols ont joué les Cassandre, annonçant qu'une séparation ferait de la Catalogne un État paria et ruiné, exclu de l'Union européenne, où le chômage atteindrait 37 % et les retraites plongeraient de 44 %.
"L'Europe avec une Espagne divisée serait une Europe affaiblie [...]. Les élections dimanche ne sont pas simplement le problème de l'Espagne et de la Catalogne, c'est le problème de toute l'Europe qui a besoin de votre unité", a clamé Nicolas Sarkozy devant les partisans de Mariano Rajoy. Avant lui Angela Merkel, David Cameron et Barack Obama ont également plaidé pour une Espagne unie.
Pour le reste des Espagnols, la Catalogne demeure cependant pour l'instant une vague préoccupation, loin derrière le chômage ou l'économie.
Avec AFP