logo

Semaine décisive pour l’économie mondiale dans l'attente des décisions de la Fed

La Réserve fédérale américaine doit décider, jeudi, si elle hausse ses taux directeurs pour la première fois depuis 2006. Un choix qui peut s’avérer décisif pour l’économie mondiale.

Fed vos jeux ! La Réserve fédérale américaine rehaussera-t-elle, jeudi 17 septembre, son principal taux directeur pour la première fois depuis 2006 ? Économistes et analystes financiers y vont, ces derniers mois, tous de leurs pronostics : 48 % d’entre eux seulement prévoient une hausse en septembre, au dernier recensement de la chaîne économique Bloomberg datant du 31 août. Un mois plus tôt, ils y croyaient à 77 %.

Avant l’été, le scénario semblait pourtant écrit d’avance : l’économie américaine avait repris des couleurs, le chômage était passé sous la barre des 6 % et l’utilité de maintenir des taux proches de zéro, synonymes de crédits peu chers et donc de dynamisme économique, n’était plus évident.

Risque de bulles spéculatives

Des vents contraires ont commencé à souffler, ajoutant de l’eau au moulin des partisans d’une hausse des taux. Les prix ont grimpé et le gouverneur de la banque centrale de San Francisco a appelé, en juin, à agir avant que l’inflation atteigne 2 % (la Fed veut maintenir l’inflation sous cette barre). Resserrer les vis du crédit permet, en effet, d’éviter que trop d’argent ne circule, ce qui limite la hausse des prix.

Maintenir les prêts aux taux attractifs peut nourrir des bulles spéculatives. Plus les crédits sont bons marchés, plus les investisseurs empruntent facilement pour placer l’argent dans l’immobilier ou les marchés financiers dans l’espoir de toucher le jackpot. Le prix Nobel d’économie 2013, Robert Schiller, assure, dans le "Financial Times", que les valuations sur les marchés des actions à Wall Street n’ont plus grand-chose à voir avec la valeur réelle des entreprises : la spéculation est à l’œuvre et l’argent facile dû aux très faibles taux nourrit cette bulle.

Autant d’argument que Janet Yellen, la directrice de la Fed, connaît. Elle avait annoncé, en fin d’année 2014, que la Réserve fédérale se préparait à relever ses taux en 2015. Il ne lui reste plus que deux réunions avant la fin de l’année. Septembre semble donc idéal pour ce faire.

"Panique et tourmente"

Pas du tout répond un nombre grandissant d’organisations internationales. La Banque mondiale et le Fonds monétaire international ont ainsi assuré qu’il était urgent pour la Fed d’attendre encore. Car la Chine est passée par là entre temps. La panique boursière à Shanghai  nourrie par les doutes sur l’état général de l’économie chinoise a prouvé, en entraînant les autres bourses dans son sillage, que l’économie mondiale restait fragile.

Kaushik Basu, économiste en chef à la Banque mondiale, n’y est pas allé avec le dos de la règle de maître d’école. Il craint qu’une hausse des taux en septembre plonge les pays émergents "dans la panique et la tourmente", créant un climat propice à une nouvelle crise économique mondiale.

La bonne santé des pays en voie de développement dépend de la Fed pour deux raisons. La plupart d’entre eux se sont fortement endettés auprès des États-Unis lorsque les taux étaient proches de zéro, rappelle le quotidien britannique "The Daily Telegraph". Ils devront rembourser davantage si les taux d’intérêt venaient à monter.

De plus, les investisseurs seront tentés de rapatrier leurs fonds aux États-Unis où les taux d’intérêt seront plus élevés ce qui fait que les placements y seront plus rémunérateurs. Ils risquent donc de réinvestir chez l’Oncle Sam une part de l’argent placé auparavant dans les pays émergents. Cette fuite des capitaux, cumulée à des dettes de plus en plus lourdes à rembourser, peut mettre certains pays très exposés, comme la Turquie, le Brésil ou la Russie, dans des situations périlleuses.

Janet Yellen a donc le choix entre deux scenarii potentiellement dangereux. Si elle décide de hausser les taux, certains pays émergents risquent de sombrer rapidement. Si elle ne fait rien, la Fed risque de nourrir des bulles susceptibles d’être à l’origine de futures crises de l’ampleur de celle de 2008.