Après le démantèlement du bidonville de La Courneuve, jeudi, plusieurs associations et ONG dénoncent le caractère inhumain de ces expulsions, réalisées selon elles sans préavis.
Alors que plusieurs dizaines de familles roms et roumaines se sont retrouvées démunies dans les rues de La Courneuve, jeudi 27 août, suite au démantèlement du campement Le Samaritain, des associations continuent de s’époumoner pour dénoncer une décision qu’elles estiment arbitraire. Parmi elles, Médecins du monde et Voix des Roms s’offusquent de la rapidité et de l’opacité avec lesquelles la préfecture a délogé quelque 300 personnes, dont certaines sont présentes dans le campement depuis 2008.
"C’est une surprise totale. Il n’y a eu aucun préavis", explique à France 24 Mehdi Bouteghmes, un élu de La Courneuve. "Depuis la date du 15 août, ce démantèlement était possible mais nous attendions les résultats d’un diagnostic social que les autorités étaient en train de mener dans le camp", explique-il.
Depuis août 2012, la circulaire Manuel Valls prévoit une anticipation de toute expulsion, un point qui ne revêt cependant pas de contrainte juridique.
"Des personnes étaient passées enquêter hier auprès des habitants. On pensait qu’elles allaient faire les choses dans les règles. On ne s’attendait pas à ce que les habitants du camp soit expulsés aujourd’hui. Finalement, ce diagnostic social était peut-être un trompe-l’œil", regrette pour sa part Martin Duteurtre, médecin bénévole et responsable de mission pour Médecins du monde. Ce dernier précise que les conclusions de cette enquête, au cours de laquelle les travailleurs et les enfants scolarisés devaient notamment être recensés, n’étaient pas attendues avant plusieurs jours.
Ce dernier explique avoir été informé par un email à 13h20 que des cars de CRS étaient arrivés sur les lieux dans cette commune populaire au nord de Paris. "Tout s’est fait dans l’opacité la plus totale."
"Trahison"
Suite à l’évacuation de ce campement, considéré comme le plus vieux bidonville de France, seulement 12 familles sur les 80 présentes ont été relogées dans des chambres d’hôtel, commente Mehdi Bouteghmes. "C’est une trahison totale de nos valeurs et de la circulaire Valls. C’est inadmissible et inhumain, et c’est indigne d’un maire communiste de faire cela", lance-t-il.
La semaine dernière, le Défenseur des droits, Jacques Toubon, avait appelé l’État à "prendre en compte la situation des enfants et assurer la continuité de l’accès aux droits, notamment en matière de prise en charge scolaire". Le sort de ce campement avait également motivé le lancement d’une pétition qui a récolté 38 800 signatures sur Internet.
En réaction à ces levées de bouclier, le secrétaire général de la préfecture de la Seine-Saint-Denis, Hugues Besancenot, a assuré que la dizaine de familles identifiées comme étant "les plus vulnérables" par le diagnostic social effectué en préalable à l'évacuation seraient prises en charge. "Pour les autres, je rappelle que le droit commun, pour n'importe quelle personne qui n'a pas de logement, c'est de faire appel au 115", a ajouté Hugues Besancenot. "Les personnes qui occupent ce terrain savent que depuis le 15 août, elles devaient le quitter. L'évacuation est simplement la mise en œuvre d'une décision de justice", a-t-il rappelé.
Martin Duteurtre, de son côté, ne s’avoue pas vaincu. "Il y a suffisamment de gens en colère pour qu’on essaie de faire quelque chose d’un point de vue juridique. Il faut voir si des actions peuvent être prononcées. Mais concrètement, ce n’est pas cela qui va changer le devenir des personnes qui ont été expulsées aujourd’hui. En ce qui les concerne, elles vont errer pendant des semaines à la recherche d’un toit."