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Haut lieu des rendez-vous culturels et littéraires de Saint-Germain-des-Prés, à Paris, la célèbre librairie La Hune a fermé ses portes le 14 juin. Selon Gallimard, propriétaire des lieux, le commerce n'était plus assez rentable.

"Nous sommes fermés, Madame. Définitivement fermés. Je suis désolé." Il est 20 h, dimanche 14 juin dans le quartier de Saint-Germain-des-Prés, à Paris, et la librairie La Hune, un des rendez-vous intellectuels emblématiques de la capitale, ferme ses portes.

Fondée au sortir de la guerre par des intellectuels résistants, La Hune va céder la place à un commerce de reproductions photographiques. À quelques minutes de la fermeture, on se presse dans la librairie. Sur un coin de table, une bouteille de champagne, quelques briques de jus de fruit sont mis à la disposition des clients, mais le cœur n'est pas à la fête. Miguel Dupont, libraire depuis 25 ans à La Hune, a les larmes aux yeux.

Hier à #Paris, fermeture de la mythique librairie de #LaHune dans le quartier #StGermain pic.twitter.com/QmIX8kjp8N

— Breaking3zero (@Breaking3zero) 15 Juin 2015

Les derniers clients, dont Julien Dray, vice-président du conseil régional d'Île-de-France, chargé de la Culture, se pressent à la caisse, les bras chargés de bouquins. L'artiste Sophie Calle tient à être la dernière cliente à régler ses achats : deux livres de poche. "J'avais acheté le dernier livre à l'adresse historique de La Hune. J'ai acheté le premier à la nouvelle adresse et me voilà aujourd'hui. C'est comme un rituel", dit l'artiste. "C'était ma librairie", dit-elle.

Une seule librairie sur le boulevard Saint-Germain

"La librairie accumulait trop de handicaps", estime Olivier Place, directeur des Librairies Flammarion, interrogé par l'AFP. Le chiffre d'affaires a en effet baissé de 35 % depuis 2009. Certains clients estiment que l'éditeur Gallimard a laissé tombé La Hune.

Déjà en mai 2012, Gallimard avait forcé La Hune à quitter son siège historique. La librairie avait été transférée au 18, rue de l'Abbaye. Ses locaux du 170 boulevard Saint-Germain avaient été loués à Louis Vuitton. Un nouveau signe de la gentrification du quartier, qui explique en partie l'extinction du mythe littéraire. Sur le boulevard Saint-Germain, il ne reste désormais qu'une librairie, "L'écume des pages".

Le rideau de fer s'abaisse. Une gerbe est déposé devant l'entrée. "Merci à tous", dit Miguel Dupont de plus en plus ému. Quelques applaudissements fusent des dizaines de clients, badauds et touristes massés au dehors vite couverts par des huées. "Où est la ministre de la Culture ?", demande un homme.

La librairie employait quatre salariés en CDI et sept en CDD. Ils devraient être reclassés dans une des deux autres librairies du groupe Flammarion (Centre Pompidou, Paris et Metz). Mais l'inquiétude est palpable. "Gallimard ne fait pas ce qu'il faut faire et a beaucoup de mal à nous recaser à égalité de compétence et de qualification", estime Miguel Dupont. "Ça pose un gros problème", dit-il en notant que le personnel "n'a pas de dialogue avec Gallimard".

La Hune, librairie du groupe Flammarion depuis 1976, est passée sous la houlette du groupe Madrigall, lors du rachat de Flammarion par Gallimard en 2012.

Avec AFP