Le président turc Recep Tayyip Erdogan a rompu, jeudi, le silence qu'il s'était imposé depuis le revers subi par son parti aux législatives, pour exiger la formation "aussi vite que possible" d'un gouvernement de coalition.
Désavoué par le résultat des urnes, Recep Tayyip Erdogan a rompu le silence qu’il s’était imposé depuis le 7 juin. Le président turc a appelé jeudi 11 juin les partis politiques à s'entendre rapidement pour constituer un gouvernement de coalition, dans sa première intervention publique depuis le scrutin de dimanche.
Erdogan, qui a vu son Parti de la justice et du développement (AKP) perdre sa majorité absolue au Parlement après les élections législatives, a pris acte des résultats : "Tout le monde doit respecter la volonté de la nation", a-t-il jugé.
"Chacun doit mettre son égo de côté et aider à la formation rapide d'un gouvernement", a-t-il indiqué dans un discours prononcé devant des étudiants, à la chambre de commerce d'Ankara.
Défaite personnelle
"C'est la principale de nos priorités à l'égard de nos 78 millions de citoyens. Aucun politicien n'a le droit de dire 'je'. Nous devons dire 'nous'", a ajouté le président islamo-conservateur, pour qui le scrutin a sonné comme une défaite personnelle tant il s'était directement investi dans la campagne.
Recep Tayyip Erdogan a rappelé qu'il contribuerait à trouver une solution politique dans le respect des pouvoirs que lui confère la Constitution. "En tant que premier président élu, ma responsabilité est centrale. J'en suis conscient", a-t-il dit.
Le chef du principal parti d'opposition, Kemal Kiliçdaroglu, lui a immédiatement répondu via Twitter que son Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate) "travaill(ait) avec acharnement pour sortir la Turquie de cette situation difficile".
Au pouvoir depuis 13 ans, le Parti de la justice et du développement (AKP) est arrivé en tête du scrutin de dimanche en recueillant 40,8 % des voix mais a subi un recul de près de 10 points par rapport à son score de 2011 (49,9 %), ce qui l'a privé de la majorité absolue qu'il détenait au Parlement. Les deux principaux adversaires de l'AKP, le CHP et le Parti de l'action nationaliste (MHP, droite) ont obtenu 132 et 80 sièges. Le parti pro-kurde HDP (Parti démocratique du peuple) a réussi une performance historique en envoyant 80 députés à l'Assemblée.
Tâche compliquée
Avec seulement 258 des 550 sièges de députés, l'AKP est contraint pour la première fois de former une coalition avec un ou plusieurs des trois partis de l'opposition, une tâche qui s'annonce compliquée.
La constitution d'un gouvernement de coalition s'annonce particulièrement délicate, car les trois partis rivaux de l’AKP ont jusque-là rejeté publiquement toute idée d'alliance avec le parti islamiste. Le HDP pro-kurde s'est même dit ouvert à toutes les options pour former un gouvernement de coalition, hormis celle de s'allier avec l’AKP.
Le Premier ministre Ahmet Davutoglu, chef de file de l'AKP, s'est montré peu enthousiaste à l'idée d'une coalition tout en répétant que toutes les options demeuraient ouvertes, parmi lesquelles un gouvernement minoritaire.
En cas d'échec de l'une de ces deux solutions, le chef du gouvernement a estimé que des élections anticipées pourraient être convoquées. "Je négocierai avec toute le monde. Si rien n'en sort (...) nous retournerons devant le peuple et nous lui demanderons un nouveau mandat", a-t-il dit à la télévision.
Avec AFP et Reuters