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L'Arabie saoudite a lancé jeudi une opération militaire au Yémen impliquant plus de dix pays, dont ses alliés du Golfe et l'Égypte, pour contre l'avancée de la milice chiite des Houthis. Décryptage.

L'offensive de la coaltion menée par l'Arabie saoudite contre les millices des Houthis au Yémen a débuté dans la nuit du mercredi 25 mars. Si elle se limite pour l'instant à des frappes aériennes, Riyad a d'ores et déjà annoncé qu'une intervention au sol pourrait s'avérer nécessaire. Pour quelles raisons le royaume saoudien a pris cette initiative et quels sont les enjeux du conflit ? Eléments de réponse avec Atmane Tazaghart, rédacteur en chef à France 24 et spécialiste des mouvements terroristes.

France 24 : Une coalition très large s’est mise en place très rapidement. Que sait-on sur le lancement de cette opération ?

Atmane Tazaghart : C’est une offensive menée par l’Arabie saoudite, à laquelle participent une dizaine de pays : tous les pays du Golfe sauf le sultanat d’Oman, des forces régionales arabes importantes comme l’Égypte ou le Soudan, ainsi que d’autres pays comme le Maroc et la Jordanie. Il y a aussi une force régionale incontournable au Moyen-Orient, le Pakistan. L’opération a le feu vert clair des États-Unis, puisque c’est de Washington que l’opération a a été annoncée par l’ambassadeur saoudien. Et dans la foulée, la Maison Blanche a déclaré qu'elle fournirait une aide logistique. Contrairement à l’objectif annoncé par l’Arabie saoudite - empêcher les Houthis de s’emparer du pouvoir - les États-Unis laissent aux Houthis une porte ouverte, en espérant les faire revenir à la table des négociations.

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L’Arabie saoudite est en pointe dans cette offensive. Pour quelles raisons ? Quels sont ses intérêts au Yémen ?

L’élement déclencheur est sans aucun doute l’avancée des Houthis sur Aden. Quand ils ontpris le pouvoir à Sanaa, ils ont chassé le président Hadi, tout le gouvernement, emprisonné quelques ministres et dissous le Parlement. La position des pays du Golfe, ainsi que de l’émissaire de l’ONU, était alors d’essayer de les faire revenir à la table des négociations. Mais là, à Aden, les Houthis ont voulu faire un coup de force pour chasser le président Hadi de son nouveau bastion et l’Arabie a commencé à masser des forces à la frontière. Les choses se sont accélérées : l’Arabie ne pouvait pas laisser les Houthis,  une milice chiite pro-iranienne, prendre le pouvoir à ses portes. Il y a là un jeu qui dépasse le Yémen.

Ces milices sont soutenues par l’Iran. Quel est le rôle de Téhéran dans cette crise ?

L’Iran soutient les Houthis au même titre qu’il soutient tout ce qui est chiite dans la région. Mais n’oublions pas que jusqu’en décembre dernier, les Houthis étaient soutenus en sous-main par l’Arabie saoudite, car ils faisaient face à Al-Qaïda et à l’organisation de l'État islamique au Yémen. C’est donc un jeu un peu trouble qui survient, alors même que l’Iran est en train de négocier avec les États-Unis à Lausanne autour de son programme nucléaire. Téhéran ne souhaite pas aller à l’affrontement et va plutôt essayer de jouer les modérateurs, en se faisant passer pour la force régionale qui peut ramener tout le monde à la raison, dans une région déjà très tendue.